Romain Attanasio, le skippeur picard, a franchi la ligne d'arrivée du Vendée Gobe 2024, ce dimanche 2 février 2025, à 11h50, après 83 jours en mer, aux Sables d'Olonne. Comme en 2020, il finit 14e de l'épreuve avec six journées passées en moins sur son bateau.
La fin d'une aventure de 83 jours, 22 heures et 48 minutes. Ce dimanche 2 février 2025, dans la brume, il était 11h50 quand Romain Attanasio a franchi la ligne d'arrivée du Vendée Globe 2024, matérialisée par le passage de la bouée du nouch. La délivrance est venue quelques instants plus tard, lorsque l'officialisation de son résultat lui a été communiquée par la radio. Il a alors vu les personnes de son équipe monter à bord de son bateau, Fortinet - Best Western, pour prendre en main la remontée vers le chenal des Sables d'Olonne, prévue dans l'après-midi.
Une course contre-la-montre commencée il y a près de cinq mois, rappelle l'intéressé. En effet, en septembre 2024, il avait démâté, avant de pouvoir en racheter un quelques jours avant le départ de l'épreuve mythique, grâce à une cagnotte en ligne.
Je n’arrive pas à dormir depuis trois jours parce que je ne pense qu'à cette arrivée.
Romain Attanasio, 14e du Vendée Globe 2024
Interrogé ce samedi 1ᵉʳ février, lorsqu'il lui restait encore 230 miles à parcourir, le Picard ne cachait pas à la fois son excitation et la concentration qu'impose la traversée du "rail des cargos". D'autant plus qu'il n'était pas détectable par les autres bateaux avec la perte de son système de radar. Une zone où le trafic maritime est important entre le Cap Finistère et Ouessant.
"C'est l'excitation à fond. Je n’arrive pas à dormir depuis trois jours parce que je ne pense qu'à cette arrivée et en même temps, je me dis surtout n'y pense pas, je ne veux pas que ça me porte la poisse. Donc bref, c'est un peu n'importe quoi. Je ne dors pas parce qu'il faut que je surveille justement. Mais je pense que la dernière nuit va être très longue."
Sans fermer l'œil, le skipper a conclu son troisième tour du monde à la voile en solitaire, sans escale et sans assistance par un dernier karaoké. Exercice régulier qu'il a partagé avec ses supporters, sur ces réseaux sociaux. Ce dimanche matin, il a repris Edith Piaf. Tout sourire et soulagé de voir la fin de cette aventure exceptionnelle, Romain Attanasio nous a partagé tout de même son état physique. "Je me sens fatigué et usé. Franchement, c'était dur. Ces bateaux, ces foilers, ils sont durs quoi. C'est génial de voler avec. Quand on leur a mis des foils, on s'est tous dits, c'est incroyable. On vole au-dessus de l'eau. Mais par contre qu'est-ce que c'est difficile, quoi. Ça tape, c'est hyper brutal, ça accélère aussi fort que ça freine."
Une arrivée à toute vitesse
Seul en mer pendant près de trois mois, l'arrivée est aussi une phase de rupture, un moment hors du temps, qui "défile très vite", décrit-il. "C'est incroyable. Je l'ai fait deux fois déjà. Tout s'enchaîne hyper vite. À chaque fois, c'est à peu près la même heure. Là, c'est un dimanche, mais les deux fois, c'était un samedi matin. On finit la nuit, le jour se lève, on se change, on met des vêtements propres, il faut rajouter les pavillons de course à l'arrière qu'on a enlevé pendant la course. Et puis tout d'un coup, on voit un bateau qui arrive. Il fait demi-tour, il se met à côté. On fait coucou."
Dans son récit, il rapporte l'arrivée successive de plusieurs dizaines de bateaux tout autour du sien. "On coupe la ligne, tous les préparateurs montent à bord. Là, c'est la délivrance. Après, on retrouve notre famille qui monte à bord."
La remontée du célèbre chenal se fera à l'heure du goûter pour le Picard, ce dimanche. Un moment très attendu également par le skipper. "On retrouve les copains qui sont sur le ponton. Après, on monte sur un podium pour aller voir le public. Et après, avant la conférence de presse, on a une demi-heure pour manger ce qu'on a commandé il y a une semaine et ça, je peux vous dire que c'est le meilleur moment", exprime-t-il avec un appétit pressant. Au menu, il a pris une côte de bœuf avec des frites.
Des moments marquant de son 3ᵉ périple
Lors de ce retour sur terre, le marin aura sûrement plusieurs images de ce voyage qui lui reviendront comme des flashs. Comme celle du moment où il a appris le sexe de son futur enfant, un 3e garçon.
Il a aussi souvent navigué dans des conditions difficiles, et s'est même ouvert l'arcade lors d'un des nombreux chocs. Quand on lui demande ses souvenirs, il raconte l'une des dernières galères, lors de la remontée de l'Atlantique. "J'ai eu mon gennaker qui était bloqué en tête de mât, la plus grande voile d'avant. Et quand j'ai réussi à la débloquer alors que je pensais que c'était cuit, c'était un moment de bonheur. J'ai hurlé de joie sur le bateau. Quand j'ai dû monter dans le mât pour justement essayer de le décoincer, que je n'arrivais pas. Là, c'était vraiment horrible."
Un retour sur terre plus ou moins long
Dès demain, le Picard va prendre le temps pour retrouver le rythme des Terriens. Une période de transition plus ou moins longue. Il y a quatre ans, pour son deuxième Vendée Globe, Romain Attanasio avait mis deux ans avant de refaire une nuit complète, contre un mois et demi, la première fois. "Je ne sais pas comment ça va se passer pour celui-là", rigole-t-il en y pensant. "Après avoir passé trois mois en ne dormant que par tranche d'une heure, c'est hyper difficile de se réadapter. Je suis sûr que la nuit prochaine à terre, je vais me lever plusieurs fois dans la nuit. J'irai regarder mon téléphone, j'irai faire un tour sur le balcon de l'hôtel."
Lors de ces périodes d'insomnies, le marin picard aura peut-être déjà des pensées tournées vers 2028, date du 11ᵉ Vendée Globe.