Ce lundi, Paul-Henri Mathieu a vécu le premier jour du reste de sa vie. Celle de retraité des courts de tennis professionnels, sur lesquels il a évolué pendant 18 années. Souvent avec bonheur, parfois dans la difficulté. Toujours avec pugnacité. Coup d'oeil dans le rétro d'une intense carrière.
A 35 ans, Paul-Henri Mathieu a écrit dimanche la dernière page d'un très long chapitre de sa vie. Il l'avait ouvert dans le garage de ses parents à Lingolsheim, lorsque, tout petit déjà, il tape des centaines de petites balles jaunes contre le mur, avant de faire ses gammes dans le club local sous la houlette de Bertrand Perret.
A 11 ans, direction le sport-études de Reims, avant l'INSEP, puis la Floride, dès l'âge de 14 ans.
L'envol est pris, sa carrière se dessine autour de son jeu de fond de court puissant et physique, qui s'exprimera de plus en plus efficacement sur terre battue. De préférence, à Paris, Porte d'Auteuil, où Roland Garros deviendra très vite son terrain de jeu favori. Il y livrera ses plus beaux combats, que nous vous proposons de revivre ici en images.
2000 - le sacre chez les juniors à Roland Garros
Ils ne sont pas si nombreux, les Français à avoir triomphé Porte d'Auteuil. Même chez les juniors. Avant lui, Henri Leconte (en 1980) ou Fabrice Santoro (1989) y sont notamment parvenus, puis Richard Gasquet (2002), Gaël Monfils (2004) et l'an dernier, Geoffrey Blancaneaux.Lorsque l'Alsacien y parvient, entraîné par Thierry Champion après son expérience américaine, ce titre est la confirmation de son potentiel, déjà entrevu trois ans auparavant, lorsqu'il remporte, à 14 ans, le tournoi jeunes référence au niveau mondial, l'Orange Bowl.
Soulever la Coupe des Mousquetaires, en ce mois de juin 2000, marque le vrai lancement de sa carrière internationale.
Reportage réalisé par France 3 Alsace au lendemain de sa victoire, avec le témoignage de ses proches.
2002 - un match, deux titres et une si cruelle défaite
Roland Garros, chapitre 2. Paul-Henri Mathieu n'a que 20 ans lorsqu'il atteint les 8e de finale du tableau. Face à lui, un monument : l'ancien numéro un mondial André Agassi, vainqueur à Roland Garros en 1999, 8 titres du Grand Chelem à son actif. Mathieu lui oppose sa fougue et sa jeunesse pour mener 2 sets à 0. Il finira par s'incliner en 5 manches mais il gagne le coeur du public parisien qui lui témoignera son affection jusqu'au bout. Et ses galons de guerrier de la terre battue.PHM face à Agassi à Roland Garros en 2002 : David Marcelin et Vincent Roy y étaient pour France 3 Alsace.
En fin d'année, c'est pourtant en indoor, sur dur, que l'Alsacien vit une quinzaine dorée : il enchaîne deux victoires sur le circuit ATP, à Moscou, puis Lyon. Lui qui est entré dans le top 100 mondial s'offre le scalp de joueurs de calibre, comme Marat Safin, numéro 4 mondial.
1e titre sur le circuit ATP, à Moscou : le compte-rendu de Christophe Gomond, pour France 3 Alsace.
Dans la foulée, il remporte Lyon. Claude Lafuma revient sur cette finale pour France 3 Alsace.
Et le voilà propulsé joker de luxe de l'Equipe de France de Coupe Davis, qui dispute une finale à Paris début décembre, face à la Russie. De remplaçant, "Paulo" devient le joueur sur lequel tout repose : alors qu'il est sélectionné pour la première fois de sa carrière, il est amené à disputer le 5e match décisif du week-end, face à un autre joueur de sa génération, Mikhail Youzhny. L'Alsacien mène 2 sets à 0, s'approche à deux points de la victoire et du trophée... mais s'incline en 5 manches. Ses larmes de détresse émeuvent la France entière... et le poursuivront tout au long de sa carrière, "entachée" par une réputation de looser qu'il ne méritait certainement pas.
