Grand débat national dans le Nord et le Pas-de-Calais : voici 4 choses à retenir à l'heure du bilan

Dans une église, des gares ou à domicile : des milliers de personnes ont fait part de leurs préoccupations et confronté leurs points de vue depuis janvier dans le Nord et le Pas-de-Calais pour le Grand débat. Quelles revendications ? Qui y a participé ? On vous résume ce qu'il faut en retenir.

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Le grand débat national, lancé le 15 janvier, prend officiellement fin ce vendredi. De Calais à Lens en passant par Lille, plus de 400 sessions de débat ont été organisées dans le Nord et le Pas-de-Calais depuis le 15 janvier. Il est encore possible d'apporter votre contribution en ligne jusqu'au 18 mars en vous connectant sur le site du Grand débat.

Ces discussions étaient articulées autour des quatre thématiques sélectionnées par le gouvernement : la transition écologique, la fiscalité et les dépenses publiques, la démocratie et la citoyenneté ou l'organisation de l'Etat et des services publics. Et bien qu'un nombre conséquent de réunions ont été organisées dans la région, la participation a souvent été en-deçà des attentes des organisateurs.

 

1. Une audience trop homogène ?


"On s'attendait à recevoir 160 personnes et on en a eu moitié moins, déplore Jean-Philippe Lannoy qui organisait une réunion à Calais sur le thème de la fiscalité. Je pense que les gens ont peur du traquenard à cause de l'image que la président a donné du Grand débat." L'organisateur, membre revendiqué de La France insoumise, regrette notamment que les QCM - distribués aux participants à chaque réunion - soient "orientés" avec des réponses souvent trop libérales à son goût. Ce que soutient également Jacques Vernier, coordonnateur du Grand débat dans le Nord, qui estime que ces questionnaires n'étaient "pas très productifs" et "contraires à la libération de la parole".
 

"Ce qui est dommage, c'est qu'il y avait une majorité de retraités et seulement un jeune dans la salle", ajoute Marilyne Cormont, retraitée et "gilet jaune" qui s'est rendue à Berck pour un débat en janvier. Un écho qu'on entend beaucoup de la part des organisateurs, notamment à Hallennes-lez-Haubourdin où une cinquantaine de personnes se sont réunies : "C'était essentiellement des actifs de la classe moyenne, une population plutôt âgée", selon le maire divers droite de cette ville du Nord, André Pau.
 

Jean-philippe Lannoy

A mille lieux des monologues d'Emmanuel Macron seul au milieu de la salle qui confisque les micros, retrouvons nous pour débattre de ce sujet essentiel.


L'élu déplore que les jeunes ne se soient pas "sentis concernés" par cette consultation, bien qu'elle ait permis de "recréer du lien". Car ce débat fut aussi l'occasion de "libérer la parole", selon Jacques Vernier, ex-maire LR de Douai. "Beaucoup n'avaient jamais eu la parole dans le débat public et étaient venus pour raconter leur histoire personnelle", poursuit-il, se remémorant une phrase d'un participant qui l'a marqué : "certains vivent pendant que nous, on survit".
 
Des participants avaient même préparé leur intervention préalablement et pris des notes car, comme le rappelle Jean-Philippe Lannoy : "L'objectif était avant tout de permettre aux gens de faire mûrir leur réflexion". L'organisateur d'une réunion à Calais qui se décrit volontiers comme "rebelle" a refusé de retranscrire le contenu de leurs échanges sur la plateforme du gouvernement, ne se sentant "ni légitime, ni compétent" pour synthétiser l'ensemble du débat. Pour autant, un tiers d'entre elles ont été couvertes par les coordonnateurs indépendants du Grand débat désignés par le préfet du Nord. Des réunions que Jacques Vernier estime "constructives malgré l'absence de certaines catégories de personnes".

Globalement, la participation au Grand débat dans le Nord et le Pas-de-Calais était sous la moyenne nationale, du moins pour la période du 22 janvier au 6 février. D'après un comptage réalisé par Le Figaro, si l'on fait le total du nombre de débats rapporté à 100 000 habitants, le Nord est juste sous la moyenne nationale et le Pas-de-Calais arrive encore plus loin.

 

2. Des territoires mis de côté


Malgré l'homogénéité des profils des participants, ce Grand débat national aura eu le mérite de lancer un regain d'intérêt pour la vie politique et d'inciter les gens à trouver des solutions"C'est la première fois qu'un gouvernement a cette volonté de faire remonter les solutions du bas vers le haut", souligne Eddie Koepler, président du conseil de développement de Valenciennes Métropole qui animait un débat sur l'organisation de l'Etat et des collectivités.

Ce qui a permis de mettre en avant le "sentiment d'abandon" ressenti par certains territoires : "l'Etat en demande de plus en plus aux collectivités territoriales avec un budget de plus en plus réduit", note Eddie Koepler. La raréfaction des services publics a également pu jouer dans l'émergence de ce sentiment. Un sujet plus que jamais d'actualité dans les villes moyennes de la région où certaines lignes TGV devaient être supprimées avant que la SNCF ne fasse marche arrière.
 
Pour lutter contre ce qui s'apparente de plus en plus à des déserts médicaux, scolaires ou de transports, un point fait l'unanimité : "Il ne doit pas y avoir de notion de rentabilité ou de profit quand on parle de service public", poursuit le président du conseil de développement de Valenciennes Métropole. Et ce Grand débat ne se limitait pas à un état des lieux : certains ont également proposé des solutions.

