Dimanche 12 avril, beaucoup de familles avaient prévu de se réunir pour Pâques. Mais à cause du confinement, la plupart des chasses aux œufs sont annulées. Certains chocolatiers picards cherchent des solutions pour maintenir cette fête gourmande, décisive pour leur chiffre d’affaire.
Et si la traditionnelle fête de Pâques était célébrée le 17 mai ? L’idée peut surprendre mais elle est vivement défendue par Xavier Conraux, PDG d’une chocolaterie à Beauvais, dans l’Oise. Avec le soutien de l’Académie française du chocolat et de la confiserie, il a lancé un mouvement sur les réseaux sociaux à travers le mot-dièse #fêtonspâquesle17mai.
Pourquoi le 17 mai ?
"On estime qu’on restera confinés peut-être jusqu’à début mai. Donc le 17, c’est le dernier week-end avant l’Ascension". Avec ce mouvement, Xavier souhaite encourager les Français à soutenir les artisans chocolatiers. "Dans notre esprit, il y a un élément financier et commercial, je ne vais pas m’en cacher, reconnaît le chef d’entreprise. Mais on sait aussi que la chasse aux œufs, c’est important pour les familles. Ce serait aussi l’occasion de fêter la fin du confinement".Jeudi 2 avril, Xavier Conraux s'est entretenu en visio-conférence avec des clients et d’autres chocolatiers pour les inciter à rejoindre son mouvement. En attendant de mobiliser du monde, il a décidé de fermer son affaire pour protéger ses 35 salariés et ses clients. "D’habitude, la semaine de Pâques, on reçoit 3000 clients et cela représente 40% des ventes de chocolats de l’année" précise-t-il. Si le mouvement #fêtonspâquesle17mai prend, le chocolatier pourra peut-être combler une petite partie du trou de sa trésorerie.
Livraisons sur demande
Hélène Pierrugues avait elle aussi fermé sa boutique située près de l’hôtel de ville d’Amiens. "J’ai mis ma vendeuse au chômage partiel pour éviter les contacts" précise-t-elle. Finalement, la chocolatière occupe à nouveau son laboratoire depuis le 31 mars et prépare des pièces en chocolat. "Au début, je pensais ne rien faire pour Pâques, confesse Hélène, qui avait pourtant reçu toute la matière première nécessaire pour réaliser ses créations. Puis j’ai eu beaucoup de demandes par téléphone et sur les réseaux sociaux donc j’ai décidé de produire quelques chocolats pour faire plaisir à mes clients".Cette année, elle propose une gamme limitée qui peut être directement livrée au client à partir de 30 euros d’achat et dans un rayon de 20 kilomètres. "Je n’ai jamais voulu faire beaucoup de chiffre, là c’est plus un service rendu aux clients qui passent commande par téléphone ou mail, précise la chocolatière. C’est vraiment pour qu’ils aient une petite douceur".
De son côté, Hélène Pierrugues n’a pas l’intention de célébrer Pâques le 17 mai : "Pour moi ce sera passé, je ne reviendrai pas dessus". En revanche, elle reste confiante pour l’avenir de sa boutique : "Je pense que ça ira mais je vais devoir faire attention le reste de l’année".
Le confinement pendant Pâques, c’est la double peine
Jean-François Féron avait également fermé ses deux boutiques de Compiègne et de Soissons avant de se raviser : "Notre production de chocolats n’est pas vraiment essentielle mais vu que nous sommes autorisés à rester ouvert, on ne voulait pas prendre le risque de se voir refuser le chômage partiel".
Contrairement à sa consœur amiénoise, Jean-François est très inquiet pour l’avenir. "Pâques représente 25% de notre chiffre d’affaire annuel, c’est une perte considérable, c'est la double peine. Normalement, on fait un mois de chiffre d’affaire pour le seul samedi de Pâques, ce qui ne sera pas le cas cette année". La semaine précédant cette fête, les 7 employés de Jean-François font d'habitude tourner la boutique non-stop de 10 à 19 heures. "En ce moment, on travaille seulement de 9 à 13 heures" soupire-t-il, lui qui avait déjà commencé à préparer Pâques dès le mois de février.
Des commandes par téléphone
Pour rendre service aux gourmands et faire rentrer un minimum d’argent dans la caisse, le chocolatier a développé une gamme restreinte de chocolats de Pâques, "15 références au lieu de 40 habituellement". Pour les récupérer, les clients doivent prendre rendez-vous par téléphone afin de contrôler les allées et venues dans le magasin. Pour l’instant, Jean-François Féron s’est arrangé avec sa banque pour endiguer provisoirement le manque à gagner. Mais il le sait, pour sortir de cette crise, il devra sans doute s’endetter. "Si après cette crise, on casse une machine ou on a le moindre souci, la trésorerie ne le supportera pas".
Loin de se laisser abattre, le chef d’entreprise a rouvert sa boutique soissonnaise ce mercredi 2 avril. Ce qui lui a permis, un cours instant, de retrouver ses vieilles habitudes : "Pendant quelques heures ce matin-là, on a eu plein de choses à faire, on a ressenti du stress. On s’est senti en retard et ça fait beaucoup de bien !"