À Bernaville dans la Somme, un médecin vient d'être embauché par la commune. Moins de tâches administratives pour lui et plus de facilités à recruter pour la commune : le modèle semble séduire praticiens et mairies.
Anne Lenglet souffre du bras gauche. Elle attendait depuis trois semaines un rendez-vous chez son médecin traitant. L'arrivée du Dr Harnaran à Bernaville la soulage. "Ça manque les médecins ici. Quand on a des urgences, c'est très difficile. Mon médecin a mon âge et il est souvent malade, le pauvre. Je suis venu ici en désespoir de cause, contente de pouvoir voir un nouveau médecin. Je pourrai continuer avec lui dès que mon médecin partira.", explique la retraitée.
Des médecins surchargés par l'administratif
Un an après le départ du précédent médecin, Heershan Harnaran accueille ses patients trois jours par semaine. Tout le matériel du cabinet appartient à son employeur : la commune de Bernaville. Le nouveau docteur est donc salarié depuis vendredi 6 décembre : "Le salariat me permet d'être tranquille. Je ne m'occupe pas des commandes, des prix, des charges, de la comptabilité, je m'occupe des patients. En libéral, je gagnerai plus avec le manque de médecins, mais je privilégie ma qualité de vie et ma vie personnelle. Je n'ai que le travail de médecin, m'occuper de ma patientèle."
L'administratif, ce docteur en est délesté puisqu'il est géré de l'autre côté de la rue, à la mairie. Depuis la réouverture du cabinet, c'est une secrétaire de mairie qui s'occupe de gérer commandes et comptabilité. Désormais, elle joue le rôle de secrétaire médicale. "Je gère les consultations, les remboursements. C'est moi qui gère l'informatique. C'est très bien pour les administrés de Bernaville, ça apporte un plus. Ça fera du boulot en plus, mais on le fera bien volontiers.", rapporte Valérie Parmentier.
Une solution face aux difficultés de recrutement
Si les habitants sont tant soulagés par l'arrivée du docteur Harnaran, c'est parce que depuis le départ de son prédécesseur à l'automne 2023, il n'y avait plus qu'un seul médecin dans cette maison de santé. Le second a plus de 70 ans, alors tous craignaient de se retrouver sans généraliste.
La mairie a rencontré beaucoup de difficultés pour recruter : "C'est un cabinet de recrutement qui nous a conseillé d'opter pour le salariat parce qu'ils ne trouvaient pas de médecin en libéral. Certains demandaient de lourdes primes d'installation de 30 000 à 50 000 € et pour nous, il n'y avait aucune garantie d'avoir un médecin qui va rester.", raconte Christelle Leclerq, la maire avant d'ajouter : "Nos administrés étaient contents de voir l'arrivée d'un médecin et tous les jours, on recevait des appels pour demander la date de début des consultations. Le carnet de rendez-vous s'est rempli très vite."
En tout, la commune a déboursé 15 000 € pour installer son médecin et supporte seule son salaire. Mais en percevant les paiements des consultations, l'opération est presque rentable.
Un service aussi complet qu'en libéral
En bon médecin de campagne, le docteur Harnaran proposera également des visites à domicile dès vendredi prochain, mais pas uniquement : "Je prends des gardes de médecine générale la semaine et le week-end également. Il faut jouer le jeu même si je suis salarié en structure, ça ne veut pas dire que je ne suis pas médecin. C'est mon devoir de participer à la permanence des soins ambulatoires."
La méthode semble déjà intéresser d'autres communes. Pour l'instant, Bernaville est la seule commune de la Somme à salarier un médecin. Mais d'autres mairies ont d'ores et déjà contacté la mairie pour s'informer sur les procédures afin d'en faire de même.
Avec Gontran Giraudeau / FTV