Le tennis club de Cormontreuil (Marne) accueille la 17e édition du "Master'U", un championnat universitaire international de tennis. Un moyen de mettre en avant le niveau du tennis universitaire français, mais aussi mondial, où les Etats-Unis évoluent encore dans une autre cour.
Le circuit du tennis universitaire permet-il d'accéder aux circuits professionnels du tennis mondial ? Le circuit WTA pour les femmes d'un côté, l'ATP pour les hommes de l'autre. Il n'y a qu'à regarder les listes des joueurs qui composent les huit sélections nationales présentes à Cormontreuil, près de Reims jusqu'à ce dimanche 1ᵉʳ décembre.
Parmi les joueurs de L'Australie, la Belgique, la Grande-Bretagne, l'Allemagne, l'Irlande, la Suisse et les États-Unis, 30 des 48 joueurs présents, sont déjà inscrits sur les circuits professionnels. Pour ce tournoi universitaire international, le tableau est organisé façon Coupe Davis. En commençant en quart de finale, chaque tour se compose de huit matchs. Deux simples dames et messieurs, un double dames, un double messieurs et un double mixte, potentiellement décisif en cas d'égalité. La première équipe à quatre victoires passe au tour suivant.
Quelle place occupe le sport universitaire en France ?
En France, le sport universitaire est peu mis à l'honneur et assez méconnu du grand public. "Le sport universitaire peut-être vu comme du sport fun, du plaisir, seulement pour s'amuser. Alors que la pratique sportive universitaire de compétition existe [...] Il y a une pratique de compétition de haut niveau faite par des sélections", assure Laurent Duclos, le directeur Grand-Est du sport universitaire, au site de Reims.
Une vision qui rejoint évidemment celle du sport à l'école dans sa globalité. Le nombre d'heures d'activité physique reste supérieur à nos voisins européens, mais la pratique d'une activité sportive régulière reste plutôt faible. Avant les JO de Paris, Emmanuel Macron avait déclaré la pratique du sport comme grande cause nationale pour l'année 2024, pour que la France devienne "une nation sportive".
Mais la vérité, d'après JO, c'est que la généralisation de deux heures de sport supplémentaires par semaine dans tous les établissements scolaires, a tout simplement été abandonnée par le gouvernement. Ne manquant pas de faire réagir certains médaillés olympiques comme Léon Marchand sur X (ex-Twitter).
— Léon (@leon_marchand) November 14, 2024
I have a dream
Aux États-Unis, le sport est lui central dans l'éducation et le parcours scolaire. Là-bas, le sport n'est pas associatif comme en France, mais directement intégré dans la scolarité américaine. Les universités américaines ont d'ailleurs contribué à la formation de plusieurs joueurs du top 100 mondial de tennis, comme Ben Shelton (21ᵉ mondial), John Isner désormais à la retraite, Cameron Norrie (49ᵉ) et surtout Danielle Collins (11ᵉ joueuse mondiale).
Au vu de ce succès, certains Français n'hésitent pas à traverser l'Atlantique pour concilier études et sport de très haut niveau. C'est par exemple le cas d'Arthur Rinderknech, actuel 59ᵉ joueur mondial. Marie Mattel a aussi choisi cette voie pendant quatre ans. "C'est le sport avant les cours aux États-Unis. Même si tu rates les cours, les profs te les envoient. Tout est en ligne alors qu'en France, les profs estiment que tu n'as pas le droit d'avoir le cours, si tu n'y as pas assisté", explique t-elle.
En France, on ne se dit pas, tiens, je vais suivre le Master'U alors qu'aux Etats-Unis, ils en entendent parler parce que la communication est plus importante. L'aspect financier est aussi complètement différent. Je suis partie avec une bourse à 100%, limite ils me payaient pour jouer ! Ça n'aurait pas été possible en France.
Marie Mattel, joueuse de tennis.
Elle retient énormément de positif de son aventure américaine. Outre l'apprentissage d'une nouvelle langue et de nouvelles cultures, entourée de plein d'étudiants étrangers, elle partage aussi ses progrès dans le tennis. "Là-bas, si tu ne donnes pas à fond à tous les entraînements, tout le monde court, c'est un peu la punition collective", ironise-t-elle tout sourire. "C'est super, tu apprends beaucoup sur toi-même. Aller aux États-Unis est une manière de mieux appréhender le circuit professionnel", poursuit celle qui a commencé les tournois de double sur le circuit professionnel cette année.
70% des joueurs inscrits sont dans des universités américaines
Parmi les joueuses inscrites au Master'U, certaines sont même proches du top 100, comme les Australiennes Maya Joint (118ᵉ joueuse mondiale) et Petra Hule (289ᵉ), ou l'Américaine Mary Stoina (312ᵉ), évidemment inscrite dans une université américaine. "C''est un très bon moyen d'améliorer son jeu avant d'aller jouer en professionnel. J'ai eu accès à toutes les ressources possibles dans mon université américaine. Je suis vraiment reconnaissante d'avoir pris ce chemin".
Je peux même jouer dans des tournois professionnels pendant mon séjour là-bas. J'ai acquis toute l'expérience que je pouvais demander.
Mary Stoaina, membre de l'équipe de tennis universitaire américaine de tennis.
En France, le sport universitaire ne veut pas copier celui des États-Unis, mais aspire tout de même à rendre le sport plus important. "On souhaite proposer à des joueurs de tennis de haut niveau, dans un milieu où les places sont chères et où les jeunes peuvent arrêter leurs études très tôt s'ils sont sur le circuit pro, une alternative en mettant en avant un double projet. De montrer que l'on peut faire du tennis de bon, voire de très haut niveau, en continuant ses études", explique Damien Bardot, le directeur de la communication de la Fédération française de sport universitaire.
Renforcer la place du sport dans sa globalité
Selon lui, ce que la France pourrait envier ou ambitionner par rapport à ce qu'il se passe aux États-Unis, c'est "avoir plus d'infrastructures sportives sur les campus, plus d'heures de sport. On est encore loin de ce que l'on pourrait faire, même si les lignes bougent et que les JO ont permis d'en bouger. C'est très culturel, on doit se demander comment le sport peut occuper une place centrale dans le système éducatif français, de la petite école maternelle à l'université", poursuit-il.
La route est donc, encore longue. Le Master'U se poursuit jusqu'au dimanche 1ᵉʳ décembre au club de tennis de Cormontreuil où l'équipe de France pourrait croiser la route des États-Unis dès les demi-finales, ce samedi 30 novembre.