Nancy : une enquête IGPN pour "rétention arbitraire" de deux militantes de Greenpeace

L'IGPN a été saisie pour "rétention arbitraire" de deux militantes de Greenpeace. Lors d'une opération de collage d'affiches en février 2020, elles sont interpellées et placées en cellule au commissariat de Nancy, sans qu'une garde à vue ne leur soit notifiée.

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L'Inspection générale de la police nationale (IGPN) a été saisie pour des faits de "rétention arbitraire" de deux militantes de l'ONG environnementale Greenpeace à Nancy (Meurthe-et-Moselle), a-t-on appris fin novembre 2020.

Jeudi 6 février 2020, tôt le matin, deux militantes sont dans les rues de la ville avec d'autres membres du groupe local pour une action de sensibilisation à la pollution de l'air, un mois avant le premier tour des élections municipales. Au programme : collage d'affiche et tags à la craie. France 3 Lorraine avait suivi cette opération qui avait pour but d'attirer l'attention des élus et de la population.


Vers 5h30, les deux militantes sont interpellées alors qu'elles opéraient devant la permanence électorale de Laurent Hénart, à l'époque maire de Nancy. Elles sont emmenées à l'Hôtel de police, boulevard Lobau. Elles passent une heure et demie en cellule, après une audition, une fouille complète et la confiscation de leurs effets personnels.

Sauf qu'aucune garde à vue ne leur a été notifiée, selon l'avocate de Greenpeace France, Me Marie Dose, qui a signalé les faits au procureur de la République près le tribunal judiciaire de Nancy, François Pérain, le 18 février.

Une première pour Greenpeace

Le Parquet de Nancy ouvre alors une enquête préliminaire pour "fait de rétention arbitraire par personne dépositaire de l'autorité publique". Le procureur de la République de Nancy, François Pérain, nous confirme que l'IGPN "était donc saisie d'une demande d'enquête depuis le 5 mars 2020". Enquête qui, selon Greenpeace, a finalement été ouverte le 14 mai.

Johanna (*), l'une des deux militantes, a été entendue par l'IGPN le 27 octobre 2020. L'enquête est toujours en cours.

C'est la première fois qu'une enquête IGPN est ouverte pour des faits en lien avec des militants de l'ONG, précise Clara Gonzales, juriste pour Greenpeace France. "Dans un contexte de répression grandissante de nos militants, nous sommes obligés de réagir fermement.

Contravention ou délit ?

Greenpeace France s'inquiète du glissement qui est en train de s'opérer, et indique que ses militants font de plus en plus l'objet d'arrestations, de gardes à vues ou de poursuites non justifiées. 

Pour l'affaire de Nancy, l'avocate de Greenpeace France et le procureur de Nancy s'opposent sur la qualification des faits. François Pérain précise que les faits ont été retenus "sous les qualifications de dégradation par inscription de bien d'utilité publique ou dégradation par inscription en réunion, ce sont des délits". Et cite l'article 322-1 du Code pénal.

Me Marie Dose lui oppose alors l'article 635-1 du même Code pénal, qui concerne des dégradations entrainant des "dommages légers", et qui ne relèvent que d'une contravention. Ce qui semble être le cas pour des affichées fixées avec de la colle biodégradable et de la peinture à la craie.

Militante fichée

"Puisque nous contestions le caractère délictuel des faits, Johanna a décidé de ne pas se rendre à une convocation pour un stage de citoyenneté", explique la juriste de Greenpeace France.

Johanna doit alors se rendre à une seconde audition libre, le 28 juillet 2020. Les agents prennent ses empreintes. Johanna est inscrite au Fichier national automatisé des empreintes génétiques (Fnaeg). Une procédure pourtant réservée à des personnes mises en cause ou déclarées coupables pour faciliter l'identification d'auteurs de certaines infractions, comme une infraction de nature sexuelle, un meurtre, ou du trafic de stupéfiants.

L'inscription au Fnaeg n'est pas prévue en matière contraventionnelle. La qualification des faits en délit l'a donc permise, et c'est là qu'est tout le problème pour Greenpeace France.

Saper le moral

"L'autorité fait passer des faits de nature contraventionnelle pour des délits, et en profite pour ficher nos militants, affirme Clara Gonzales. ​​C'est une atteinte grave aux libertés individuelles." Greenpeace a contesté la conservation des empreintes. La réponse se fait toujours attendre.
Pour autant, la réponse pénale a été "proportionnée", selon le procureur de Nancy. "Ces faits donnaient lieu à la notification d’un rappel à la loi et la procédure était classée sans suite le 1er septembre 2020", résume François Pérain.

Pour Johanna, cette affaire est "une manière de saper les ardeurs des militant.e.s. C'est effrayant, à croire qu'il faut faire partie d'une ONG internationale pour se défendre de tags à la craie." Pour autant, son engagement reste intact, "toujours aussi fort, sinon plus !"


(*) : le prénom a été modifié

 
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