Depuis ce jeudi 31 mars, un décret interdit de chauffer ou climatiser les terrasses installées sur la voie publique. Une mesure écologique, impulsée par la Convention citoyenne pour le climat mais qui inquiète les professionnels du secteur.
"C’est la prière de l’homme moderne" s’amuse ce client du restaurant Le Gaulois à Reims, Le Canard Enchaîné dans une main, le café dans l’autre. Pour beaucoup, le café du matin en terrasse est une habitude à laquelle il ne faut surtout pas toucher. Et depuis ce jeudi 31 mars, le café risque d’être un peu plus frais.
Le décret vient d’entrer en vigueur et pourtant l’interdiction prend par surprise les Rémois que nous avons rencontrés. "Vous me l’apprenez. De toute manière, je trouvais que c’était excessivement chauffé. Je vais justement en terrasse pour avoir de la fraîcheur donc c’est plutôt une bonne nouvelle pour moi" poursuit le lecteur matinal. Mais tous ne sont pas du même avis. "Je ne suis pas du tout d’accord. Je suis fumeuse et c’est justement pour cela que je choisis de m’asseoir en terrasse, c’est plus confortable", nous explique une cliente déçue de la nouvelle.
"Sans notre partie chauffée en terrasse, on a une capacité intérieure qui est réduite. Cela pourrait nous faire perdre une bonne centaine de couverts par service sachant qu’on renouvèle en permanence nos tables. Donc, à la journée, on pourrait compter jusqu’à 600 personnes quand même", s’inquiète par avance Audrey Boscolo, la responsable de salle pour le restaurant Le Gaulois.
C’est pas Versailles ici
Le décret concerne toutes les terrasses installées sur la voie publique car jugées trop polluantes. Il n’est désormais plus possible ni de les chauffer ni de les climatiser, que le système soit électrique ou non. La mesure devait entrer en vigueur il y a un an mais avait été repoussée par les députés pour épargner la filière des cafés et des restaurants qui peine à se remettre de deux ans de crise sanitaire. "C’est un coup dur pour la profession, analyse le président des Vitrines de Reims, Vincent Mansencal.
Chauffer une terrasse toute la journée pour vendre un café ou deux demis supplémentaires, ce n’est pas rentable.
Joël Oudin, président de l'UMIH de la Marne
Beaucoup de mes confrères et de mes adhérents ont fait de gros investissements sur la ville pour pouvoir accueillir leurs clients dans les meilleures conditions", souligne le patron du Lion de Belfort. "Il faut quand même reconnaître que c’était un peu une hérésie de chauffer les terrasses", tempère Joël Oudin président de l’Union des Métiers et des Industries de l’Hôtellerie (UMIH) dans la Marne.
Car le décret vise aussi à faire des économies et intervient en pleine flambée des prix du gaz et de l’électricité. "Chauffer une terrasse toute la journée pour vendre un café ou deux demis supplémentaires, ce n’est pas rentable. La seule raison pour laquelle les cafetiers chauffent c’est parce que leurs voisins le font aussi. Donc si plus personne ne chauffe, cela mettra tout le monde d’accord", nous explique Joël Oudin.
Des exceptions
Mais le décret comprend quelques dérogations et certains cas particuliers ne sont pas concernés par l’interdiction. Les terrasses privées (qui ne sont pas sur la voie publique) ou celles qui sont fermées et hermétiques pourront continuer de chauffer ou climatiser leurs extérieurs. "Cela va devenir un casse-tête" s’inquiète le président de l’UMIH qui espère que tout le monde jouera le jeu pour ne pas faire de "jaloux". "Il est évident que nous devrons faire des efforts pour accueillir au mieux nos clients en extérieur. Mais heureusement, le printemps arrive, et nous ne verrons les conséquences que cet hiver ou dès l’automne" conclut le président des Vitrines de Reims.