Aline Debeaurain et Sophie Levé sont les mamans d'enfants autistes. Elles témoignent du long parcours semé d'embûches qu'elles ont vécu ces dernières années avec leurs fils. Des difficultés qui les ont conduites à créer une association, "Nos P'tits Mômes".
C'est une aventure avant tout familiale qu'Aline Debeaurain et Sophie Levé nous racontent. À la fin du confinement, les deux mamans se contactent pour que leurs filles, camarades de classe, puissent jouer ensemble. Elles découvrent alors qu'elles se trouvent dans la même situation de parcours de diagnostic d'autisme pour leurs fils, Marceau et Aaron.
Aline et son mari, tous les deux éducateurs spécialisés, se rendent compte pendant le confinement que Marceau a un "souci". "Il régressait, il disait quelques mots, puis plus rien. Il ne répondait pas à son prénom", raconte Aline. Leur médecin préconise un bilan ORL. S'ensuit une visite à la protection maternelle et infantile qui confirme que leur petit garçon n'est pas dans l'interaction avec les autres.
Sophie, qui travaille dans le commerce, et son mari, qui est aussi éducateur, constatent les mêmes troubles pour Aaron, il avait une hypersensibilité auditive. "À l’école, il jouait avec les autres enfants, mais ça a été compliqué dès les premiers jours. Il ne répondait pas à la maîtresse. Il se sauvait de la classe, grimpait partout", se souvient Sophie." Très vite, les deux femmes se trouvent des points communs dans l'annonce de cette découverte.
Comment réagir face à cela, comment et par quoi commencer dans ce genre de situation ? Toutes les projections qu'elles ont faites sur leur famille se voient perturbées. Mais qu'importe : "OK, ça sera différent, mais on va le faire."
Le diagnostic
Après un marathon médical, une multitude de rendez-vous avec des professionnels de santé seront nécessaires pour poser le diagnostic. Aline raconte un bilan ORL plus que compliqué, car le médecin n'arrive pas à ausculter Marceau, et c’est à l’issue d’un autre rendez-vous, chez un spécialiste sur Amiens, qu'on leur apprend que leur fils n’est pas sourd, mais autiste. Le diagnostic a été ensuite fait avec le centre médico-psychologique. "Nous ne sommes jamais vraiment préparées, souligne Aline, mais cela ne change pas votre enfant."
Les démarches
Une nouvelle épreuve attend les deux mamans, "Sophie, qui n'est pas dans le même domaine professionnel qu'Aline, était complètement perdue". Il faut en effet faire des démarches administratives auprès de la Maison départementale des personnes handicapées, de l'Éducation Nationale et des professionnels de santé, afin d'accompagner au mieux les garçons. C'est à ce moment-là qu'elles décident de créer l'Association Nos P'tits Mômes.
La vie quotidienne
L'annonce du trouble autistique a bouleversé la vie de ces deux familles. À l'école, les enfants ont besoin d’un AESH (Accompagnant d’élèves en situation de handicap). Il faut aussi se confronter au regard des autres : "Rien n’est simple, que ce soit à la maison ou à l’extérieur. Nos enfants ne peuvent pas, par exemple, participer à la fête des écoles avec leurs copains, car il y a trop de monde et trop de bruit."
Idem dans les magasins dans lesquels parfois, les jeunes autistes peuvent déclencher une crise parce qu'ils n’arrivent pas à gérer leurs émotions, comme lors d'un temps d’attente trop long. De fortes lumières ou de la musique peuvent aussi provoquer une crise. Et il faut quelquefois affronter le regard des personnes les faisant passer pour de mauvais parents.
On devient éducateur, accompagnant, taxi. Le rôle de parent est moindre, alors qu'on a plutôt envie que ce soit l'inverse, comme dans toutes les familles. C'est important qu'on puisse se soutenir entre nous.
Aline Debeaurain et Sophié Levé, mamans d'enfants autistes
"On essaie de tout anticiper. Comme la société ne va pas s’adapter à eux, c’est à nous de nous adapter. Il faut aussi se confronter au regard des autres, c'est ce qui est parfois le plus difficile", racontent les mamans. Et il faut aussi, bien sûr, continuer à s'occuper des grandes sœurs.
>> Écouter le podcast avec Aline Debeaurain et Sophie Levé ci-dessous.
L'association Nos P'tits Mômes
L'association voit le jour fin 2021, elle vise à orienter, guider, former, informer les familles, professionnels et grand public sur la prise en charge du TSA (trouble du spectre de l'autisme) et à récolter des fonds, pour financer des prestations comme des stages intensifs ABA non pris en charge par la Sécurité sociale par exemple.
La création a été comme une évidence pour les deux mamans. "Pour ceux qui ne connaissent pas le milieu du handicap, c'est le parcours du combattant, explique Sophie. "La difficulté des prises de décisions auxquelles nous sommes confrontées, comme "faut-il l'inscrire dans un parcours scolaire type, faut-il l'inscrire dans une unité pour autiste, que va-t-il se passer après", n’est pas facile."
Le premier évènement de l'association a été la mise en place du premier forum de l'autisme à Abbeville. Il a permis de réunir les acteurs locaux qui peuvent aider dans la prise en charge des enfants diagnostiqués pour des troubles autistiques, avec des professionnels de santé, des établissements médico-sociaux et des associations.
Nos P'tits Mômes continue de développer ses activités en nouant des partenariats pour favoriser l'intégration des enfants autistes et en organisant des temps de rencontre entre familles. Elle a pour projet d'organiser un ciné débat le 11 avril à Abbeville. Le film projeté sera En tongs au pied de l'Himalaya, au cinéma Rex.

Retrouvez l'intégralité de l'émission Hauts féminin avec Aline Debeaurain et Sophie Levé et les autres épisodes de l'émission sur france.tv et en podcast.