Les exploitantes du Val d'Orne et de Vire ont réalisé un calendrier pour mettre en valeur la place des femmes dans l'agriculture. Elles ont annoncé avoir déjà récolté 5 500 euros, vendredi 6 décembre, au bénéfice des femmes atteintes du cancer du sein.
Tee-shirts roses pétant, bottes de paille et champs à perte de vue. C'est un calendrier peu commun qu'ont voulu proposer huit agricultrices du Val d'Orne et de Vire dans le cadre d'octobre Rose. Avec leur association Agricultur'elles, ces dernières ont récolté 5 500 euros, vendredi 6 décembre, au bénéfice de la lutte contre le cancer du sein.
"5 500 euros, c'est une belle somme ! Nous sommes très fières ! Sur les 500 tirages que nous avions commandés, la plupart sont déjà écoulés", se félicite Céline Juhel agricultrice à la ferme de Rubercy, à Saint-Agnan-le-Malherbe, dans le Calvados.
D'ordinaire, l'agricultrice passe ses journées auprès de ses vaches laitières ou dans les rouages de l'exploitation pour transformer le lait en beurre, crème et teurgoule. Cette fois, elle a troqué les bottes pour passer devant l'appareil photo avec sept autres consœurs de la région. "C'était une superbe expérience, on a beaucoup ri. Comme pour cette photo où l'on a dû installer un sapin et une table de noël au cœur d'une ferme en plein mois de mai, puis poser en étant toutes apprêtées", retrace l'exploitante. En tout, ce sont douze clichés qui jalonnent ce calendrier original, qui souhaitait "mettre en avant les femmes dans la profession".
"Sortir la tête de la ferme"
La mise en place du projet a pourtant connu son lot de difficultés : entre les a priori d'un milieu encore très masculin, les contraintes techniques des exploitations - rythmées par les heures de traites - et les réticences des intéressées,intimidées par l'appareil photo, il a d'abord fallu convaincre. "Mais toutes les filles du groupe se sont très vite prises au jeu !", relève Céline Juhel, qui n'a pas hésité à ouvrir les portes de son laboratoire de préparation du beurre pour la séance photo.
L'agricultrice retient surtout une photo collective, immortalisée dans les champs, où les exploitantes posent bras dessus, bras dessous : "Cela exprime vraiment les fondements de notre association, fondée en 2018 : l'entraide et le soutien entre femmes agricultrices, pour sortir la tête de la ferme, pour se former et porter des projets".
Une première "pour les autres"
C'est la première fois que cette antenne régionale d'Agricultur'elles, animée par la chambre d'agriculture de Normandie, organise une opération "pour les autres" : "Instinctivement on a pensé au cancer du sein. Nous avons autour de nous des amis et de la famille concernés. Et quand on est agricultrices, c'est difficile de se faire remplacer...", évoque Céline Juhel. En France, le cancer du sein représente 33% des cancers féminins.
Derrière l'appareil photo, Aurélie Ruelle a tout de suite adhéré au projet. La photographe, basée à Saint-Remy-sur-Orne, avait déjà une riche expérience sur des projets en lien avec octobre rose. "J'avais réalisé avant le covid un livre qui photographiait dans Paris les danseurs de l'Opéra de Paris, du Lido et de "Danse avec les stars" au bénéfice de la Ligue contre le cancer - une cause qui me tient à cœur", retrace la jeune femme dont les deux grands-pères sont décédés de cette maladie.
Un défi pour la photographe
Mais photographier des agricultrices dans leurs exploitations, voilà qui était une première : "J'ai tout de suite accroché à leur projet, à leurs idées, en y apportant ma sensibilité. J'ai trouvé cela super de les mettre en avant, elles qui évoluent dans un milieu d'hommes et ne sont pas souvent valorisées".
La séance photo s'est déroulée sur deux jours en plein mois de mai : "Il fallait jongler avec la basse luminosité des laboratoires, avec la chaleur dans les granges qui mettait le matériel à l'épreuve et avec des mises en scène pas toujours évidentes", raconte Aurélie Ruelle qui évoque une photo réalisée dans les bottes de foin, à plusieurs mètres de hauteur. "Toutes ont joué le jeu, en s'apprêtant, chacune dans leur féminité, avec leur personnalité".
Un excellent acceuil
Depuis sa parution, le calendrier a fait des émules dans le milieu : "Notre opération a fait parler chez les agriculteurs masculins, qui ont trouvé que c'était une bonne idée !", se réjouit Céline Juhel. Notre calendrier a reçu un excellent accueil et aujourd'hui on réfléchit déjà à nos projets pour l'année prochaine. C'est une façon de montrer que l'on a notre place dans l'agriculture tout en soutenant une bonne cause".
Les derniers calendriers sont en vente dans les antennes de la Chambre d'agriculture et dans les exploitations des membres du groupe au tarif de 12 euros. "J'en ai encore quelques-uns à la boutique de la ferme, il ne faut pas hésiter à passer. Et puis ça permet d'ouvrir le dialogue sur la situation des femmes dans l'agriculture", conclut avec le sourire l'exploitante de la ferme de Rubercy.
