AVANT/APRÈS. La tapisserie de Bayeux va bientôt vivre un chantier historique, voici ce qui va bientôt changer

Lors de son déplacement dans la région vendredi 31 janvier 2025, la ministre de la Culture Rachida Dati a annoncé une enveloppe de l'Etat d'environ 13 millions d'euros pour le chantier colossal de la tapisserie de Bayeux. Construction d'un nouveau bâtiment, restauration de la broderie millénaire... on vous dévoile les détails du projet.

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"Dex aïe !" devraient s'exclamer les Normands. L'ancien cri de guerre, à la fois appel à l’aide et encouragement sur le champ de bataille, serait bien utile aux ouvriers qui s'attelleront à la rénovation du musée de la tapisserie de Bayeux. Car le chantier qui les attend dès septembre s'annonce imposant.

La ministre de la Culture, Rachida Dati, l'a confirmé vendredi 31 janvier 2025, lors de sa visite en Normandie. Après un passage au quartier prioritaire de la Grâce de Dieu puis à l'artothèque de Caen dans la matinée, Rachida Dati s'est rendue pour la première fois au musée de la tapisserie à Bayeux, en début d'après-midi.

"C'est un reportage de guerre, de paix et de pouvoir, c'est du cinéma, du journalisme, du dessin", a écrit la ministre de la culture, Rachida Dati, dans le livre d'or du musée de la tapisserie de Bayeux, vendredi 31 janvier 2025. © France Télévisions / Thomas Tavitian

"Parce qu'elle est un chef-d’œuvre, un véritable trésor de l'humanité, cette tapisserie mérite un écrin à sa hauteur", a-t-elle déclaré après sa visite. Et après plus de dix ans d'études, "il est temps de s'y mettre sérieusement".

Malgré les coupes budgétaires de 50 millions d’euros annoncées cette année, le ministère de la Culture accorde une généreuse enveloppe de 13 millions d'euros au musée. Le reste du budget est partagé entre la Région, le Département et la Ville de Bayeux.

"Un choc visuel"

La plus grosse transformation sera celle du bâtiment qui abrite le textile inscrit au registre "Mémoire du Monde" de l’UNESCO et classé monument historique. "C'est un ancien séminaire du 17ème siècle en forme de « u » avec une cour intérieure. Quand on l'a installée ici en 1983, c'est elle qui a dû s'adapter au bâtiment. Cette fois ce sera l'inverse", indique le musée.

"C'est une œuvre monumentale et aujourd’hui on ne peut pas apprécier sa monumentalité", acquiesce Loïc Jamin, maire adjoint en charge des musées, du tourisme et de l'attractivité à Bayeux.

Pour lui rendre sa splendeur et mieux répondre aux prescriptions de conservation, un tout nouveau bâtiment d'une centaine de mètres de long sera construit et présentera l'œuvre sur un support incliné à 60°. 

"Le premier regard se veut être un choc visuel pour le visiteur qui découvrira progressivement l’œuvre en surplomb de la galerie d’exposition avec une vue à 180°", détaille le musée. Ironie de l'histoire, les travaux seront dirigés par une agence anglaise, RSHP, lauréate du concours d'architecture de la ville.

S'adapter au public du 21ème siècle

Le séminaire du 17ème siècle ne sera pas en reste. Il doit être aménagé pour permettre un meilleur accueil du public. Des espaces d’interprétation, des vestiaires, des salles spécifiques pour les groupes scolaires, des salles d’études, un auditorium et une salle d’exposition temporaire doivent être construits en son sein.

Autant d'espaces qui n'existent pas à ce jour. L'accessibilité du musée pour les personnes handicapées sera également revue et corrigée. L'établissement culturel promet "une muséographie adaptée et surtout un accueil enfin possible par la cour d’honneur, réaménagée pour répondre à ces enjeux d’accès pour tous".

Ces transformations doivent aussi permettre de mieux maîtriser le flux de visiteurs : ils étaient 430 000 en 2024, une fréquentation record. Parmi ce plus de demi-million de visiteurs, le musée de la Tapisserie de Bayeux a reçu 140 000 Français, la moitié est composée de Normands ou de Franciliens. Les deux tiers restants sont étrangers, la première place revient à nos voisins britanniques avec 75 000 visiteurs l'année passée.

La bagatelle de 38 millions d'euros est nécessaire pour mener à bon terme ce chantier gigantesque, dont une participation du ministère de la Culture de 9,8 millions d'euros. Les travaux doivent débuter dès septembre 2025 et finir en octobre 2027. Rien n'est laissé au hasard : l'année marquera la célébration du millénaire de la naissance de Guillaume le Conquérant.

Prêter la tapisserie aux Anglais ?

La longue broderie de laine sur toile de lin est une vieille dame du XIème siècle. Même si l'iconographie et les couleurs semblent en excellent état, après plus de 1000 ans d'existence et d'exhibition, elle aurait, elle aussi, besoin d'un petit lustrage. Pas question cependant de faire de grosses modifications, il s'agit surtout de consolider sa structure.

Par exemple rajouter un peu de laine là où la toile est "translucide et fragile" et éviter que le tissu ne tire trop. Sa cure de jouvence sera entièrement financée par l'État, à hauteur de 3 millions d'euros et pourrait peut-être se faire en public dans le nouveau musée.

En janvier, des restauratrices ont déjà enlevé le dosseret à l'arrière de la tapisserie pour la dépoussiérer. "Les textiles sont des matériaux qui attirent particulièrement la poussière et elle peut avoir différents effets délétères sur les œuvres d'art", explique Cécile Binet, conseillère musées à la Direction régionale des affaires culturelles (Drac), dans une vidéo publiée par la préfecture du Calvados. 

La tapisserie de 70 mètres de long et 50cm de haut devrait être conservée en réserve, dans une caisse, jusqu'à la réouverture du musée. "Cela nous plaît moyennement avec monsieur le maire... Nous avons donc soumis à la ministre l'idée de la prêter à nos amis britanniques", ironise le maire adjoint de Bayeux, Loïc Jamin, en ajoutant que l'option devra être étudiée par les scientifiques."Why not ?" 

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