Fillette noyée à Berck : pour le juge d'instruction, la thèse de la sorcellerie ne tient pas

La thèse de l'emprise d'un sorcier, avancée lundi par Fabienne Kabou pour expliquer qu'elle ait livré sa petite Adelaïde aux flots de la Côte d'Opale un soir de novembre 2013, ne tient pas, est venu dire à la barre le juge d'instruction, au troisième jour du procès mercredi.

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Pour les premiers experts psychiatres appelés à témoigner dans la foulée devant les assises de Saint-Omer, Fabienne Kabou souffre en revanche d'un "trouble psychique".
"Pourquoi avez-vous orienté l'interrogatoire brusquement sur la sorcellerie ?" dès décembre 2013, demande au juge Hervé Vlamynck l'avocat général Luc Frémiot,
sur le ton du reproche. "J'anticipe la dimension culturelle", se justifie M. Vlamynck.

Lors de cet interrogatoire, Fabienne Kabou évoque pour la première fois des explications mystiques au geste commis à Berck-sur-mer, parlant d"une espèce de traque" qui ne pouvait pas être dissociée de son crime. "Vous ouvrez la porte de la sorcellerie et elle s'y engouffre, j'ai l'impression qu'elle vous manipule", lance au juge, l'avocat général.
"Ce n'est pas problématique", lui rétorque M. Vlamynck, "ce qui m'intéresse, c'est la vérification et elle ne m'a pas convaincue sur la sorcellerie", poursuit-il.

Cette thèse "fait flop", ajoute le juge. Au premier jour du procès, Fabienne Kabou avait affirmé que "la sorcellerie" était "la constatation" à laquelle elle arrivait "par défaut" car elle n'avait "aucune autre explication" à son crime.  "Où est le fond culturel et où est la maladie mentale ?", questionnait alors son avocate, Me Fabienne Roy-Nansion. L'un des avocats des parties civiles y voyait une stratégie de défense : "Vous êtes face à une femme qui est très intelligente et qui sait qu'il ne faut pas se dire fou, mais qu'il faut donner à manger aux experts pour paraître fou, la sorcellerie est toute trouvée", avait affirmé Me Jean-Christophe Boyer.

"Psychose délirante"

Selon le psychologue Alain Penin, il n'y a pas "de pathologie mentale" chez Fabienne Kabou, mais "une adhésion" à "des croyances" se situant "dans un registre de la
culture sénégalaise ayant créé chez elle un trouble psychique". Ainsi, selon lui, au moment des faits, elle était "atteinte" d'un "trouble psychique" ayant "altéré son discernement". L'accusée est "largement influencée par des références culturelles", affirme-t-il.

Chez Fabienne Kabou "la sorcellerie est secondaire". "Elle a une psychose délirante chronique" qui a évolué avec son "isolement", affirme une contre-expertise menée
par trois psychiatres. Au moment des faits en 2013, le psychiatre Paul Bensussan, expliquait que "les infanticides commis par la mère était souvent sous-tendus par une pathologie psychiatrique".

Plus tôt dans la matinée, l'expert informatique avait affirmé n'avoir trouvé sur l'ordinateur de Fabienne Kabou aucun élément en lien avec la sorcellerie. "Rien ne relie ce dossier à la sorcellerie", affirme l'une des avocate des parties civiles, Me Sylvie Fenart. "Nous sommes à un moment crucial du procès, la question de la responsabilité de l'accusée est primordiale", conclut Me Christian Saint-Palais, avocat de Michel Lafon, le père de la fillette.

Dans la matinée, le souvenir de la petite Adélaïde avait résonné pour la première fois depuis le début du procès grâce à une vidéo projetée aux assises. Issue du téléphone portable de Fabienne Kabou, cette séquence d'environ deux minutes, projetée sur un écran de télévision, a pétrifié la salle, dans un silence profond.
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