Le cyclone Chido s'est abattu sur Mayotte le 14 décembre 2024. De nombreux secouristes sont partis aider l'île mahoraise. Parmi eux, un Nordiste de 31 ans engagé à la Croix-Rouge. Son récit après quinze jours de mission.
De l'eau, du chlore et du temps. "On a pu créer de l'eau potable, c'est quand même incroyable", s'émerveille-t-il encore. Rémy Bécuwe est le président de la Croix-Rouge du Nord. Le 26 décembre 2024, au lendemain de Noël, il a quitté son confort dunkerquois pour aider les sinistrés de Mayotte. Quinze jours plus tard, sur la route du retour, il nous raconte son rôle et ses rencontres.
Un rôle de coordination des secours
Le 14 décembre 2024, le cyclone Chido s'abat sur l'île mahoraise. Cadre de la Croix-Rouge, Rémy Bécuwe est rapidement mobilisé. Il n'a que 31 ans, mais déjà 13 dans l'association. Arrivé à Mayotte, il est saisi par la moiteur, la chaleur humide. Le soleil se lève tôt, il dort peu. Un immense travail l'attend. "Les journées sont denses. On se levait à six heures, on ne se couchait pas avant minuit".
Son rôle est de coordonner les secours de l'association. Rémy Bécuwe connaît ce type de mission : il est déjà parti à Saint-Martin en 2017 après l'ouragan Irma, il s'est rendu en Gironde lors des grands incendies. "On est formé pour ce type d'opérations", assure-t-il. Longuement, il nous énumère les urgences, la hiérarchie des actions.
Le rétablissement des liens familiaux est une action socle de la Croix-Rouge internationale.
Rémy Bécuwe, président de la Croix-Rouge du Nord
L'homme est organisé. D'abord, il a fallu aider la Croix-Rouge mahoraise à se relever. Ensuite, il a fallu recenser les besoins, envoyer chaque jour des équipes sur le terrain, distribuer des denrées, des bâches pour les toits, du matériel d'hygiène. "Des personnes n'allaient pas spontanément vers les hôpitaux. On a fait des petits soins". Mais le rôle essentiel de la Croix-Rouge, c'est le lien. "Le rétablissement des liens familiaux est une action socle de la Croix-Rouge internationale". Dans l'enchaînement des drames, il y a parfois aussi des événements heureux comme "cette naissance dans une de nos ambulances".
L'eau, une denrée essentielle
Pour les secouristes, le grand enjeu a été la gestion de la pénurie d'eau. Difficulté de se doucher, de nettoyer, de boire, de vivre tout simplement : "On prend conscience à quel point l'eau est une denrée importante", reconnaît le bénévole. D'un côté, l'eau manquait. De l'autre, des torrents tombaient du ciel. L'homme du Nord de la France ne pensait pas être surpris un jour par des pluies : "Je n'en avais jamais vu de pareilles. Ça tombe en continu et longtemps. Le bon côté, c'est que ça a permis de remplir les stocks d'eau".
Elle a tout perdu, tous ses souvenirs. Son mari est parti à la Réunion car il a des soucis de santé. Et, malgré tout, elle est dans son collège pour préparer la rentrée des classes.
Rémy Bécuwe, président de la Croix-Rouge du Nord
Rémy Bécuwe revient avec des images dans la tête, beaucoup d'images, mais surtout un sentiment. Une forme d'admiration pour ce peuple mahorais si résilient. Il se souvient tout particulièrement d'une rencontre avec la principale d'un collège. "Isabelle", nous dit-il comme pour appuyer son propos. "Elle a tout perdu, tous ses souvenirs. Son mari est parti à la Réunion, car il a des soucis de santé. Et, malgré tout, elle est dans son collège pour préparer la rentrée des classes. Elle va discuter avec les jeunes. Cette dame m'a vraiment marqué".
La résilience des Mahorais
Cette capacité à se relever, Rémy Bécuwe n'en revient toujours pas. Tout est détruit, mais les gens redressent la tête : "On déblaie, on relève les tôles et c'est reparti. Ils ont un système D plus développé qu'en métropole. Ils ont appris à vivre avec les cyclones".
Et puis, il y a les rencontres dans les équipes de travail, les pompiers, les préfets, sous-préfets… Tout un écosystème venu pour aider les Mahorais et dont il retient la belle énergie : "On apporte tous un tout petit caillou pour que ça aille mieux". Là-bas, il a même rencontré d'anciens Dunkerquois, le Carnaval jamais loin dans les discussions.
Face à la puissance des événements, il y a parfois des petits moments, des images presque futiles qui prennent le dessus. Le président de la Croix-Rouge du Nord n'oubliera jamais ses petites traversées en barge. "Chaque jour, je reliais Petite Terre et Grande Terre. Ces allers-retours, ça m'a fait rire. Dès qu'elle arrive, tout le monde s'engouffre". Un drôle de taxi, témoignage du quotidien qui revient et qui reprend le dessus.
Au terme de cette mission, Rémy Bécuwe revient épuisé. Il a peu dormi, a subi l'humidité de l'air mêlé à la chaleur. Mais ce qu'il retient, c'est la fierté de porter les couleurs de son association. "Quand on partait à Mayotte en tenue de Croix-Rouge, tout le monde nous disait "merci" et "bon courage" dès l'aéroport". Engagé depuis ses 18 ans, il est aujourd'hui plus que jamais galvanisé : "La Croix-Rouge, c'est un emblème très fort, reconnu à l'international. Je suis fan de cet emblème et de ce qu'il représente".