L'Université de Strasbourg a décidé de mettre en place des droits d'inscription différenciés pour ses étudiants extracommunautaires à partir du lundi 9 décembre 2024. Une augmentation jugée discriminatoire par les étudiants qui doivent se rassembler à 13h, ce mardi 10 décembre sur le campus Esplanade.
C'est une très mauvaise surprise dont ils auraient bien voulu se passer. Près de 500 étudiants et étudiantes de l'Université de Strasbourg ont découvert que leur inscription allait leur coûter seize fois plus cher que prévu.
À partir de ce lundi 9 décembre 2024, l'administration universitaire a mis en place des droits différenciés pour les étudiants "extracommunautaires". Cela concerne toute personne inscrite en second cycle et ne venant pas de l'Union Européenne, ni de l'Espace économique européen, de la Confédération suisse, de la principauté de l'Andorre, de la principauté de Monaco, ni de la province du Québec.
La note est salée et elle ne passe décidément pas auprès d'Imane El Bab, étudiante marocaine inscrite en première année de Master. Dans quelques heures, son compte en banque doit être débité de 3 879 € au lieu de... 250 €.
"Sur la plateforme de mon master il y a inscrit frais d'inscription 250 euros, il n'y a pas écrit que pour les étudiants extracommunautaires les frais c'est 4 000 euros ou je ne sais pas quoi... S’il y avait écrit ça, je ne me serais pas inscrite en fait", s'agace la jeune femme.
"Bienvenue en France"
Cette différenciation est aussi perçue comme une injustice par Boris Diallo Ibrahima, étudiant Guinéen en première année de Master. Comme la majorité des étudiants en cette rentrée 2024, son budget est serré et il ne peut pas se permettre un tel écart avec ce qui était prévu.
Comment tu peux demander à un étudiant qui a gagné 6 000 euros de payer 4 000 euros ?
Boris Diallo Ibrahimaétudiant guinéen à l'Unistra
Le jeune homme étudie en France depuis déjà deux ans et serait resté à Besançon s'il avait su que les frais d'université dans le Bas-Rhin avaient augmenté.
"Sur mon avis d'imposition de l'année dernière il y a marqué que je n'ai gagné que 6000 et quelques euros, donc comment tu peux demander à un étudiant qui a gagné 6000 euros de payer 4000 euros ? Comment il va vivre ? Il y a le loyer, le transport, la nourriture et d'autres choses…", s'inquiète Boris Diallo Ibrahima, déjà stressé par les examens qu'il doit bientôt passer.
Cette mesure controversée n'est pas réservée au Grand Est, elle est applicable depuis 2019 sur tout le territoire français et fait partie d'un programme appelé "Bienvenue en France", censé attirer davantage d'étudiants étrangers en France. À l'annonce de cette mesure, de nombreuses universités avaient décidé de ne pas l'appliquer, car elle n'est pas obligatoire.
Selon un classement de l'agence de presse spécialisée AEF Info, seulement 13 universités appliquent les frais majorés à tous les étudiants extracommunautaires sans possibilité d'exonération partielle ou totale.
Jusqu'à présent, les étudiants strasbourgeois étaient dispensés des droits majorés. "Cela avait été possible car le plafond des 10% d’exonération n’avait pas été franchi, ce qui n’est désormais plus le cas", expliquait l'Université dans un communiqué publié en septembre 2023.
"C'est comme un guet-apens"
Le retournement de situation est inacceptable pour le syndicat Alternative Etudiante Strasbourg, qui a lancé un appel à témoignage sur le sujet.
"Au moins on demande qu’il n'y ait aucun prélèvement qui soit fait jusqu'à ce que l'université puisse éclaircir la situation et organiser un vrai plan d'exonération pour tout le monde pour au moins cette année-là", s'insurge Rayyân Slimani, membre du syndicat.
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Le jeune homme regrette une mauvaise communication de l'Université, qui n'aurait pas prévenu les personnes concernées par la mesure avant leur arrivée à la faculté. "Non seulement nous, on est fondamentalement contre ces frais différenciés là, mais en plus on est dans une situation où pour nous c'est comme un guet-apens", s'étrangle-t-il.
L'Université de Strasbourg s'est défendue de son côté, affirmant par mail que "l’information sur les montants des droits d’inscription figurait sur la partie candidature de la plateforme MonMaster par renvoi sur les pages de l’université ainsi que sur la plateforme de candidature Etudes en France".
En attendant un geste de la part de l'administration, les étudiants extracommunautaires manifesteront à 13h, ce mardi 10 décembre 2024, sur le campus Esplanade devant le bâtiment du Patio.