Ils étaient téléguidés par le groupe Etat islamique depuis la zone irako-syrienne : cinq hommes, arrêtés le week-end dernier et soupçonnés d'avoir voulu commettre un attentat le 1er décembre en région parisienne, ont été mis en examen vendredi soir et écroués.
Après cinq jours de garde à vue, ils ont notamment été mis en examen pour "association de malfaiteurs terroriste en vue de la préparation de crimes d'atteinte aux personnes", a-t-on appris du parquet de Paris.
"Une attaque de grande envergure" a été évitée, avait indiqué un peu plus tôt François Hollande, en déplacement à Nîmes, alors que la France est frappée depuis près de deux ans par une vague d'attentats sans précédent ayant fait 238 morts. Quatre Français âgés de 35 à 37 ans, "amis de longue date", avaient été interpellés le week-end dernier à Strasbourg. Inconnus des services antiterroristes, deux sont soupçonnés d'avoir séjourné en Syrie en 2015.
Quatre armes et "des écrits très clairs d'allégeance à Daech" (Etat islamique) ont été retrouvés lors des perquisitions, d'après le procureur de la République de Paris François Molins. Le cinquième suspect, Hicham E., Marocain de 26 ans (BIEN 26) arrêté à Marseille, avait été signalé pour radicalisation par les autorités portugaises, pays où il résidait, et s'était fait refouler de Turquie en 2015. Plus de 4.000 euros, destinés, selon les enquêteurs, à l'acquisition d'armes, ont été saisis lors de son interpellation.
Le commando de Strasbourg et le suspect marocain ne se connaissaient pas, d'après les premiers éléments de l'enquête. Mais ils disposaient d'instructions communes "communiquées par un donneur d'ordre depuis la zone irako-syrienne", a détaillé le procureur.
Recherche de cibles
Les hommes de ce réseau étaient "en possession ou en quête d'armes et de financement", "s'apprêtaient à passer à l'acte" et "recherchaient des cibles", a relevé le procureur. Il a précisé que le passage à l'acte du groupe strasbourgeois était prévu le 1er décembre, "sans que l'on puisse déterminer à ce stade la cible précise choisie". L'exploitation des téléphones et ordinateurs retrouvés lors des perquisitions a révélé qu'une dizaine de sites en région parisienne avaient fait l'objet de recherches sur internet.
Autant de cibles potentielles, parmi lesquelles le 36 quai des Orfèvres, siège de la PJ, le marché de Noël des Champs-Élysées, Disneyland Paris, des terrasses de cafés dans le XXe arrondissement, la station de métro Charonne ainsi que plusieurs lieux de cultes. En garde à vue, un des suspects interpellés à Strasbourg a également évoqué le siège de la PJ parisienne, mais aussi celui de la DGSI à Levallois-Perret (Hauts-de-Seine).
"On ignore encore s'ils prévoyaient une action unique ou des attaques coordonnées", d'après une source proche de l'enquête. Les investigations ont débuté il y a huit mois. Le 14 juin, en plein Euro de football, Nasser B., 38 ans, et Lamary N., 40 ans, sont interpellés, soupçonnés d'avoir contracté des crédits à la consommation pour financer des activités terroristes. Les deux hommes sont en contact avec un donneur d'ordre établi en Syrie, lui-même surveillé par les services de renseignement français.
La DGSI décide alors de tendre un appât: elle met en place une cache d'armes dans le Val-d'Oise pendant plusieurs mois, pour tenter d'attirer d'autres membres du
réseau susceptibles de passer à l'attaque. En vain. Le 14 novembre, un message entre le commanditaire et des membres du groupe strasbourgeois est intercepté, laissant craindre un passage à l'acte imminent. La DGSI organise alors, dans l'urgence, l'opération du week-end dernier.
Ce vaste coup de filet est intervenu dans un contexte de menace terroriste maximale en France. "Pour le seul mois de novembre, les services antiterroristes ont procédé
à l'arrestation de 43 individus, dont 28 ont été déférés devant la justice", a souligné le chef de l'Etat vendredi. Selon le ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve, 17 attentats ont été déjoués depuis le début de l'année, sept en 2015.