Au lendemain de la censure du gouvernement Barnier votée par l'Assemblée nationale mercredi 4 décembre, le ministre de l'Enseignement supérieur démissionnaire, Patrick Hertzel, est revenu pour France 3 Alsace sur cette actualité exceptionnelle.
75 jours après être entré au gouvernement de Michel Barnier, en tant que ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, Patrick Hetzel est déjà sur le départ. L'ancien député (LR) du Bas-Rhin quittera très prochainement son poste après la motion de censure votée le 4 décembre 2024 par les députés du Nouveau Front populaire (NFP) et du Rassemblement national (RN).
Après deux mois et quatorze jours, le voici démissionnaire, comme l'ensemble du gouvernement Barnier. Pour France 3 Alsace, il a donné sa réaction à la motion de censure et s'est livré sur les conséquences qu'elle pourrait engendrer.
Comment avez-vous reçu le vote de la motion de censure, après un petit peu plus de deux mois en poste ?
"Je considère que cette motion de censure est un immense gâchis. Et je note que ça a réveillé le côté détestable de la politique, à mon sens. Parce que les décisions qui ont été prises par celles et ceux qui ont voté n'ont rien à voir avec la France et l'intérêt de nos concitoyens."
Nous sommes repartis dans une période incertaine
Patrick HetzelMinistre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche démissionnaire
"Ce qui m'a frappé, c'est que, alors que nous étions en quelque sorte des forces de construction il y a deux mois et demi, ce sont les forces de destruction du pays qui l'ont emporté. Avec de surcroît, une alliance improbable entre les deux extrêmes qui se sont nourris et qui ont complètement oublié qu'il y avait des enjeux importants, qui étaient ceux de permettre à notre pays d'assurer sa stabilité. Là, nous sommes repartis dans une période incertaine."
Est-ce qu'il existe un sentiment de frustration pour vous ?
"Pas de frustration, parce que la vie politique est faite d'éléments perturbateurs. Par contre, il y a un véritable goût d'inachevé. J'ai eu l'occasion de présenter ma feuille de route avec un certain nombre de choses que je souhaitais pouvoir mettre en œuvre pour notre enseignement supérieur et notre recherche. Mais aussi pour l'insertion professionnelle des étudiants, pour faire en sorte que la France puisse assurer davantage d'innovation, faire ce lien entre les recherches publique et privée..."
Ce sont aussi des leçons d'humilité
Patrick Hetzel
Tout cela va s'arrêter. Parce que qui dit changement de ministre dit redémarrage de l'ensemble de ces chantiers à zéro. Après, il y a parfois des choses qui nous dépassent. Ce sont aussi des leçons d'humilité, il faut les entendre."
Y a-t-il un avenir pour les travaux que vous avez entrepris ?
"Fort heureusement, un certain nombre de travaux qui ont été engagés vont pouvoir se poursuivre. C'est-à-dire que les missions sont confiées par le ministère et il y a une continuité de l'État. Ce qui ne peut pas être effectué aujourd'hui, ce sont des décisions de nature politique. Néanmoins, la gestion courante sera assurée par notre administration. Sinon, cela serait pire encore."
La France et les Français ont été oubliés dans cette décision. https://t.co/DqCfPj1362
— Patrick Hetzel (@patrickhetzel) December 4, 2024
À titre personnel, pensez-vous avoir un avenir ministériel possible ?
"L'avenir personnel m'importe peu. Je suis avant tout attaché à ce que notre pays connaisse de la stabilité. C'est ça le plus important. J'ai les yeux rivés vers ce qui peut arriver au secteur ministériel qui est le mien. Ma petite condition importe peu.
C'est ce qu'a d'ailleurs montré Michel Barnier. Il n'avait pas d'ambition personnelle, mais une ambition pour son pays. Et très modestement, j'ai envie de dire la même chose."
Comment vont se passer les prochaines heures et les prochains jours pour vous ? (L'entretien a été réalisé le 5 décembre en fin de matinée, ndlr.)
"Pour l'heure, je reste au ministère parce qu'il y a un certain nombre de rendez-vous qui se poursuivent. Puis ce sera soit la préparation de la transmission des dossiers ou alors, il faudra assurer la continuité, le temps qu'un ministre soit nommé ici."
Est-ce que vous étiez préparé à l'aspect éphémère de votre mission ? On savait le gouvernement quelque peu fragile...
"Très honnêtement, quand on savait qu'aucun groupe ne disposait d'une majorité à l'Assemblée, on savait qu'il y avait un risque de caractère éphémère. Néanmoins, je ne m'attendais pas à ce que ça arrive aussi rapidement. On voit bien que c'est totalement irrationnel.
Basculer le pays du jour au lendemain dans cette instabilité, c'est tout sauf une décision qui assure la souveraineté de notre pays. Je suis quand même surpris que des petits intérêts personnels puissent à tel point l'emporter sur l'intérêt général."