Un rassemblement d'étudiants à Lille, avant une assemblée en mars à Rome : les jeunes catholiques sont sous les projecteurs. Mais trouver leur place dans des communautés vieillissantes et une société sécularisée est un défi, sur lequel l'Église a décidé de se pencher sérieusement.
Près de 3.000 jeunes sont attendus samedi et dimanche à Lille pour la troisième édition d'Ecclesia Campus, opération organisée tous les trois ans et présentée par l'épiscopat comme le plus grand rassemblement étudiant non sportif français. Un week-end de fête, mais aussi de débats et de réflexion autour du thème "s'engager pour s'épanouir".
"Nous comptons 12.000 jeunes dans nos aumôneries étudiantes. Depuis plusieurs années on constate plutôt un dynamisme", se réjouit auprès de l'AFP le père Régis Peillon, aumônier national de la pastorale étudiante.
Les grands rassemblements, comme celui - oecuménique - de Taizé en Bourgogne ou les mouvements scouts, ont le vent en poupe. Des initiatives innovantes à destination des jeunes sont remarquées, à l'instar des "bars cathos" ayant ouvert à Lille ou Lyon.
"Les jeunes ont les clés de la transformation du monde"
Mais la place des jeunes dans l'Église reste un enjeu majeur. Le pape François n'a pas hésité à convoquer pour octobre prochain un synode (assemblée d'évêques) à Rome sur "les jeunes, la foi et le discernement vocationnel", un concept qui va bien au-delà du choix de devenir prêtre ou religieux. Des évêques au mieux quinquagénaires sont-ils les mieux à même de disserter sur le sort de la jeunesse ? Le Vatican a pris en compte la limite de l'exercice en annonçant la tenue d'un "pré-synode", du 19 au 24 mars, rassemblant 300 jeunes du monde entier, âgés de 16 à 29 ans."Le pape a la conviction que les jeunes ont les clés de la transformation du monde dans un sens positif, pour plus de paix", explique à l'AFP la soeur Nathalie Becquart, directrice du service national pour l'évangélisation des jeunes et pour les vocations à la Conférence des évêques de France (CEF). "On a une génération très +pape François+, le pape leur parle."
Mais qu'attendent vraiment les jeunes de l'Église ? La CEF a sondé en 2017 diocèses et mouvements pour y voir plus clair dans les souhaits d'une population de 16-29 ans estimée à 11 millions de personnes en France et à 40% catholiques, selon une récente étude d'opinion.
Premier constat : "On a été interpellés par le fait que les jeunes qui sont éloignés de l'Église n'en attendent rien", reconnaît le père Peillon. D'autres forment notamment le voeu d'"une Église bienveillante, ouverte, qui écoute", selon la soeur Becquart. Surtout pas d'"un bastion qui se coupe de la société".
"Lieux de partage"
L'institution ecclésiale mesure sa marge de progrès. A la messe, "beaucoup de jeunes veulent se faire une place dans l'animation de la liturgie, par exemple, et on ne leur fait pas", note Nathalie Becquart : "Les lieux où ça se passe bien pour eux, ce sont ceux où on leur donne des espaces de co-construction". "Il n'est pas forcément évident de faire sa place en paroisse", confirme Claire Caralp, 29 ans, l'une des trois jeunes désignés par la CEF pour participer au "pré-synode" de mars. Cette ingénieure est engagée dans la pastorale de "jeunes professionnels", qui a ses propres groupes. "Un jeune pro, dans la vie active, peut être isolé en tant que chrétien, c'est important qu'il ait des lieux de partage", fait-elle valoir. Autre représentant français au "pré-synode", Adrien Louandre, 22 ans, se réjouit de son engagement "dans une Église animée et diverse". "On est tous différents mais on a un seul but : comment on fait pour améliorer la vie de nos jeunes", indique-t-il à l'AFP avec la foi du jeune converti.
Le choix de l'Église de France d'envoyer à Rome ce militant du Mouvement rural de jeunesse chrétienne (MRJC) a suscité des critiques dans la "cathosphère", notamment chez les Scouts d'Europe, le MRJC ayant été accusé de soutenir des positions favorables à l'avortement.
Signe que le débat est parfois encore vif dans les rangs catholiques, y compris chez les jeunes.