TÉMOIGNAGE : "On est infirmière, assistante sociale, secrétaire", raconte une directrice d'école strasbourgeoise

Difficile d'être directeur d'école. Pas franchement reconnu, mal rémunéré, mal déchargé, il doit être multi-tâches et la situation ne s'est pas arrangée avec la covid-19. Alors pour faire la lumière sur cette fonction, le syndicat SE-Unsa organise la semaine de la direction d'école. 

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Elle a dans la voix le poids de ses 40 années d'expérience. Agnès Knipper est directrice de l'école maternelle Langevin à Strasbourg, Dix classes en zone prioritaire. "Ça fait 20 ans que je ne fais plus que de la direction, c'est déjà pas mal, et je suis toujours aussi enthousiaste! Mais si je tiens c'est grâce aux gens. J'ai rencontré des familles de tous horizons, de toutes classes sociales, des parents qui ont fui des pays en guerre, bref j'aime ce que je fais".

A l'aube de prendre sa retraite, Agnès Knipper a la foi chevillée au corps. Et heureusement. Parce que son quotidien est un combat. Avec un atout dans sa besace, elle est directrice à temps plein. "J'ai une décharge totale, un avantage obtenu en 2005 mais qui ne concerne que le Bas-Rhin". Les décharges sont données en fonction du nombre de classes dans l'école et de la zone géographique. Par exemple, une école qui ne compte que deux classes donnera droit à une décharge de 10 jours par an, dix classes, la moitié du temps scolaire.

Et Agnès Knipper de nous raconter son quotidien. "Ma charge essentielle c'est l'humain, je fais l'interface avec les collègues, les enfants, les parents, les collectivités, les associations. Vous savez, une directrice d'école, c'est une secrétaire, une infirmière, une assistante sociale, tout cela à la fois, vous êtes censés être le sauveur de tout le  monde sauf de vous-même", sourit-elle. En ajoutant, "les tâches administratives, ce n'est vraiment pas l'essentiel, je me les réserve pour le soir ou les mercredis". Sauf quand le énième protocole sanitaire arrive le dimanche soir pour une application le lundi. 

 

Une aide administrative est essentielle

Alors quand on lui demande ce qu'elle aimerait voir changer prioritairement, elle répond du tac au tac. "Une reconnaissance financière c'est bien mais surtout il faudrait une aide administrative qui permettrait de prioriser, de prendre de la distance". Bref, arrêter d'avoir la tête sous l'eau. C'est justement le sens des propositions du syndicat enseignant SE-Unsa qui organise pour la deuxième fois une semaine de sensibilisation à la fonction de directeur d'école.

Pour l'occasion il publie un sondage Ifop qui dévoile la fierté des directeurs d'école d'exercer ce métier à 96% mais surtout leur épuisement, à 75%. Une fatigue accentuée évidemment par la crise sanitaire. 

"Nous nous battons depuis des années concernant la fonction de directeur, explique Didier Charrié, co-secrétaire départemental du SE-Unsa du Bas-Rhin. Et à force de réunions avec le ministère, nous avons obtenu des petites avancées, comme une amélioration du régime de décharges de certaines écoles et une revalorisation de l'indemnité de 450 euros bruts annuels, c'est un début mais c'est loin d'être suffisant." Des négociations qui avaient notamment avancé après le suicide fin 2019 de Christine Renon, directrice à Pantin en Seine-Saint-Denis.

 

Un manque de reconnaissance criant

Parmi les propositions, la mise en place d'un secrétariat administratif pérenne, des outils informatiques plus performants, une décharge plus importante et une meilleure rémunération. Reste le problème de la considération. Bien souvent, les directeurs d'école ont le sentiment d'être incompris voire lâchés par les parents, et surtout par la hiérarchie à haut niveau. "Au ministère, ils sont à 1.000 lieux d'imaginer ce qu'on vit, peste Agnès Knipper. Avec la covid, on a dû mettre en place de nombreux protocoles. En fonction des données économiques, et à la limite je trouve ça normal d'y prêter attention, ce qui était valable le matin ne l'était plus le soir. On a pris les enseignants pour des cons. Un coup les enfants étaient non contaminés ni contaminants, finalement si, bref. J'aurais préféré qu'on nous dise qu'on ne sait pas."

Alors cette semaine, une grande campagne de sensibilisation au métier est lancée au niveau national. Il est temps, un directeur sur trois envisage d'arrêter.

 

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