Le Mobilier national prépare une exposition au printemps 2025, à l'occasion des 200 ans du sacre de Charles X, le dernier roi de France à avoir été couronné à Reims le 29 mai 1825. De nombreuses pièces historiques et éléments de décor de l'époque seront affichés dans la galerie des Gobelins, à Paris.
Il est celui qui a renoué avec la tradition du sacre à Reims. Le 29 mai 1825, Charles-Philippe de France, comte d'Artois, devient Charles X, le 68ème roi de France. Son couronnement en la cathédrale de Reims, marque le retour d'un roi attaché aux valeurs de l'Ancien régime.
Deux siècles plus tard, cet ultime sacre dans la cathédrale des anges sera commémoré du 11 avril au 20 juillet 2025 inclus. C'est le tout nouveau Mobilier national, fondé en 2022, qui sera le support de cette exposition qui mêle 3D et décors reconstitués.
Revivre la cérémonie du sacre, heure par heure
À partir du 11 avril, les visiteurs flâneront dans les allées du Mobilier national, aux Gobelins à Paris, sur près de 800 m2, à travers huit salles, pour comprendre et admirer le sacre de Charles X.
Parmi les grands artisans de ce projet patrimonial, il y a Hélène Cavalié. Au téléphone, la directrice adjointe des collections du Mobilier national paraît très enthousiaste. "On recommande à tous les Rémois de venir !" s'exclame-t-elle. Et pour cause, l'exposition se veut la plus immersive possible. "Elle va d'abord montrer les coulisses des préparatifs du sacre de Charles X (le dernier qui a lieu en la cathédrale de Reims, NDLR), avec par exemple des chevaux harnachés à un carrosse. On ira aussi au Garde-Meuble de la Couronne, qui est assez somptueux".
Le palais du Tau, bien connu des Rémois et actuellement en travaux, sera lui aussi reconstitué grâce à la 3D. "À l’époque, l'architecte François Mazois le rénove complètement pour le couronnement de Charles X. C'est ce que l'on va montrer" explique Hélène Cavalié. L'édifice jouxtant la cathédrale rémoise sera d'ailleurs le lieu du festin post-couronnement.
On va refaire deux arcades de la cathédrale de Reims grâce à des peintures sur toile de l'époque. On va vraiment avoir l'impression d'y être, avec tous les décors, les lustres, etc.
Hélène CavaliéDirectrice adjointe des collections au Mobilier national de Paris
Ensuite, il faudra grimper à l'étage, pour suivre "heure par heure" la cérémonie du sacre, "d'abord dans la salle du trésor", et ensuite dans la cathédrale avec les personnages costumés. "L'idée est de mettre les visiteurs dans l'ambiance avec les costumes d'époque, prêtés par des collectionneurs privés" indique-t-elle.
Dans l'antre de la fausse cathédrale, l'exposition promet une plongée au cœur de l'événement. Il y a deux siècles, c'est Pierre Luc Charles Cicéri, peintre et décorateur en chef de l'Opéra de Paris, qui avait entièrement contribué à magnifier l'édifice. En 2025, son "successeur", Pasquale Mascoli, membre de la Brigade du théâtre de la Reine de Versailles et travaillant pour des décors de films, a mobilisé ses talents. "On va refaire deux arcades de la cathédrale de Reims grâce à des peintures sur toile de l'époque. On va vraiment avoir l'impression d'y être, avec tous les décors, les lustres, etc." détaille Hélène Cavalié.
Un effectif de passionnés, en témoigne la présence de Renaud Serrette, l'historien de l'art, "qui a participé à la reconstitution des dais (ouvrage de bois ou de tissu qui s'étend au-dessus d'un autel, d'une chaire ou d'un lit, NDLR).
Charles X et la volonté de renouer avec la monarchie traditionnelle
Des objets par centaines qu'on ne vous dévoilera pas complètement pour maintenir la surprise. "En tout cas, on fera notre possible pour que vous viviez l'événement comme il y a deux siècles. Par exemple, il sera possible d'acheter des souvenirs comme le faisaient les Rémois et les Parisiens à l'époque après le sacre : des assiettes, des foulards, des tabatières" énumère la directrice adjointe, qui se réjouit de pouvoir attirer "la jeune génération" grâce à une reconstitution interactive.
"La cathédrale ressemblait à un opéra lors des sacres, avec plusieurs tribunes sur deux niveaux" raconte Patrick Demouy.
L'historien de Reims, spécialiste des sacres, en connaît un rayon sur les couronnements. Celui de Charles X revêt un caractère tout particulier. "C'est un sacre qui se fait cinquante ans après celui de son frère, Louis XVI, avec une rupture politique profonde. Charles X est soucieux de renouer avec la substance du sacre traditionnel et ses étapes essentielles : le serment, les onctions, la remise des insignes dont la couronne, et l'intronisation" poursuit-il.
À l’époque, Charles X considère une société qui se métamorphose, à l'aube de la révolution industrielle. "Après son sacre, Charles X est allé visiter un grand bazar du Boulingrin, qui présentait les produits de la manufacture locale", Reims étant à l'époque l'un des épicentres du textile en France.
Charles X est soucieux de renouer avec la substance du sacre traditionnel et ses étapes essentielles : le serment, les onctions, la remise des insignes dont la couronne, et l'intronisation
Patrick DemouyHistorien spécialiste des sacres
Le sacre en lui-même a aussi été repensé. "Il a essayé d'équilibrer en reprenant les codes de l'Ancien régime, mais en l'adaptant à des temps nouveaux. La cérémonie et les prières étaient raccourcies. On voit apparaître aussi un bon nombre de maréchaux d'empire lors du couronnement, mais aussi des députés, des maires, des présidents de conseils généraux, et des magistrats. Bref, la nouvelle France".