À chaque retard sa couleur: pour une année d'allers-retours en banlieue de Munich, Claudia Weber a utilisé six pelotes de laine et tricoté une écharpe d'1,50 m. Son histoire a fait le tour du monde, jusqu'aux Etats-Unis. L'écharpe a ensuite été vendue aux enchères.
Qui a dit que nos voisins allemands n'avaient pas d'humour? L'histoire est pourtant plutôt banale, malheureusement. Les retards de train on en connaît tous. Mais cette Bahn-Verspätungsschal ou "écharpe des retards de train" a beaucoup amusé les réseaux sociaux, au point de pousser sa créatrice à la vendre aux enchères et de lui décrocher les honneurs de la presse internationale telle que le New York Times ou CNN !
Beaucoup de rouge
Nous les retards, ça nous met les nerfs en pelote. Claudia Weber, elle, a préféré les tricoter, ses pelotes. Pas moins de six, pour une une année d'allers-retours entre Munich et sa banlieue. Pour s'occuper pendant ses trajets en 2018, elle a eu cette idée brillante de tricoter une seule et même écharpe aux couleurs des retards de son train, deux rangées de mailles par jour, avec un code couleur simple mais esthétique : gris moins de 5 minutes de retard, rose pour 5 à 30 minutes, rouge pour un retard sur les deux trajets ou pour un retard de plus de 30 minutes. Et le moins qu'on puisse dire, c'est qu'il y beaucoup, beaucoup de rouge.Meine Mutter ist Pendlerin im Münchner Umland. Und begeisterte Strickerin. 2018 hat sie einen "Bahn-Verspätungsschal" gestrickt. Pro Tag zwei Reihen: Grau bei unter 5 Minuten, rosa bei 5 bis 30 Minuten Verspätung, rot bei Verspätung auf beiden Fahrten oder einmal über 30 Minuten. pic.twitter.com/PpGJiiU8AS
— Sara Weber (@sara__weber) 6 janvier 2019
C'est sa fille, Sara, journaliste de son état, qui a posté l'écharpe d'un mètre et demi de long sur les réseaux... Et le buzz est immédiat: 23.000 like, 6.700 retweet. "Ma mère [...] est une tricoteuse passionnée", explique Sara Weber dans son tweet, où elle détaille également le code couleur en question. "Au printemps tout allait bien. Beaucoup de gris et de rose", décrit-elle dans un autre tweet. "Ensuite on voit beaucoup de rouge pendant un bout de temps: travaux sur la voie pendant toutes les vacances d'été." Bus de remplacements, 1h20 de retard systématique par trajet pendant six semaines et demi.
Im Frühjahr war noch alles ok. Viel grau und rosa. Dann war eine Weile alles rot: Schienenersatzverkehr, die ganzen Sommerferien lang. Da hat sie pro Fahrt nicht mehr 40 Minuten gebraucht, sondern knapp zwei Stunden. Jeden Tag. Sechseinhalb Wochen lang. pic.twitter.com/5IupFg1bPv
— Sara Weber (@sara__weber) 6 janvier 2019
Humour et happy end
Posté pour la première fois le 6 janvier, l'écharpe suscite beaucoup de réactions, plus ou moins amusées. Et même en haut lieu de la Deutsche Bahn (DB), la compagnie des trains allemands, on admire le sens de la métaphore de Claudia Weber. "Dans l'absolu c'est évidemment un sujet qui ne nous plait pas et que nous prenons à bras le corps", a réagi Antje Neubauer, directrice du service marketing de la DB dès le lendemain. "Mais: voilà ce que j'appelle être créatif ! Echarpe sensationnelle, superbe !" Ou comment prendre les choses du bon côté...Grundsätzlich ist das natürlich ein Thema, das uns nicht glücklich macht und an dem wir mit Hochdruck arbeiten. Aber: Das nenne ich mal kreativ, sensationeller Schal, großartig
— Antje Neubauer (@antjePR) 7 janvier 2019
D'autant plus exotique que les Allemands sont plutôt connus pour leur ponctualité et leur rigidité. L'affaire fait le buzz, et pousse Claudia Weber et sa fille à vendre l'écharpe aux enchères. Clin d'oeil: elles annoncent offrir le produit de la vente à la Bahnohofsmission, fondation sociale liée à la DB qui vient en aide aux personnes démunies ou en difficulté pendant leurs trajets. Vue sa longueur, l'écharpe tiendra bien chaud à son propriétaire. Certains, toujours sur les réseaux, souhaitaient voir les dirigeants de la Bahn la porter en permanence, même au coeur de l'été, en pénitence en quelque sorte. Et c'est justement l'équipe de la communication sur le net de la DB qui s'est fendue de la plus haute enchère. 7.550 euros tout de même. Parce que les Allemands, comme tout le monde, aiment les histoires qui finissent bien. Après tout, la maille peut faire le bonheur.
Claudia Weber a naturellement repris ses allers-retours quotidiens vers Munich. Elle a bien évidemment commencé une nouvelle mouture de sa désormais célèbre écharpe tricolore. Et a d'ailleurs déjà annoncé avoir eu recours aux trois couleurs pour la version 2019, en à peine quelques jours. Les retards, eux au moins, seront toujours à l'heure.