Une campagne de pilotage inédite sur le lithium a débuté au laboratoire GeoRessource de l'Université de Lorraine. Pendant quatre jours, les scientifiques testeront un traitement industriel innovant pour extraire du lithium et valoriser d'autres éléments présents dans la roche.
Une campagne de pilotage inédite sur le lithium a débuté le lundi 2 décembre 2024 au sein du laboratoire GeoRessource (Université de Lorraine – CNRS). Pendant quatre jours, dans ce qui ressemble à une usine de 2000 m², une plateforme nommée STEVAL, les scientifiques vont tester la faisabilité d’un traitement industriel permettant d’extraire du lithium d’une roche tout en valorisant l’ensemble des autres éléments présents tels que le tantale, l'étain, le béryllium ou le feldspath. Cette "station expérimentale de génie minéral" est unique en Europe.
"Ce sont 20 tonnes de minerai de lithium français de Beauvoir, dans l’Allier, provenant de la future mine de lithium de la société Imerys, qui vont être utilisées", nous explique Yann Foucaud, responsable scientifique et pilote de STEVAL. "L'idée est de tendre vers une mine zéro déchet.
Notre approche vise à valoriser autant que possible tout le minerai entrant dans l'usine de traitement. L’objectif de cette campagne de pilotage est de valider un processus à échelle continue pendant plusieurs heures sans intervention humaine.
Le minerai passe d'une étape à une autre, comme dans une véritable usine, de manière autonome grâce à l’eau. En laboratoire, nous n'avions que quelques grammes de minerai et les essais ainsi que tous les développements ont été réalisés à échelle discontinue."
Une mine zéro déchet
Le lithium est un élément alcalin très léger. Incontournable pour la fabrication de batteries pour l'industrie automobile. Il est actuellement présenté comme une matière première essentielle à la transition énergétique.
L’enjeu est important et il a fallu plusieurs mois de travail à l’équipe scientifique pour préparer cette campagne de pilotage. Le parcours est précis, comme il le serait dans une entreprise. "Cela commence par le concassage et le broyage des morceaux de roches pour obtenir une poudre fine. À l’étape suivante, celle de la séparation par gravité, nous obtenons un concentré de tantale et un concentré d’étain. D’autres étapes avec des procédés spécifiques seront nécessaires pour le minéral contenant le lithium. Ensuite, après d’autres étapes, nous pourrons extraire le minéral contenant le béryllium et, dans une ultime étape, le feldspath. En fait, à chaque étape, nous concentrons un minéral porteur d'une substance d'intérêt."
La société Imerys, leader mondial des spécialités minérales pour l’industrie, cofinance l’étude avec l'Union européenne et l'Agence nationale de la recherche (ANR). "L'idée, finalement, est que tous les produits issus de cette mine zéro déchet soient achetés par un industriel qui les utilisera pour fabriquer des produits manufacturés. Il faut que nous produisions un concentré de lithium avec une teneur en lithium suffisante pour qu'il soit acheté par des industries produisant des batteries."
L’enjeu scientifique
Pour les scientifiques, cette plateforme de pilotage est également une opportunité, car elle permettra de recueillir une montagne de données à exploiter. "Nous aurons des mesures de débits, de granulométrie, de teneur, de récupération. Toutes ces données constituent le cœur du procédé. Nous pourrons monitorer tout cela plus ou moins en continu en échantillonnant les flux de manière régulière au cours de l'essai.
Ensuite, nous pourrons traiter tous ces échantillons et toutes ces données. Nous prévoyons d'avoir entre 200 et 400 échantillons. Quelle teneur ? Combien de lithium en pourcentage avons-nous réussi à récupérer à la fin ?". Ce sont des informations précieuses pour la recherche aussi.
Les résultats de cette campagne de pilotage seront rendus publics d'ici à trois mois.