Placé depuis son plus jeune âge dans un foyer, Christian Haag a décidé de témoigner de son enfance et de son parcours dans un second livre. Il évoque ce qu'il a vécu mais aussi sa pratique du métier d'éducateur spécialisé.
"Sans l'Aide sociale à l'enfance, je ne m'en serais pas sorti", témoigne le trentenaire strasbourgeois Christian Haag. Celui qui a été placé de ses 0 à 18 ans a décidé d'écrire un second livre pour raconter son parcours, "la vie quotidienne en foyer en tant qu'enfant, ce que j'ai vécu, mais aussi parler de comment mieux s'occuper des enfants."
Il exerce depuis bientôt 20 ans, le métier d'éducateur spécialisé, une orientation qui est directement liée à son histoire personnelle. Son livre : Dans les sillons du quotidien, publié par la maison d'édition Nombre 7 fait une centaine de pages. Ce n'est pas son premier écrit, en 2019 déjà, il sortait Le murmure des démons, dans lequel il revenait sur son mal-être d'enfant placé et sur les souffrances qui peuvent en découler.
"Ce n'est pas l'enfer qu'on imagine"
Dans ce dernier ouvrage, il s'agit pour lui de "partager plein d'espoir aux enfants qui passent par ce par quoi je suis passé". Mais aussi d'apporter un regard plus positif sur l'Aide sociale à l'enfance (ASE). Il complète : " ce n'est pas l'enfer qu'on imagine. Ce service est toujours décrit avec une image très négative par les médias, des reportages terribles... J'ai envie de faire contrepoids."
Celui qui alterne jusqu'à sa majorité entre foyer et familles d'accueil, explique avoir été " nourri, logé, accompagné et aidé psychologiquement par des thérapeutes, avoir reçu de l'affection des travailleurs sociaux."
Si sur sa route il ne croise que des "bons professionnels", la vie en foyer n'en reste pas moins compliquée par moments... "La masse, le bruit, la vie en groupe pendant longtemps," c'est ce qui a été le plus difficile pour lui.
Un enfant tout seul, il a besoin d’amour, c’est ça qui m’a sauvé.
Chritian HaagEducateur spécialisé et auteur
Un métier "tellement beau"
Lorsqu'il atteint l'âge de 18 ans, il demande à effectuer un contrat jeune majeur. Un dispositif qui lui permet de rester en lien avec l'ASE. Il s’engage dans une formation et reçoit en échange une allocation tous les mois et continue à voir un éducateur. Il effectue ses études à Nancy, dans l'Institut régional du travail et commence le métier d'éducateur quelques années plus tard, à 21 ans.
Aucune journée ne se ressemble, on travaille avec des humains, la matière la plus complexe qui existe. Rien n'est prévisible, il faut trouver des solutions et se remettre en question sans arrêt.
Christian HaagÉducateur spécialisé et auteur
Cette vocation est intimement liée à son vécu : "Quand j’étais en foyer, et que je voyais mes éducs faire ce métier, je me disais : c’est tellement beau ce métier, je veux faire pareil". Il travaille aujourd'hui dans un foyer d'accueil d'urgence à Strasbourg, avec un jeune public.
Ses missions : " accueillir, observer l’enfant et l'orienter au mieux. Mais, dans le quotidien, on fait comme dans n’importe quelle famille : on nourrit, on loge, on fait des loisirs, on sort, on lit des histoires pour dire bonne nuit… Au quotidien, on essaye de leur donner la vie la plus normale possible."
Dans Les Sillons du quotidien, il évoque sa pratique du métier et liste des points et idées qui selon lui peuvent améliorer le quotidien des enfants placés. Il y parle de la place de l'éducateur, de l'affection décrié que ce dernier doit apporter ou pas aux jeunes, de la place de l'humour dans les échanges, " ça peut désamorcer plein de situations", atteste-t-il.
"J'aborde aussi la question de la sanction et de l'autorité, hurler n'est pas une solution pour moi ni la punition systématique. Il y a des milliards d'autres manières de répondre quand l'enfant fait une bêtise", assure-t-il. Christian Haag insiste aussi sur deux points qui l'ont particulièrement concerné quand il était jeune placé : une plus grande implication des jeunes dans le foyer et enfin une meilleure prise en charge des groupes dans le but de rendre "la vie en collectif moins lourde".
Comme à la fin de son premier livre, il prodigue aussi quelques petits conseils aux enfants placés qui le feuillettent, des personnes-ressources, des messages positifs...