Un casque connecté pour prévenir les commotions cérébrales dans le hockey sur glace : "c’est un fléau dans les sports de contact"

En hockey sur glace, Amiens teste depuis le début de la saison de la Ligue Magnus, le port du casque connecté. L'objectif est de récolter des données médicales au cours des matchs de championnat afin de prévenir les commotions cérébrales dans une discipline où les chocs cérébraux sont nombreux.

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Un casque révolutionnaire porté par les Gothiques d'Amiens. Depuis le début de cette saison 2024-2025, les joueurs du club amiénois de hockey sur glace portent un casque nouvelle génération. Si en apparence rien ne semble avoir changé, en regardant de plus près, on peut voir un capteur fixé sur ces protections pour la tête.

Comme dans de nombreux sports, ce petit objet capte un nombre important de données. Dans ce cadre, il sert à récolter des informations sur la régularité et l'intensité des chocs cérébraux subis par les hockeyeurs. L'objectif est ainsi de prévenir les commotions cérébrales. Elie Marcos, le manager des Gothiques, évoque : "le risque des commotions cérébrales, c'est la répétition. Elles laissent des traces indélébiles au niveau du cerveau."

Avec cette technologie, le manager souhaite "avoir des joueurs sur la glace en bonne santé, capable de jouer. Et qu’ils soient en bonne santé aussi pour l’après-carrière."

On sait que c’est un fléau dans les sports de contact. C’est très dur à déceler dans l’ensemble.

Bastien Maïa, attaquant des Gothiques d'Amiens

Pendant les matches, Bastien Maïa, attaquant des Gothiques, affirme ne sentir "aucune différence" au niveau des sensations, malgré la présence du capteur intégré à l'arrière du casque. Il voit cette initiative d'un bon œil. "On sait que c’est un fléau dans les sports de contact. C’est très dur à déceler dans l’ensemble. Même pour un médecin, ce ne sont pas des choses qui sont visibles extérieurement. Si ça peut aider pour prévenir, c'est une bonne chose."

Cyrille Capel, neurochirurgien au CHU d'Amiens, confirme les propos de ce dernier. "Aujourd’hui, la commotion cérébrale, on ne sait pas forcément énormément de choses". Le capteur va ainsi permettre d'avoir un point de vue "plus quantitatif". Il n'y a pas qu'un impact spécifique qui va être scruté. "On va regarder aussi les précédents pour voir si l'effet cumulé est important.", souligne le docteur de l'hôpital qui analyse les données des joueurs dans le cadre du projet.

"Il y a aussi des choses beaucoup plus physiques et concrètes. La commotion cérébrale, on sait que si elle est répétée, peut occasionner des dommages cérébraux qui vont être irréversibles. Ce qu'on appelle l'encéphalopathie post-traumatique chronique." Concrètement, cette maladie peut entraîner des troubles de la mémoire, de la concentration et parfois de manière très sévère. "Ce sont des patients qui vont avoir plus de risques de développer une maladie d'Alzheimer, plus de risques de développer des dépendances et des syndromes psychiatriques", précise Cyrille Capel.

Un outil pour mieux prévenir les commotions cérébrales

Le capteur intégré dans les casques est développé par une entreprise suisse qui commercialise la technologie depuis 2021. Dans le championnat helvète, tous les clubs de l'Élite sont équipés de cet objet. Amiens est le premier en France. La société assure un premier traitement des données avant de les envoyer aux clubs.

Tom Bertrand, le fondateur de la société Bearmind, indique que ces capteurs sont la première version. "On a développé une mousse qui est capable de détecter la force apportée à la tête. Aujourd’hui, tous nos concurrents regardent comme nous le mouvement de la tête quand il y a un impact. On est les premiers à amener l’information de la force qui est apportée à la tête", affirme-t-il.

Ce dernier élément est important pour mieux comprendre des blessures comme les commotions cérébrales. Cyrille Capel souhaite associer ces nouvelles données avec les études IRM qui permettent d'avoir des analyses "très fines en termes de visualisation" afin d'observer "l'architecture des neurones" et l'altération des tissus cérébraux.

Le neurochirurgien explique : "Si on arrive à mettre en lien les phénomènes traumatiques qu'on peut mesurer quantitativement avec cette détérioration du tissu cérébral, on pourra savoir à partir de quel moment il y a une rupture en termes d’autoprotection du cerveau. Et donc là où il faut vraiment protéger le joueur". Il sera alors possible d'arrêter la carrière de l'athlète à temps. Mais, c'est encore "loin", tempère-t-il.

Deux personnes qui vont avoir exactement le même traumatisme, l’un va développer une commotion cérébrale et pas l’autre.

Cyrille Capel, neurochirguien au CHU d'Amiens

Le capteur n'est pour le moment pas encore "un outil de décision" pour stopper un joueur, indique le neurochirurgien. Il va dans un premier temps servir "d'outil pour la reprise" pour "la récupération et pour le retour au jeu".

En effet, Cyrille Capel décrit la complexité de cette blessure. "On sait que deux personnes qui vont avoir exactement le même traumatisme, l’un va développer une commotion cérébrale et pas l’autre. Est-ce que c’est l’effet cumulatif des traumatismes crâniens ou pas ?" Avec ce nouveau capteur inclus dans une analyse multimodale, le neurochirurgien espère pouvoir trouver la réponse dans le futur.

Actuellement, il permet de comprendre "le type d'impact" et "la sévérité" de celui-ci. Il prend l'exemple d'un joueur ayant eu un choc sévère. "On peut le comparer par rapport à l’ensemble des impacts qu’il a eus. Là, c’est l’impact le plus important […] on voit également le mécanisme de choc". En l’occurrence, une rotation de la nuque et une inclinaison latérale. Ces chocs, "c’est vraiment ce qu’on voit comme étant les plus à risque de commotion cérébrale". Mais il relativise en disant que le diagnostic commotion n'est pas automatiquement établi. "On va avoir une attention particulière sur ce joueur dès le lendemain" afin de vérifier qu’il n’est pas de symptômes de commotion cérébrale et "amener à faire des tests plus poussés".

Un outil au stade d'appropriation

La société helvète propose par ailleurs "des plannings de récupération, en tout cas de reprise d'activité qui vont être personnalisés" pour permettre au joueur de rejouer. Mais, comme le révèle Cyrille Capel tous les clubs qui utilisent cette solution sont encore au stade de l'appropriation.

Cyrille Capel va rendre un premier bilan à la fin de la saison. Il sera "très médical" et il ne sera pas utilisé pour réaliser un bilan formel sur la capacité d'un joueur à continuer ou pas. "Finalement, on n'en sait rien. Donc, il ne faut pas prendre ça comme un outil de prise de décision qui va nous dire stop la carrière. Ça, c'est faux."

En revanche, "plus, on va cumuler les données, au plus ça nous apportera des choses en termes de connaissances de la commotion cérébrale. Notre apprentissage sur la solution. Et puis pour pouvoir aboutir à cet objectif de bien faire, mieux faire et plus rapidement."

Si en Suisse, tous les clubs de hockey sur glace dans l'Élite sont équipés de la technologie, Amiens reste un précurseur en France. L'outil coûte cher et les Picards ont pu bénéficier du soutien d'un de leur partenaire pour pouvoir l'utiliser.

Avec Anthony Halpern / FTV

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