Des "dortoirs" d'étourneaux ont élu domicile à Reims (Marne) avec l'arrivée de l'automne. Ces oiseaux font du bruit et leurs déjections sont incommodantes, mais ils restent très appréciés de la population. Et choyés par la Ligue de protection des oiseaux (LPO) de Champagne-Ardenne.
Une voiture couverte d'un tapis de fientes. Des piaillements à ne plus pouvoir entendre autre chose. Bienvenue à Reims (Marne), ou encore à Troyes (Aube).
Les responsables de ces nuisances sont les étourneaux. Leurs dortoirs se trouvent dans les arbres non élagués, et ils y nichent à foison.
Dans la Cité des sacres, deux secteurs sont particulièrement touchés depuis la tombée de l'automne 2021. Il s'agit des places du Chapitre et du Forum (visibles sur la carte ci-dessous).
Si les nuisances sont là, elles ne semblent pourtant incommoder que peu de monde. Une habitante du quartier Croix-Rouge explique à France 3 Champagne-Ardenne que ces oiseaux "sont bruyants jusqu'à la tombée de la nuit" et que "leurs déjections sont nauséabondes".
Avant qu'elle déménage (elle évite maintenant le secteur lorsqu'elle sort), l'odeur venait jusqu'à chez elle. Ce n'était guère agréable lorsqu'elle ouvrait les fenêtres. Mais sa voiture et son balcon ne servaient pas de litière aux étourneaux : on ne peut pas en dire autant partout. "Ils sont beaux à voir, mais de loin", conclut cette riveraine.
Beaucoup de commentaires positifs sur ces oiseaux sont néanmoins remontés à l'issue d'un appel à témoignage sur les réseaux sociaux. Aurélie salue "leurs murmurations [vol en formation serrée; ndlr], c'est juste magnifique pour quiconque sait ouvrir les yeux". Mais il faut juste "ne pas être en-dessous quand ils passent", s'amuse Amandine.
Jonathan ne voit pas "de nuisances, plutôt de beaux oiseaux". Même "un ballet aérien, c'est magnifique" pour Maryse. Christelle s'enchante "d'entendre les oiseaux". Et "c'est tellement beau à voir les nuées d'étourneaux dans le soleil couchant", énonce Magalie (on ne peut que lui donner raison en regardant la vidéo ci-dessous).
Évidemment, la Ligue de protection des oiseaux (LPO) de Champagne-Ardenne est l'amie de ces étourneaux, et considère "qu'ils ont leur place" en ville (ce sont des espèces endémiques, la situation serait toute autre si elles étaient exotiques). Joint par France 3 Champagne-Ardenne, le chargé de mission Aurélien Deschatres pose la situation. "On ne reçoit pas forcément plus d'appels à ce sujet en ce moment. C'est assez stable d'une année sur l'autre."
"En général, ce sont les municipalités qui nous contactent pour des soucis divers avec les étourneaux, c'est récurent. Ces oiseaux migrateurs viennent d'Europe du nord et de l'est. Ils trouvent de la chaleur en ville, où il fait moins froid qu'à la campagne, et une certaine sécurité par l'absence de prédateurs." Ces oiseaux nichent dans de hauts arbres, mais jettent dorénavant de plus en plus leur dévolu sur des arbustes plus petits.
Pour leur faire quitter le perchoir, c'est un peu difficile. "Il n'y a pas vraiment de solution, sinon le problème serait résolu depuis longtemps. Peu de méthodes d'effarouchement fonctionnent." Il aurait fallu élaguer leurs arbres favoris avant leur arrivée. Mais maintenant qu'ils y sont... Et les éloigner ne fait que brièvement reporter le problème : les oiseaux iront nicher un peu plus loin. Leur présence à Reims devrait se poursuivre jusqu'à l'arrivée du printemps. Avant leur retour à l'automne suivant, souvent dans le même arbre.
Des méthodes à trouver pour Reims
Le service communal d'hygiène et de santé de Reims agit comme il peut. "On a tous les ans des sollicitations à ce sujet, à cause des fientes ou biens des nids dans un jardin..." À Reims, les étourneaux ne sont plus "une espèce occasionnant des dégâts" (on ne parle plus "d'espèces nuisibles") depuis un arrêté ministériel datant du mois de juillet. Ils sont donc seulement chassables (par des chasseurs, ce qui est exclu en plein milieu d'un centre-ville).
La géographie explique aussi que des moyens appropriés soient difficilement mis en oeuvre. Un moyen "efficace dans une commune rurale, comme le tir au pistolet à la tombée de la nuit pour effrayer les oiseaux, ne peut pas être appliqué dans les rues de Reims. Les gens auraient peur, voudraient protéger les oiseaux."
Le recours à un fauconnier, qui lâche des buses pour réguler la population d'étourneaux (qui hivernent de plus en plus à Reims à cause du réchauffement climatique), a aussi été tenté. Mais la méthode demande un peu de temps pour bien se mettre en place. Il est aussi possible "d'élaguer les arbres suffisamment pour qu'ils ne fournissent plus assez de sécurité aux étourneaux", mais ça peut aussi être compliqué en centre-ville, quand les arbres sont patrimoniaux ou classés. La municipalité de Reims cherche donc le moyen le plus adapté. En attendant, les oiseaux se feront entendre (et sentir). Ce qui ne déplaît pas forcément à tout le monde.