Vous l'aurez remarqué, les prix à la pompe s'envolent. Phénomène inédit, celui du Diesel dépasse désormais celui de l'essence. C'est le cas dans 60% des stations alsaciennes. En cause : une nouvelle hausse des taxes sur le carburant. Partout la grogne s'installe et s'organise. En Alsace aussi.
"C'est simple, moi, quand je vais faire le plein, j'ai une crise cardiaque." Pour David Steinbrecher, ingénieur aéronautique, aller à la pompe c'est désormais revenir sur terre un peu trop violemment. Et il est loin d'être le seul. Du coup (de massue ou de pompe comme vous préférez), il a décidé d'organiser la fronde en Alsace. Explications.Une belle flambée pour l'hiver
Selon les derniers chiffres communiqués par le ministère de la Transition écologique, les prix des carburants augmentent et ce, malgré l'accalmie constatée cet été.En l'espace d'un an, les tarifs des carburants ont ainsi flambé de 23% pour le diesel (1,53 euros le litre) et de 14% (1,57 euros le litre) pour l'essence. Phénomène inédit, le diesel n'est plus une bonne affaire. Conséquence de la volonté gouvernementale de vouloir aligner les prix de l'un sur les prix des autres. Merci les taxes. La TICPE (taxe intéreiure de consommation sur les produits énergétiques) et la TVA (taxe sur la valeur ajoutée) représentant, excusez du peu, 60% du prix que vous payez à la pompe. Une bonne nouvelle n'arrivant jamais seule, ces taxes devraient continuer à augmenter d'ici 2022. Le gouvernement persiste, signe, assomme et assume, c'est Muriel Pénicaud, notre ministre du Travail, qui le dit.
Celui qui assume beaucoup beaucoup moins, c'est le consommateur. Logique. Surtout celui qui roule encore au diesel comme 80% des automobilistes français. Information de taille, de très grosse taille, en France la taxation des automobilistes rapporte déjà 67 milliards d'euros annuel à l'Etat dont 36 milliards rien que pour le carburant. "Le contribuable français est très généreux", résume Céline Kastner de l'Automobile Club de Strasbourg.
L'Alsace voit rouge ...
Si le phénomène est national, certaines régions sont plus touchées que d'autres. L'Alsace et l'Ile-de-France en premier lieu. En clair, toujours selon les chiffres du ministère de la Transition, dans près de 60% des stations service alsaciennes, le diesel est plus cher que l'essence. Soit trois fois plus que la moyenne nationale. Un record. Mieux : un tour de magie.Historique : le #diesel est plus cher que l’essence ! >> https://t.co/VesnZpyuLg #carburants pic.twitter.com/V2akIJVrGp
— Le Parisien Infog (@LeParisienInfog) 15 octobre 2018
Car les raisons de cette particularité particulièrement gênante restent mystérieuses. Même la directrice juridique de l'automobile club de Strasbourg, Céline Kastner, a bien du mal à s'y retrouver. "Ce phénomène ne s'explique pas par le jeu des taxes puisqu'il n'y a pas de marge de manoeuvre là-dessus. Non. C'est à cause du produit. En fait, il n'y a pas d'explications mathématiques ni rationnelles." Nous n'en saurons pas plus.
... rouge colère
C'est dans ce contexte donc que la grogne s'amplifie. S'amplifie et s'organise. Du côté de l'automobile club de Strasbourg plutôt gentiment. "Contre cette taxation exorbitante, ce délire fiscal, nous montons des dossiers." Oulala. "Nous faisons un travail de fond. Nous recueillons des témoignages, des chiffres, proposons des alternatives comme des politiques incitatives pour renouveler le parc automobile français vieux de neuf ans. Nous mettons l'accent aussi sur les formations d'éco-conduite. Et nous envoyons ça aux députés, sénateurs, au gouvernement. Forts de nos 1,4 million d'adhérents." Du lobbying quoi.Sur le web ça s'agite davantage. Plusieurs pétitions fleurissent. 65.000 signatures pour celle de Sophie, 24.000 pour Jean-Marc qui rencontrent un joli succès. Sans compter les traditionnels tweets incendiaires...
...ou opportunistes.Surtaxes #carburant :
— Rowlf (@Rowlfg) 23 octobre 2018
Benjamin #Griveaux mériterait de recevoir un coup de fouet pour chaque % d'augmentation de la taxe punitive qu'il impose aux pauvres sous le faux prétexte d'une croyance réchauffiste.
⛽️ Face à l’acharnement fiscal du @gouvernementFR sur les automobilistes, avec @laurentwauquiez et @lesRepublicains nous proposons :
— Annie Genevard (@AnnieGenevard) 23 octobre 2018
▶️ Zéro augmentation de taxe
▶️ Création de tickets-carburant
▶️ Une écologie incitative plutôt que punitivehttps://t.co/YVaNrmDLWf
Bref, tout ça pour en revenir à David Steinbrecher (remontez au tout début, svp). Lui a décidé de prendre le volant par les cornes. Ce Haut-Rhinois de la vallée de Masevaux a en ras le réservoir; il a décidé de passer à la vitesse supérieure. "Je fais 120 kilomètres par jour pour me rendre au boulot [73 % des salariés quittent leur commune de résidence pour aller travailler, ndlr]. J'en ai pour 400 euros de diesel par mois. C'est plus possible. Tout augmente. La vie est de plus en plus dure. Il fallait faire quelque chose."
Et ce quelque chose, c'est une opération blocage le 17 novembre. Un mouvement national que David organise en Alsace. Avec tous les moyens du bord.
L'événement a été créé sur Facebook lundi 22 octobre et recueille déjà 2.400 participants. Pour le moment les modalités d'action sont encore un peu floues quoique très démocratiques. Les lieux stratégiques, les ralliements possibles, les offensives. Tout est soumis au vote. Histoire de dénombrer les troupes, d'évaluer leurs velléités avant de passer à l'action. Et de pas avoir l'air de bidasses en vadrouille.
"Nous nous laissons une semaine avant de clôturer les vote. On fait un peu ça par tâtonnements, mais bon c'est bluffant de voir que les gens se mobilisent déjà aussi massivement et rapidement. Maintenant il faut s'organiser. " Et ce n'est que le début. "Alsace blocage national contre la hausse des prix du carburant" (c'est long mais c'est comme ça) compte désormais contacter les associations de motards, les Uber, les taxis. "Sans le soutien d'une association, on sera dans l'illégalité si on bloque les routes. Mais il faut savoir prendre des risques."
En 1789, y avait pas de réseaux sociaux et ils ont quand même fait la Révolution. Chapeau.
Et David de rêver de grand soir. "C'est un premier pas. Si on est suivi, on va continuer ce qui semble probable vu que le gouvernement ne recule devant rien. Il faut que ça bouge, c'est pas possible autrement. Il faut frapper plus fort. Mais il faut bien commencer par quelque chose. Et si y a personne, le grand soir on peut s'asseoir dessus. Advienne que pourra." Bref, la journée du 17 novembre sera un sacré test. Un crash test.