Condamné à perpétuité, le tueur en série Pierre Bodein, dit "Pierrot le fou", demande la révision de son procès

Le tueur en série alsacien, Pierre Bodein, condamné à la réclusion criminelle à perpétuité incompressible en 2007 pour trois meurtres, deux viols et deux enlèvements, demande la révision de son procès. Incarcéré dans l'Allier, il continue de nier et affirme disposer d'alibis encore inexploités. 

Agé de 71 ans, Pierre Bodein, condamné pour trois meurtres, deux viols et deux enlèvements demande une révision de son procès. Dossier déposé vendredi 22 mars. Son avocat dénombre une quinzaine d'alibis qui " restent à exploiter". Du côté des familles des victimes, c'est la consternation. 

Rappel des faits: à l'été 2004, Jeanne-Marie Kegelin, 10 ans, Julie Scharsch, 14 ans et Hedwige Vallée, 38 ans, disparaissent toutes en quelques jours. Elles sont retrouvées à Valff, Nothalten et Hindisheim (Bas-Rhin) dans des ruisseaux, leurs corps dénudés, mutilés. Les deux plus jeunes ont été violées. L'enquête mène rapidement à un homme venant de sortir de prison: Pierre Bodein, déjà connu sous le nom de "Pierrot le fou"

Un surnom qu'il doit à une folle cavale en 1992. Échappé du centre hospitalier spécialisé d'Erstein (Bas-Rhin), il profite de ces trois jours de liberté pour prendre deux femmes en otage, avant de séquestrer et de violer l'une d'elles, braquer une banque et une armurerie, forcer plusieurs barrages de gendarmerie, et tirer sur deux policiers. En 1996, pour ces faits, il est condamné à vingt ans de réclusion, puis mis en liberté conditionnelle en mars 2004. Au moment de son arrestation, le 30 juin 2004, Pierre Bodein a donc déjà passé la moitié de sa vie en prison et en hôpital psychiatrique.
 


Un énième recours

En 2007, Pierre Bodein est le premier détenu en France à être condamné à la perpétuité réelle (viendront ensuite Michel Fourniret en mai 2008 et  Nicolas Blondiau en janvier 2015). Il a été reconnu coupable de trois meurtres, deux viols et deux enlèvements. A ses côtés, seize co-accusés: des vanniers soupçonnés dans l'affaire Jeanne-Marie qui seront finalement acquittés.
 
Rejugé en appel devant les assises de Colmar, il est condamné le 2 octobre 2008 à la même peine. Le 21 janvier 2010, son pourvoi en cassation est rejeté par la Cour de cassation. Sa condamnation devient définitive. En  2014, Pierre Bodein saisit la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) sous motif que la réclusion à perpétuité incompressible constitue "un traitement inhumain et dégradant" (article 3 de la convention européenne des droits de l'homme). La CEDH  lui donnera finalement tort.
 

" Si je n'y croyais pas, je ne le ferais pas"

Aujourd'hui âgé de 71 ans, c'est vers la cour de révision et de réexamen que se tourne Pierre Bodein. Il motive sa demande par des éléments nouveaux susceptibles de "faire naître un doute sur sa culpabilité". En effet, "Pierrot le fou" a reconstitué son emploi du temps avec force détails. Ainsi pour les 18 juin et 25 juin 2004, dates correspondant à l'enlèvement de Jeanne-Marie Kegelin puis de Julie Scharsch, Pierre Bodein affirme avoir pêché, mangé au fast-food ou encore s'être rendu dans un magasin d'électroménager.

Mieux encore, arrêté par les gendarmes, il aurait passé, d'après son avocat Dominique Bergmann, la nuit du 26 en garde à vue. Au total, l'avocat dénombre une quinzaine d'alibis qui "restent à exploiter" sans compter les preuves ADN trouvées dans son véhicule "resté ouvert à quatre vents" et dont "la légalité est douteuse".
 
Dominique Bergmann poursuit: "Si je n'y croyais pas, je ne le ferais pas. Les éléments dont je dispose me permettent et même m'imposent de faire le nécessaire maintenant. Mon client ne veut pas mourir en prison et il souhaite surtout réhabiliter son nom et celui de sa famille. Il dit qu'il est effectivement un braconnier, un braqueur par nécessité, mais qu'il n'est pas concerné par ce type d'infractions."

Mon client ne veut pas mourir en prison
- Dominique Bergmann, avocat de Pierre Bodein-


Il vient d'adresser sa requête à la commission d'instruction des demandes et espère une décision avant la fin de l'année 2019.
 

Une fantasmagorie 

Du côté des familles des victimes, c'est la consternation. Thierry Moser, avocat des parents de Julie Scharch en 2007, ne cache pas son indignation. Devant la volonté de Pierre Bodein de faire réviser son procès, il s'énerve: "C'est une haute fantaisie. Il s'imagine qu'il a trouvé un alibi irréfutable, c'est de la fantasmagorie. C'est se moquer du monde. Toujours la théorie du complot qui fait florès mais qui est totalement inconsistante et révoltante pour les malheurs des victimes et de leur famille." 

Je trouve que jouer comme ça avec les nerfs des gens, c'est ignoble, c'est abject
-Thierry Moser, avocat des parties civiles-


" Ça fait perdre du temps à la justice qui a, me semble-t-il, d'autres chats à fouetter et ça ravive les blessures, les souffrances et le désarroi des familles des victimes. Je trouve que jouer comme ça avec les nerfs des gens, c'est ignoble, c'est abject et je me sens en colère. Je ne l'accepte pas."
  
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