La séparation de Villeneuve Pet Food (VPF) de sa maison-mère, Continentale Nutrition, numéro un français de l'alimentation pour chiens et chats, a été entérinée lundi par le tribunal de commerce d'Agen. Alandia va faire appel de cette décision. Explications.
Le tribunal a fixé la reprise de l'activité au 9 juin, selon les attendus consultés par un correspondant de l'AFP. Cette décision est exécutoire. L'appel, possible pendant 10 jours, n'est pas suspensif.
Le dossier présenté par cette entreprise familiale basée près de Karlsruhe (centre-ouest de l'Allemagne), spécialisée dans la nourriture pour animaux, était en concurrence avec l'irlandais Cats and Dogs Food (C&D), également candidat à une reprise de VPF seule, et Continentale Nutrition, basée à Boulogne-sur-Mer (Pas-de-Calais), où travaillent 501 salariés, propriétaire de VPF depuis 2012 et qui avait soumis de son côté un plan de continuation.
Le Tribunal de commerce d'Agen s'est donc rangé aux arguments du Parquet qui, à l'audience du 19 mai, longue de six heures, avait jugé le dossier Deuerer plus solide que ses deux concurrents.
L'Allemand, qui va devoir débourser jusqu'à 6,5 millions d'euros pour acquérir VPF, s'est notamment engagé à garder les quelque 150 salariés du site de Villeneuve-sur-Lot.
Il prévoit d'embaucher à moyen terme de 30 à 50 salariés supplémentaires et d'investir plusieurs millions d'euros. L'hypothèse du plan de continuation porté par Continentale était farouchement rejetée par les salariés villeneuvois et leurs syndicats, qui affichaient leur défiance après la reprise de Continentale, validée le 25 mars par le Tribunal de commerce de Boulogne-sur-mer, par le fonds d'investissement français Alandia.
Début mars, le ministre du Redressement productif, Arnaud Montebourg, avait annoncé un accord concernant le financement de ce plan de reprise global par Alandia.
Cette décision gardait dans le périmètre de la société boulonnaise la filiale de Villeneuve, en procédure de sauvegarde depuis avril 2013 et finalement placée en redressement judiciaire début mars 2014. C'est cette dernière mesure de redressement judiciaire qui a ouvert la possibilité pour VPF d'être cédée, seule, à un repreneur.
A l'audience du 19 mai, le ministère public avait abondé dans le sens des salariés, écartant le plan de continuation de la maison-mère au profit de la reprise de la filiale lot-et-garonnaise présentée par Deuerer et nécessitant donc la séparation d'avec Continentale Nutrition.
Cheval de Troie ?
"C'est une vraie satisfaction", s'est réjoui Sébastien Plasteig, directeur de VPF. La reprise par Deuerer "va donner une dimension beaucoup plus européenne à VPF qui va désormais s'ouvrir au marché du sud de l'Europe", a-t-il ajouté, estimant que les 30 à 50 embauches évoquées par le plan de Deuerer auraient lieu d'ici trois à cinq ans.
"Aujourd'hui, nous offrons à nos clients et de la pérennité et de la visibilité, la séparation avec la maison-mère va les rassurer", a-t-il insisté, se disant "très fier du comportement des salariés" et saluant "une vraie victoire collective".
Deuerer "nous garantit le maintien des emplois accompagné d'investissements et de nouvelles embauches", s'est félicitée Caroline Maurrissot, déléguée CFDT de VPF. "C'est une année de combat qui s'achève victorieusement". "Maintenant, on a envie de tourner la page, de bosser en toute sérénité", a-t-elle ajouté, disant avoir "une grosse pensée pour les 500 salariés de Continentale Nutrition", les appelant à "la plus grande vigilance" vis-à-vis d'Alandia.
A Boulogne, Dominique Paquentin, secrétaire de la CFDT dans le Boulonnais, accusait visiblement le coup : "On est surpris et déçu à la fois (...) On va voir comment ça va se goupiller. Nicolas de Germay (ndlr : patron du fonds Alandia, repreneur de Continentale Nutrition) nous a garantis la semaine dernière que, avec ou sans Villeneuve Pet Food, on pouvait quand même continuer et dans un an on verra. On a un an de mise à l'épreuve...". "On avait peur que Deuerer (...) rentre par la petite porte pour s'emparer du marché, c'est un peu le cheval de Troie. Pour l'instant, on observe de loin", a ajouté le syndicaliste.