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INSOLITE. Un Orient-Express vieux d'un siècle dans un état de conservation remarquable : "dans ce train, tout est démesuré"

Sylvain Vernerey, directeur général de la Cité du train de Mulhouse, à bord de l'Orient-Express.

La Cité du train de Mulhouse dans le Haut-Rhin, le plus grand musée ferroviaire d'Europe, possède dans sa collection trois voitures originales de l'Orient-Express. Son équipement est authentique. Un véritable trésor du patrimoine qui rappelle que la première étape du train en 1883 fut Strasbourg.

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"Elles sont dans un état impeccable et entretenues tous les jours. Regardez comme elles brillent ! Cela nous demande beaucoup de travail et d'attention", s’émerveille Sylvain Vernerey, le directeur général de la Cité du train de Mulhouse (Haut-Rhin), le plus grand musée d’Europe dédié au train. 60 000 m² d’exposition.

Trois voitures de l’Orient-Express sont présentées. "Elles sont arrivées par les rails, elles pourraient reprendre le service dès demain". Elles datent des années 1920 : une voiture-restaurant dans laquelle était servie des repas dignes des plus grands palaces ; une voiture lits avec des petits compartiments privatisés aménagés en configuration jour en banquette puis, le soir pendant que les voyageurs dînaient, en couchette ; et une voiture Pullman pour servir le thé ou lire le journal.

"Les voitures sont accessibles au public via une rampe extérieure, précise Sylvain Vernerey. Mais évidemment, pour des raisons de préservation du patrimoine, il est impossible que les visiteurs accèdent à bord. C’est une faveur et un privilège que l’on vous fait. Un voyage de rêve !".

Sur les quais de la Cité du train de Mulhouse, l'Orient-Express des années 1920 est "prêt à partir". © Éric Vial, France Télévisions

Toutes les voitures présentées appartiennent à la société Orient-Express. Elles sont mises à disposition à la Cité du train pour faire perdurer le mythe. L’ensemble de l’armement, c’est-à-dire les équipements, est estampillé Compagnie des wagons-lits. Il ne s’agit que d’originaux. "Ici tout est authentique !", indique Sylvain. Pour le visiteur, la magie opère immédiatement.

Chaque voiture de l’Orient-Express est unique. La marqueterie, les luminaires, l’argenterie, "la décoration était confiée à des maîtres artisans", comme Charles Spindler ou René Lalique.

Et si l’Europe avait commencé grâce à l’Orient-Express ?

C’est le 4 octobre 1883 : l’Orient-Express, "le roi des trains et le train des rois", entame son voyage inaugural depuis la gare de l’Est à Paris. Une vingtaine de passagers fortunés, de diplomates et journalistes font partie du premier voyage. Ils vont ouvrir la voie, dans une Europe encore dangereuse, à un train de légende qui deviendra mythique, une véritable expédition des temps modernes. Première étape : Strasbourg, alors dans l'Empire allemand.

L'Orient Express : le roi des trains et le train des rois

Sylvain Vernerey

Directeur général de la Cité du train de Mulhouse (68)

C’est après un long voyage aux États-Unis que l’ingénieur belge Georges Nagelmackers a une idée. Relier l’Europe d’est en ouest sans contrainte, avec confort, exactement comme en Amérique. À l’époque, les voyages internationaux sont dangereux. Les premiers voyageurs de l'Orient-Express sont d’ailleurs armés d'un pistolet. Le passage des frontières est un casse-tête administratif long et fastidieux.

Sylvain Vernerey, le directeur général de la Cité du train de Mulhouse, dans une voiture de l'Orient-Express des années 1920. © Éric Vial, France Télévisions

"Georges Nagelmackers répondait à une attente d’une clientèle richissime qui empruntait ces trains de croisière. Ils pouvaient aller jusqu’en Chine, explique Sylvain Vernerey, le directeur de la Cité du train de Mulhouse (Haut-Rhin). Il faut bien s’imaginer que dans ce train tout est démesuré. Le personnel très nombreux sert en livrée. Les plus grands chefs de cuisine participent au voyage. Les sanitaires sont indépendants. Les grands de ce monde voulaient se retrouver exactement comme s’ils étaient chez eux, avec le même confort".