Reportage diffusé sur France 2 le lendemain de la défaite des Français en finale, en décembre 2002. Paul-Henri Mathieu est au centre de toutes les attentions.
2005 - héros en Bleu, enfin
Son attachement au "maillot bleu", cette Coupe Davis qui l'a tant fait vibrer tout au long de sa carrière (il compte 12 sélections dans cette compétition par nations), est enfin récompensé en 2005, lorsque le Rhénus de Strasbourg est transformé en arène pour accuellir la Suède. Devant les siens, Paul-Henri Mathieu porte les Bleus en remportant ses deux simples, dont le dernier, décisif, face à Thomas Johansson, alors 7e mondial.Au Rhénus, devant les siens, Paulo rapporte le point de la victoire contre la Suède. Récit de D. Marcelin pour France 3 Alsace.
2006 - 2008 - la plénitude
De ces années qui ont précédé sa grave blessure, Paul-Henri Mathieu peut garder de nombreux souvenirs : il a gagné deux titres supplémentaires (à Casablanca et Gstaad, en 2007) et atteint la 12e place mondiale, au printemps 2008. Cette année-là, il a aussi rêvé décrocher une médaille olympique à Pékin, il ne fait que l'effleurer en chutant au pied du podium, en 1/4 de finale.Mais s'il fallait n'en retenir qu'un, il faudrait revenir une fois encore Porte d'Auteuil. Le roi s'appelle alors, déjà, Rafael Nadal. En 2006, il n'est encore que "simple" tenant du titre, loin de ses dix sacres glanés depuis. Mais il effraye déjà. Paulo ne s'en laisse pas conter et livre un match d'anthologie face à l'ogre espagnol au 3e tour du tournoi. Il remporte le 1e set, avant de s'incliner en quatre manches et 4h53 de jeu, le match en quatre sets le plus long de l'histoire.
En 2006, à Roland Garros, Paulo tient la dragée haute au roi de la terre battue, Rafael Nadal. F. Michel avait regardé ce match pour France 3 Alsace.
2012 - la renaissance
En 2010, Paul-Henri Mathieu doit mettre une première parenthèse à sa carrière pour subir une lourde opération de la jambe. Nul ne sait s'il pourra à nouveau, un jour, monter sur un terrain de tennis. Et c'est là sans doute qu'il livre son plus gros combat. Sa période de rééducation dure 15 mois.15 mois d'efforts et de souffrance pour gagner le droit, en janvier 2012, de remonter sur le court. Paulo redevient joueur de tennis dans un tournoi Challenger de deuxième catégorie, à Heilbronn. Il n'est même plus classé à l'ATP.
Mais patiemment, avec une volonté de fer, il parvient à lancer une deuxième carrière très honorable. Symbole de sa renaissance, un match dont il a le secret, à Roland Garros bien sûr, quelques mois à peine après son retour : invité par les organisateurs, il passe le premier tour, première grosse performance, et affronte l'Américain John Isner, tête de série numéro 10. 5h40 de jeu, 7 balles de match, et Paulo s'impose 18-16 lors du 5e set, sous les vivats de la foule massée dans l'arène du court numéro 1. Un souvenir de plus, immense.
Au 2e tour de Roland Garros 2012, Paulo remporte un match d'une rare intensité face à Isner. C'est le début de sa nouvelle carrière, après une longue blessure. France 2 lui consacre un reportage.
Cette deuxième vie sur le court le voit entrer à nouveau dans le top 100, se rapprocher même du top 50, atteindre deux finales à Kitzbühel en 2015 et Montpellier en 2016.
Et surtout prouver définitivement, s'il le fallait, qu'il est un grand champion par le courage et la détermination.
Et gagner le droit de quitter la scène lorsqu'il l'a souhaité : ce dimanche 28 octobre 2017, chez lui, à Paris.