Amiens saigne par 1000 blessures. L’antique cité picarde, naguère si joyeuse, devient la ville de la résignation et du silence. »
Cet article est paru en 1918 dans le Petit Journal. De fait, Amiens a tout connu de la guerre : occupation, allées et venues des alliés, et puis bombardements. La ville fut alors évacuée.
Les Allemands traversent Amiens le 31 août 1914. Treize notables sont pris en otage, puis libérés. Une contribution de 160 000 francs est exigée, des marchandises sont réquisitionnées. La commande de 20 rouleaux de papier hygiénique provoque l’hilarité des habitants, une fois l’ennemi reparti.
Ces fugaces occupants sont décrits comme impérieux, mais courtois et disciplinés. La guerre dure. Le Progrès de la Somme écrit : « Souvenons-nous et sachons haïr. Qu’une haine éternelle soit le châtiment de leurs crimes.»
Amiens se peuple de combattants venus du monde entier et le front est à trente kilomètres. Un front dont soldats et officiers se soustraient aux tranchées dès qu’ils le peuvent. L’auto-stop fait fureur et les amènent jusqu’à la civilisation, ou l’idée qu’ils s’en font.
Le correspondant de guerre Philip Gibbs décrit ces jeunes gens qui se plaisent à dépenser sans compter avant de mourir. Ils achètent savon, rasoir, chemises, disques, et flirtent en rougissant avec les filles aux yeux brillants installées derrière le comptoir. D’autres, plus aventureux, fréquentent les prostituées.
Dans le jardin des plantes de la ville, Monsieur Francfort, adjoint au maire, organise des ventes de légumes. Les prix des denrées flambent. Pour contrer les mercantis, des pommes de terre sont achetées en Bretagne. La première distribution tourne à la foire d’empoigne. La population sera évacuée au printemps 1918 et la ville ravagée par les obus.
Toute la collection des 670 vidéos Histoires 14-18