Vosges : une sécheresse et des restrictions d’eau dès le printemps

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Écrit par Sophie Mercier

Après un hiver trop sec et de faibles quantités de neige, le département des Vosges pourrait faire face à une sécheresse précoce. La commune de Gérardmer annonce des restrictions d’usage de l’eau dès le début du mois de mai pour éviter un scénario catastrophe cet été.

Alors que le printemps commence à peine, les autorités tirent la sonnette d’alarme dans les Vosges : la sécheresse est déjà là, avec deux mois d’avance. La commune de Gérardmer annonce des restrictions d’usage de l’eau dès le mois de mai pour éviter un scénario catastrophe semblable à l’été 2023. Certaines communes avaient alors dû être ravitaillées par camions-citernes.

2022 : un été catastrophique dans les Vosges

"En août 2022, le réseau était tellement affaibli que nous avons dû faire appel à six camions-citernes pour ravitailler les habitants en eau", se souvient la maire de la commune de Ventron, Brigitte Vanson. Une situation historique dans la vallée qui avait marqué les esprits, et qui pourtant risque de se répéter cet été encore. 

Très touristique, Ventron peut passer de 900 habitants à plus de 2000 en plein mois d’août. Une affluence qui sur-sollcite les réserves en eau déjà très pauvres, et le réseau de canalisations très endommagé. "Ça va être très critique, cet été encore. On vérifie si le réseau fonctionne bien, on cherche les fuites, c’est un grand travail que l’on mène avec l’agence de l’eau." 

Une sécheresse deux mois plus tôt



Une inquiétude partagée par le collectif « eau 88 » qui a alerté la préfète des Vosges dès la fin du mois de février sur le niveau inquiétant des nappes phréatiques. Selon le collectif, l’examen de la situation de la nappe des Muschelkalk dans l’Ouest vosgien, fait apparaître une baisse rapide et significative de la nappe, avec trois mois d’avance sur l’année passée. À Vittel également, le rechargement des nappes phréatiques a déjà deux mois de retard.

Un constat alarmant qui se fait aussi en surface. Les faibles précipitations durant l’hiver n’ont pas permis aux lacs de se recharger convenablement et le manque de neige ne va pas arranger les choses.

Selon la DREAL Grand Est, sur le bassin Rhin-Meuse, ce mois de février doux, ensoleillé et extrêmement sec (le deuxième mois le plus sec depuis 1959) a influencé très nettement la situation hydrologique générale et limité les écoulements dans tous les cours d’eau. Ainsi, les débits moyens mensuels sont partout en nette baisse par rapport à janvier dernier avec des déficits d’écoulement importants qui s’étalent de 50 à 80%.

Des restrictions dès le mois de mai à Gérardmer



"Aujourd’hui, le lac est à la même hauteur que l’année dernière au mois de mai", affirme le maire de Gérardmer, Stessy Speissmann. "L’an dernier, le réseau a connu des baisses importantes dès la fin du mois de juin, et on a commencé à utiliser l’eau du lac dès le mois d’août pour alimenter les habitants et quatre autres communes. On estime que cela va intervenir deux mois plus tôt cette année." 

Face à ce constat, le maire ne veut plus attendre. "On va réunir très rapidement le comité départemental de la ressource en eau pour faire le point et mettre en place des restrictions dès le mois de mai." Des restrictions qui seront similaires à celle prises l’an passé (interdiction de l’arrosage des espaces verts, des terrains de sport et des jardins entre 8 h et 20 h, ainsi que le lavage des voitures, le remplissage des piscines et des jacuzzis), mais qui interviendront donc plus tôt.

Stessy Speissmann n’exclut pas si besoin d’interdire totalement l’usage récréatif de l’eau. "Malheureusement, si le dérèglement climatique perdure nous n’aurons pas le choix. La situation que nous avons vécue l’an passé a sensibilisé tout le monde. La population a aujourd’hui conscience du problème et fait preuve de beaucoup de compréhension." 

Des restrictions nécessaires pour éviter tant que possible de pénaliser l’économie locale. "La prochaine étape, ce serait de jouer sur les ressources en eau au niveau des industriels. Nous avons beaucoup d’industries textiles, qui fonctionnent jusqu’en juillet et qui consomment beaucoup d’eau. Nous pourrions limiter leurs apports, mais cela aurait des conséquences terribles, on ne veut pas en arriver là." 

L’eau : la fin de l’abondance ?

Économiser l’eau, une nécessité et une demande faite par le président la République à l’occasion de son déplacement il y a quelques semaines au salon de l’agriculture. À propos de la sécheresse qui gagne le territoire, le chef de l'Etat avait appelé à « un plan de sobriété sur l'eau » sur le modèle de la sobriété énergétique, évoquant à nouveau « la fin de l'abondance ».

Une nouvelle gestion plus économe et prévoyante, encouragée dans le grand est par le pôle de compétitivité Hydreos. Créé en 2010, il a pour objectif de développer des solutions innovantes dans trois domaines stratégiques : les infrastructures durables pour l’eau (réseaux d’eau), la gestion intelligente de l’eau, et la préservation des écosystèmes humides.

"Tout le monde est inquiet et il y a de quoi. Selon le dernier rapport du Giec, la quantité d’eau ne va pas baisser drastiquement, mais va tomber de façon très inégale. Nous allons alterner entre une succession d’épisodes de sécheresse et des précipitations très importantes, que les sols trop secs ne pourront pas absorber, provoquant alors des inondations", explique Michel Fick, président d’Hydreos.

"Il faut apprendre à mieux gérer nos villes. Aujourd’hui, ce sont des entonnoirs conçus pour évacuer l’eau au plus vite. Aujourd’hui, il faut au contraire trouver des solutions pour l’absorber puis la stocker. L’eau est un enjeu essentiel pour les années à venir."

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