Brexit : les marins normands pourront-ils pêcher dans les eaux britanniques ?

Avec la sortie du Royaume-Uni de l'Union Européenne, les pêcheurs français craignent de ne plus pouvoir pêcher dans les eaux britanniques. En Normandie, en Bretagne, et en Hauts-de-France, l'impact économique pourrait largement se faire ressentir.

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La sortie du Royaume-Uni de l'UE fait trembler les pêcheurs hauturiers, très dépendants des poissonneuses eaux britanniques. Si le Brexit conduit à pêcher chacun chez soi "on peut revendre le bateau", lâche Xavier Perrotte, commandant en second du Souviens-toi, un chalutier de 23 mètres à quai vendredi à Cherbourg (Manche), à une grosse centaine de kilomètres des côtes anglaises. Le bateau, qui emploie huit personnes, réalise la moitié de ses prises dans les eaux britanniques, précise le marin.

Le Comité national des pêches explique avoir averti par courrier le Premier ministre Manuel Valls que "les régions Hauts-de-France, Normandie et Bretagne" seront "très fortement impactées" par la sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne, approuvée le 23 juin par référendum. 

Mais tous les pêcheurs de la Manche ne sont pas concernés. Les bateaux de moins de 12 mètres sortent rarement des eaux françaises, sauf dans le détroit du Pas de Calais. Or, selon l'établissement public FranceAgriMer, ils représentent 80% de la flotte métropolitaine.

"Pêcher plus loin coûterait trop cher"

Mais en tonnage pêché, le poids des hauturiers (bateaux de plus de 18 m) est loin d'être négligeable. A Cherbourg, la pêche hauturière représente les deux tiers (4.000 tonnes) des apports à la criée. L'inquiétude est donc forte dans les ports où le poids de ces navires est particulièrement important, comme à Boulogne-sur-mer, premier port de pêche français, avec des bateaux qui atteignent parfois 50 m de long.

"Si demain on ne peut plus faire valoir nos droits historiques dans les eaux anglaises, ça peut sonner la fin de la pêche française à Boulogne, l'impact va être énorme", affirme Bruno Margollé, président de la Coopérative maritime étaploise (CME) dans le Pas-de-Calais. 

"On est très inquiets. Si les Anglais récupèrent leurs eaux, on va perdre d'importantes zones de pêche. Pour nous, ça représente 70% de notre activité", renchérit Olivier Leprêtre, président du Comité départemental et régional des pêches maritimes Nord-Pas-de-Calais. Dans cette région, au plus court, il y a 28 km entre la France et l'Angleterre, rappelle-t-il.

Sébastien Sagot, patron d'un chalutier de 24 mètres au Tréport (Seine-Maritime), de passage à Cherbourg, craint "un gros manque à gagner". Pêcher plus loin, à l'est, en mer du Nord, coûterait trop cher en carburant et le matériel des bateaux n'est pas adapté voire, pour certains, pas autorisé près des côtes françaises, explique-t-il.


"Privés de 70 à 80% de nos volumes"

Idem pour Jean-Pierre Le Visage, directeur de la Scapêche, premier armement français de pêche fraîche, pour qui il n'y aurait "pas de solution de repli". "Il est trop tôt pour dire si les conséquences seront dramatiques ", mais "si on parle de nationalisation des eaux britanniques, on serait privés de 70 à 80% de nos volumes", explique le directeur de l'armement qui débarque quelque 11.000 tonnes de poisson à Lorient, dont 9.500 pêchées dans les eaux britanniques.

Du Pas-de-Calais à la Bretagne, tous espèrent que des accords seront trouvés dans le délai que le traité de Lisbonne donne au Royaume-Uni pour sortir de l'Union européenne. L'espoir repose notamment sur le besoin des Britanniques d'écouler leurs produits de la mer sur le marché européen. "Il y a des tas de produits que les Britanniques pêchent et ne consomment pas. Or le tarif de base du droit de douane pour accéder au marché européen, c'est 24%. L'idée serait de dire "à vous l'accès à nos marchés, à nous l'accès à vos eaux", résume Richard Brouzes, directeur général de l'organisation des producteurs de Normandie.
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