Pour la première fois en Europe, la Compagnie internationale des wagons-lits (CIWL) va proposer de rejoindre Paris à Constantinople (aujourd'hui Istanbul) dans de somptueux wagons et avec les prestations d’un palace. Toutes les formalités aux frontières sont abolies. Les voyageurs présentent leurs papiers au départ et n’ont plus à s’occuper de rien : une révolution pour l’époque, un véritable privilège.

Le train est composé d’une puissante locomotive à vapeur, de trois voitures passagers, deux wagons-lits, et d’une voiture à bagages. Les voitures luxueuses sont construites en teck. Elles sont chauffées à la vapeur et éclairées par des lampes à gaz. "On va toujours trouver trois types de voitures dans ces trains : une voiture lounge pour se délasser durant le voyage, une voiture-restaurant et une voiture-lits", explique le directeur général de la Cité du train.

L’Orient-Express arrive dans l’Empire allemand

Premier passage de frontière sans difficulté en la gare de Deutsch-Avricourt, aujourd’hui Nouvel-Avricourt, (Moselle) dans l’Empire allemand. Le train effectue juste une halte dans l'immense gare frontière de 100 mètres de long (abandonnée depuis 1969).

Le train arrive peu après à Strasbourg (Bas-Rhin), capitale du Reichsland Alsace-Lorraine. C’est un évènement. La gare vient juste d’être inaugurée. C’est le premier bâtiment de la ville entièrement électrifié et éclairé. La carte du premier dîner est en français et en allemand : foie gras d’Alsace, soufflés, caviar, fromages…

Carte postale de l'Orient Express arrivant aux abords de Constantinople © Wikimedia Commons

Les écrivains et journalistes qui participent à ce voyage vont relater dans les journaux de l’époque leur formidable aventure et la profusion de luxe : "des draps changés tous les jours, une eau cristalline, des serviettes parfaitement blanches, et un champagne exceptionnel". Le monde entier suit leur parcours.

Après Strasbourg, le train prend la direction de Giogiu en Roumanie. De là, les passagers traversent le Danube en ferry, embarquent dans un autre train, avant de voguer sur la mer Noire. Ils arrivent à Constantinople le 16 octobre 1883, après plus de 81 heures et trente minutes : un record. "Avec une très légère fatigue", écrira le journaliste du Figaro.

Il faudra attendre, le 1ᵉʳ juin 1889, pour que l’Orient-Express effectue l’intégralité de son trajet sans quitter le train en 67 heures et 35 minutes.

L’Orient-Express aujourd’hui

L’Orient-Express appartient à la marque Accor. Une version moderne de l'Orient-Express circule en direction de l’Italie pour des destinations romantiques. Les voitures sont luxueuses et confortables. La société a confié à l’architecte Maxime d’Angeac la décoration de ses nouvelles voitures qui devraient circuler en 2026. Dans une vidéo, il délivre sa vision futuriste de l’Orient-Express.

Les salons privés dans la voiture-lounge de l'Orient-Express. Chaque voiture est unique. La décoration était confiée à des maîtres artisans d'art. © Éric Vial, France Télévisions

Le Venise Simplon-Orient-Express de Belmond poursuit lui l’expérience traditionnelle du "roi des trains". Cette société utilise des wagons acquis sans les années 80 pour faire revivre le voyage de luxe comme dans les années 1920. Les itinéraires le conduisent vers plusieurs destinations européennes ainsi que vers sa destination originelle, Istanbul.

Comme à l’époque, les tarifs pour ces voyages de rêve ne sont pas accessibles au commun des mortels à moins de casser une très grosse tirelire. Les prix par personne varient selon les destinations et la compagnie : de 4200 € environ pour un aller simpe pour une courte destination, à 74000 € pour une prestation luxueuse avec suite, jusqu'à Istanbul. 

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