"Si vous n'êtes pas bien ici, allez ailleurs !", lance le président du département du Nord aux travailleurs sociaux

Le président du Nord, Christian Poiret s'est rendu vendredi 24 janvier à Téteghem, près de Dunkerque pour présenter ses vœux aux agents du département. Des salariés ont profité de sa venue pour protester contre le manque de moyens. Ce à quoi il a répondu en hurlant : "Si vous n'êtes pas bien ici, allez ailleurs, je le dis et je l'assume, allez travailler ailleurs". Des propos dénoncés par les syndicats.

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"Si vous n'êtes pas bien ici, allez ailleurs, je le dis et je l'assume, allez travailler ailleurs !". Au micro, sur la tribune, Christian Poiret perd ses nerfs. Face à lui, dans la salle, des assistantes sociales du département. Quand il a commencé son discours, elles lui ont tourné le dos, brandissant leurs pancartes en papier. Invitées pour les vœux du département, elles protestaient contre leurs conditions de travail et l'absence de moyens de la protection de l'enfance. 

Les assistantes sociales des associations financées par le département protestent contre le manque de moyens. © FTV

Après les premiers propos de Christian Poiret, dans la salle, les sifflets fusent. Le président du département lâche à nouveau : "Si vous n’êtes pas contents, partez ailleurs !”. 

La vidéo dure à peine plus d'une minute et circule depuis sur les réseaux sociaux.

Quelques secondes avant, il avait affirmé : "Le président est serein, si vous avez un travail en mode dégradé, faites autre chose que travailler au département du Nord".

Alexandre Leleux, secrétaire général FO Sambre-Avesnois, qui n'était pas sur place, a posté en réponse sur les réseaux sociaux : "Honte au président du Nord". Joint par téléphone, il assure ne pas reconnaître Christian Poiret dans ces propos violents : "C'est un homme politique d'envergure, il est habitué aux rouages, il a pété un plomb. Il a l'habitude de la pression et de prendre des décisions politiques, son comportement trahit une certaine tension face à des agents qui ont des problèmes de conditions de travail bien réels".

A la sortie des vœux de Christian Poiret à Téteghem (Nord), vendredi 24 janvier 2025. © FTV

Son collègue, David Grégoire, secrétaire départemental  FO est plus tranché. "Avec Christian Poiret, c'est toujours la faute des autres. Plutôt que d'aller chercher l'argent ailleurs, auprès de l'Etat, il tape sur les travailleurs. Il ne mérite plus d'être à sa place, il est imbuvable !"

Avec Christian Poiret, c'est toujours la faute des autres, Plutôt que d'aller chercher l'argent ailleurs, auprès de l'Etat, il tape sur les travailleurs. Il ne mérite plus d'être à sa place.

David Grégoire, secrétaire départemental FO

Coupe budgétaire de 3 millions d'euros

Les assistantes sociales sont vite sorties tandis que le président continuait à haranguer les agents présents. Un autre mouvement l'attendait pourtant à l'extérieur. Les associations du secteur médico-social venues dénoncer une coupe budgétaire de 3 millions d'euros pour la prévention spécialisée en 2025. Ce serait un quart du budget de cette mission. "Ce sont les gens les plus précaires qui vont payer ces logiques budgétaires qu'on ne comprend pas du tout", complète David Grégoire.

Dans un communiqué, l'intersyndicale du secteur du Nord explique : "Chaque année, 300 travailleurs sociaux accompagnent plus de 10 000 jeunes et leurs familles dans le département. Cette coupe budgétaire menace gravement leur travail. La prévention spécialisée permet de prévenir les placements en apportant un soutien direct et préventif aux familles en difficulté."

Pour les travailleurs de rues menacés, la réduction de ces moyens va entraîner une surcharge des services de la protection de l'enfance que l'on sait déjà mal en point. Une soixantaine de postes seraient supprimés, certains services fermés.

On ne s'attendait pas à un tel mépris face à des salariées qui sont tous les jours au front. Qu'il nous parle comme ça depuis son estrade alors qu'on doit faire toujours plus avec moins de moyens... Encore une fois, ce sont les plus fragiles sur lesquels on tape.

Anaïs Demuynck, travailleur social AAE - Dunkerque

Anaïs Demuynck est travailleuse sociale dans l'association AAE qui intervient sur le Dunkerquois. Elle se dit extrêmement choquée par les propos de Christian Poiret. Dépitée, elle confesse : "C'est inadmissible. On est dans le mépris total. On ne s'attendait pas à un tel mépris face à des salariées qui sont tous les jours au front. Qu'il nous parle comme ça depuis son estrade alors qu'on doit faire toujours plus avec moins de moyens... Encore une fois, ce sont les plus fragiles sur lesquels on tape."

Une soixante de poste de travailleurs de rue menacés

Nathalie Harmand, déléguée syndicale Sud est éducatrice de rue. Son métier ? Intervenir auprès des jeunes et leurs familles dans les quartiers prioritaires de la ville. Suivre et repérer les décrocheurs scolaires, les jeunes qui sont tentés par la délinquance, ceux en rupture familiale... Elle était présente vendredi 24 janvier lors des vœux du président du département. À l’extérieur. Avec ses collègues syndicalistes, ils n'ont pas pu entrer, ils n'étaient pas invités. Par contre, ils ont consolé leurs collègues assistantes sociales sorties après les propos de Christian Poiret.

Les travailleurs sociaux, à la sortie des vœux de Christian Poiret à Téteghem (Nord), vendredi 24 janvier 2025. © FTV

Elle raconte : "Elles étaient en pleurs. Ce sont des femmes qui ne comptent pas leurs heures, qui font avec leurs moyens pour sauver des familles. Elles étaient choquées. Entendre ça, qu'elles peuvent aller ailleurs ! Quel mépris. Elles se sont senties considérées comme de la m... alors qu’elles veulent juste travailler dans des conditions dignes"

Une pétition intitulée "Nord : la prévention spécialisée en danger !" a été lancée suite à l'annonce de la coupe de 3 millions d'euros. 

Appel à la manifestation le 6 février 2025. © FTV

Ces propos prononcés devant les agents du département n'ont fait que renforcer la défiance entre les services de protection de l'enfance et la présidence du département. Le 6 février prochain, les services de prévention ont prévu de manifester. Après les événements de vendredi, un préavis de grève a aussi été déposé pour les 45 maisons Nord Solidarités qui dépendent directement du département.

Contactée, la direction du département nous a précisé que "Christian Poiret ne fera pas de commentaire".

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