I am the ennemy you killed, my friend."Je suis l'ennemi que tu as tué, mon ami". Ce vers prémonitoire est signé Wilfred Owen. Le 4 novembre 1918, à Ors dans le Nord de la France, le lieutenant Owen, 25 ans, tente de franchir ce canal avec son régiment. Il tombe sous la mitraille allemande. Seuls trois de ses poèmes seront publiés de son vivant.
Wilfred Owen a 21 ans lorsque la guerre éclate, il enseigne alors l'anglais à Bordeaux. En octobre 1915, il s'engage dans l'armée. Gravement traumatisé par une explosion sur le front de la Somme, il part en convalescence où il rencontre un autre poète, Siegfried Sassoon, un glorieux officier, auteur d'une déclaration pacifiste qui a fait grand bruit. Cette amitié révèle le génie poétique d'Owen. C'est pendant cette période qu'il composera certains de ses poèmes les plus célèbres comme " Ode à une jeunesse perdue"
Fin août 1918, Owen repart au front lors de l'offensive alliée des Cent Jours. Ici, à Ors, il y a une siècle, une maison blanche imaginée par un sculpteur anglais n'est alors qu'une simple maison forestière. Dans cette cave, à l'abri, Owen écrit une lettre à sa mère. Sa dernière. " Il n'y a aucun danger ici " écrit- il. Et s'il y en avait, il sera passé depuis longtemps quand vous lirez ces lignes." Sa mère lira ces lignes le jour même où elle recevra le télégramme lui annonçant la mort de son fils. Le 11 novembre 1918, l'Armistice vient d'être signée.
Wilfred Owen repose ici dans le cimetière communal d'Ors. Les horreurs de la guerre lui avaient fait perdre la foi et douter de la Vie éternelle. Sur la pierre tombale de son fils, sa mère a fait graver ces vers extraits du poème " The End ", La Fin mais fera enlever le point d'interrogation final : " La Vie renaîtra-t-elle dans ces corps ? En vérité, elle frappera toute mort de nullité. " Une mère qui voulait que son fils vive à jamais, l'œuvre du poète lui a donné raison.