Une intervention a particulièrement marqué le coordonateur des débats dans le Nord : "une participante a proposé que certains services publics payants comme l'accès à l'eau ou à l'électricité deviennent gratuits pour une consommation de base, se rappelle Jacques Vernier. Et pour dissuader les gens de gaspiller, elle a proposé que le prix devienne exponentiel au-dessus d'un certain seuil de consommation". Des propositions qui seront d'abord synthétisées par les départements d'ici le début de la semaine prochaine puis par le gouvernement dès avril.

 

3. "Élus, rentrez de vacances !"


Le rôle, les "privilèges" et parfois l'absentéisme des députés ont été décriés par les participants colportant (parfois) leur lot de contrevérités. "J'ai entendu en boucle que les indemnités des élus n'étaient pas imposables, que les anciens ministres étaient payés pendant plusieurs années, énumère Jacques Vernier. Mon rôle en tant qu'observateur n'était pas d'intervenir, mais j'étais parfois obligé quand j'entendais certaines affirmations qui dépassent l'entendement"

De quoi pointer "un éloignement avec les élus de proximité", selon le maire d'Hallennes-lez-Haubourdin. "Qui peut dire aujourd'hui qui est son sénateur ou son député européen ?", questionne André Pau. Pour y remédier, le député LREM de la circonscription, Laurent Pietraszewski, a lancé la possibilité d'ouvrir une permanence parlementaire, bien que rien ne soit encore fait. En résumé, les élus en ont pris "plein la figure", affirme Jacques Vernier qui se rappelle de l'intervention d'un participant demandant : "Élus, rentrez de vacances !".
 

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Plus globalement, c'est tout le système électoral qui a été questionné. "Il parait nécessaire de s’interroger sur les modes de scrutin qui prennent mieux en compte la diversité de la société avec la prise en compte du vote blanc et l'introduction du tirage au sort, par exemple au Sénat", rapporte-t-on à Bully les Mines, à l'issu d'un ciné-débat organisé sur le thème "démocratie et citoyenneté".

Parmi les propositions qui reviennent - presque - dans tous les comptes-rendus : le retour de l'ISF, la taxation des GAFA et des plus grosses entreprises qui exercent en France, pas d'écologie "punitive" ou de TVA sur les produits de première nécessité... bref, plus de justice fiscale. Mais d'autres sujets plus étonnants ont été quasi-absents du débat, comme la problématique de l'emploi.
 
"Si je relis toutes mes notes, je ne trouverais pas un seul passage qui parle de chômage. Le problème s'est déplacé sur le pouvoir d'achat pour ceux qui ont des bas revenus comme les personnes au SMIC, les retraités...", assure Jacques Vernier. Est-ce parce que les chômeurs se sont moins investis dans le Grand débat ? "Possible, mais ce n'est pas la seule explication", rétorque l'ex-élu. Autres thèmes absents : la laïcité et l'immigration alors qu'ils faisaient clairement partie de la consultation. "Ces deux mots sont apparus moins d'une dizaine de fois en tout", reprend le coordonnateur.

La question de l'écologie a, quant à elle, été moins débattue dans la région bien que ce soit la taxation du diesel qui ait été à l'origine du mouvement des "gilets jaunes". "Dans l'ensemble, il y a eu beaucoup de propositions d'investissement de l'argent public mais maintenant la réponse, c'est : avec quoi les finance-t-on ?", demande le maire divers droite d'Hallennes-lez-Haubourdin, André Pau.

 

4. La grande division des "gilets jaunes"


Mais ce Grand débat national, lancé en réponse aux revendications des "gilets jaunes", était-il vraiment adapté pour répondre à ce mouvement social ? "Nous sommes bien conscients qu'on ne va pas régler tous les problèmes mais ça reste un bon moyen de confronter les points de vue et de trouver des solutions ensemble", estime Marilyne Cormont, la retraitée "gilet jaune" du Pas-de-Calais.

La sexagénaire a participé à un débat à Berck en janvier, gilet jaune sur le dos pour défendre les pouvoir d'achat des retraités... et son habit fluo n'avait pas plu à tout le monde. "Une dizaine de personnes a quitté la salle dès le début du débat en voyant les « gilets jaunes ». Ils n'étaient pas dans l'optique de débattre avec nous", assure-t-elle. Et d'autres activistes du mouvement ont, eux, préféré ne pas participer du tout, prenant ce Grand débat comme une "tentative de division" de la part du gouvernement. "Les « gilets jaunes » se sont assez peu mobilisés mais à défaut, un bon nombre de personnes portaient leurs revendications", reprend Jacques Vernier.
 

Alexandre Chantry

Communiqué Acte XI Lille : Pendant que notre Présidictateur Emmanuel Macron s'entête dans le mépris (cf : le romantisme allemand... ) et l'enfumage des "grands débats" fait de question réponses...


Si les débats ont été - quasi-unanimement - de bonne tenue, certains ont dégénéré. C'était le cas à Caudry, le 9 février où une scission interne est apparue au sein même des "gilets jaunes". Les débats, de plus en plus houleux, ont vu se distinguer deux tendances au sein du mouvement, selon un compte-rendu de La Voix du Nord : les pro et les anti-Grand débat. Dans le premier camp, ceux pour qui cette confrontation est une aubaine pour faire évoluer le mouvement. Et dans le second, ceux qui veulent continuer à défiler dans la rue sans débattre en dehors.

Reste un terrain d'entente : beaucoup regrettent la prolongation de ce Grand débat"Je pense que Emmanuel Macron s'en sert pour sa campagne pour les élections européennes", commente la "gilet jaune" Marilyne Cormont qui ne voit pas l'intérêt de cette prolongation des déplacements du président en régions. Si c'est bientôt la fin des sessions de débat, il est encore possible de donner son avis sur des problématiques plus locales comme sur le site de la MEL ou encore les cahiers de doléances toujours ouverts dans certaines mairies. 

 
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