"Il était légitime de s'abstenir de censurer" selon le socialiste Christian Eckert, ancien secrétaire d’Etat chargé du Budget

Le budget, il connaît. Pendant un peu plus de trois ans, Christian Eckert a été secrétaire d’Etat chargé du Budget et des Comptes public sous François Hollande. Comme ses amis socialistes, il défend l'absence de censure par les parlementaires PS. "Il vaut mieux avoir ce budget qui comporte des compromis que se retrouver dans une situation difficile" affirme l'ancien élu de Meurthe-et-Moselle.

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"Ce que nous disons, c'est oui à un budget pour les Français, mais non à ce gouvernement" avait déclaré Olivier Faure, le premier secrétaire du Parti socialiste, au journal Libération, ajoutant demeurer "dans une opposition franche au gouvernement". En clair, pas de censure du gouvernement Bayrou malgré une motion déposée par La France insoumise (LFI), partenaire au sein du Nouveau Front Populaire, en réaction aux 49.3 enclenchés par le Premier ministre sur les textes budgétaires.

S'abstenir de voter la motion de censure, une décision à la quasi-unanimité pour le bureau national du PS et validée unanimement par les députés socialistes, lors d'une réunion de groupe. Sans les socialistes, impossible de recueillir mathématiquement les 289 voix nécessaires pour faire tomber le gouvernement. Dans ce cas, le budget sera considéré comme adopté à l'Assemblée avant un dernier vote sans suspense au Sénat jeudi matin, pour définitivement adopter le budget de l'Etat pour 2025. Le PS a décidé de ne pas censurer "par seul esprit de responsabilité et dans l'intérêt du pays", qui attend de disposer d'un budget, précise le parti dans un communiqué. Une décision "légitime" selon Christian Eckert, ancien secrétaire d’Etat chargé du Budget et des Comptes publics sous François Hollande, au regard de la situation du pays. Il s'explique.

Pour les socialistes, il s'agit non pas de soutenir le gouvernement, mais de ne pas pratiquer la politique du pire pour reprendre une formule d'Olivier Faure en ce qui concerne le vote de ce budget. Êtes-vous d'accord avec cette formulation ?

(Christian Eckert) On voit de jour en jour quelles sont les difficultés de ne pas avoir de budget et du retard sur l'organisation du financement d'un certain nombre d'emplois ou de service. C'est un retard également sur des investissements. Ne pas avoir de budget, c'est effectivement un handicap sur l'aspect économique, mais aussi pour le social. Il faut donc trouver des compromis et il y en a eu quelques-uns. Sont-ils suffisants ? Quand une négociation aboutit, c'est parfois le verre à moitié plein ou à moitié vide. Il y a eu néanmoins quelques avancées, notamment des questions fiscales avec la taxation des plus hauts revenus. Évidemment, je n'aurais pas fait le même budget et mes amis socialistes en auraient souhaité un autre. Mais je crois qu'il était légitime de s'abstenir de censurer.

Élu à l'Assemblée, vous n'auriez pas censuré ce budget et vous auriez censuré le précédent budget de Michel Barnier ?

L'attitude de Michel Barnier a été de se tourner vers la droite, voire l'extrême droite. C'était quand même beaucoup plus difficile de ne pas le censurer que de censurer François Bayrou. Quelle aurait été la suite s'il y avait une censure et un nouveau gouvernement ? Était-on certain d'avoir un projet budgétaire, radicalement différent et susceptible d'être adopté ? Je n'en suis pas sûr. Après une première censure, on a laissé une forme d'instabilité. Cette fois-ci, on n'en rajoute pas si j'ose dire. On se dit qu'il va falloir attendre d'autres échéances. On ne sait pas lesquels d'ailleurs. Peut-être des législatives en juillet ou, c'est moins probable, une élection présidentielle.

Il vaut mieux avoir ce budget qui comporte des compromis que se retrouver dans une situation difficile, administrativement, financièrement et politiquement.

Christian Eckert, ancien secrétaire d'État au Budget

Selon vous, les socialistes ont été responsables en ne votant pas la censure et en laissant adopter ce budget ?

Là, je pense qu'il n'y a effectivement pas photo et qu'il vaut mieux avoir ce budget qui comporte des compromis que se retrouver dans une situation difficile, administrativement, financièrement et politiquement. Sur le plan international aussi, on le voit bien aujourd'hui, l'absence de budget fragilise le pays, son économie et la structuration de notre République. Ce compromis me semble effectivement responsable.

Le Parti socialiste qui se replace au milieu de l'échiquier politique, c'est le soigne d'un nouvel élan qui doit être confirmé maintenant ?

Je ne suis pas sûr qu’Olivier Fort n'a pas en tête l'arrivée d'un prochain congrès pour avoir modifié un peu la trajectoire du Parti socialiste. On verra dans les prochains mois. Il y aura forcément une clarification. Je suis retourné au PS que j'avais quitté il y a quelques années pour d'autres raisons d'ailleurs. J'y ferai entendre un peu ma voix avec quelques amis. Mais il y a encore du boulot. Il faut un programme, une incarnation et une organisation. Il y a encore beaucoup de choses à entreprendre pour retrouver l'esprit de ce grand parti de gouvernement.

Ce vote valide une forme de divorce avec LFI. C'est une bonne chose selon vous ?

Je ne suis pas un fanatique de cette alliance avec LFI. Ce qui nous sépare de La France Insoumise est important. Je pense bien évidemment à la radicalité, pour ne pas dire à l'extrémisme de la plupart des prises de position de LFI et de Jean-Luc Melenchon sur les questions internationales, notamment les conflits au Moyen-Orient et même en Ukraine. Énormément de choses qui nous séparent. Je pense qu'il y a un espace politique à occuper entre la France insoumise et le Macronisme, même s'il a quelques signes de fin de vie Je pense que le Parti socialiste doit occuper ce terrain. S'il recommence à le faire ou s'il commence à le refaire, c'est plutôt une bonne chose. Moi, je vois ça d'un bon œil. Il faut proposer au pays une solution à gauche, qui soit raisonnable et responsable et qui se démarque du gouvernement actuel. Les socialistes ont voté contre le projet de budget mais sans faire preuve de jusqu’au-boutisme comme LFI.

Cette absence de censure fait un heureux à l'Elysée ? Le grand gagnant, même provisoirement, c'est Emmanuel Macron ?

Franchement, je ne partage pas du tout ce point de vue. Emmanuel Macron a quasi définitivement perdu depuis un moment. Il ne faut pas oublier sa responsabilité et celle de ses gouvernements. On oublie un peu vite que depuis sept ans, Emmanuel Macron a conduit le pays à une situation budgétaire extrêmement alarmante. On ne peut le nier aujourd'hui. Bruno Lemaire, ministre des Finances pendant sept ans, disait avoir sauvé le pays. En arrivant à Matignon, Michel Barnier avait pourtant déclaré découvrir une situation qu'il ne soupçonnait pas aussi mauvaise. On peut se poser des questions... Emmanuel Macron a dissous pour clarifier les choses. En fait, il a tout embrouillé. Pour moi, le président est complètement démonétisé et il faudra bien à un moment qu'on pointe cette responsabilité ou ces différentes responsabilités sur l'état des finances publiques désastreuses du pays.

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