Depuis sa réouverture, le musée de Cassel organise sur demande des visites pour les déficients visuels.
Toucher la beauté du doigt, quand on ne peut la voir : au musée de Flandre de Cassel (Nord), les déficients visuels peuvent, lors de visites dédiées, découvrir les oeuvres grâce à des maquettes artisanales en relief, qui les recréent.
"Ah oui là il y a le pivert! Au-dessus, la pie... C'est superbe!", s'exclame Annick, 60 ans. Son doigt court sur les plumages du "Concert des oiseaux", peinture du maître flamand Frans Snyders, reproduite sur une maquette.
Annick et les 21 autres visiteurs du jour ont d'abord suivi l'audiodescription du "Concert des oiseaux" proposée par une médiatrice spécialisée, puis écouté le fameux Canon du compositeur Johann Pachelbel pour s'imprégner de l'atmosphère du tableau, et s'approcher de l'intention de Snyders : évoquer l'association harmonieuse de voix différentes dans le concert de la société.
Ils se sont ensuite installés sur une table pour manipuler les deux maquettes, l'une thermoformée, l'autre faite de bric et de broc par une jeune artiste-plasticienne, Chloée Bué. "J'ai dû faire une sélection des couleurs, des formes que je voulais montrer. Par exemple, le passereau était trop petit", relate Chloée Bué.
"Ensuite j'ai collé une à une les plumes des oiseaux sur du Sopalin et de la colle blanche. L'important est de bien garder les proportions du tableau et de mettre en avant l'essentiel, c'est-à-dire les oiseaux".
Des efforts qui portent leurs fruits
Depuis la loi de 2005 sur le handicap, qui a imposé des accueils spécialisés dans les établissements culturels, plusieurs musées en France proposent de telles visites tactiles, à l'image du Louvre ou du musée Guimet à Paris.Celui de Cassel, qui a rouvert en 2010 après des travaux entièrement centrés sur l’accessibilité, organise ces visites à la demande, soit en moyenne 700 personnes sur les 50.000 visiteurs annuels. L'établissement, labellisé pour les quatre grands types de handicap, a été récompensé en septembre par le premier prix "Patrimoines pour tous" du ministère de la Culture.
Pour Sandrine Vézilier-Dussart, sa directrice depuis 2001, "nous ne sommes pas que des bâtiments, nous sommes des musées. Si on ne réfléchit pas à comment une personne handicapée va pouvoir se laisser porter et émouvoir par l'oeuvre, ça ne sert à rien de travailler sur l'accessibilité physique" .