Crues. Pourquoi autant d'Inondations à répétition dans le bassin de l'Epte en Normandie ?

Le bassin de l'Epte et ses 100 000 habitants ont subi trois épisodes de crues en un peu moins d'un mois. Des crues centennales qui deviennent de plus en plus fréquentes. Quelles sont les solutions pour retenir les eaux ? On a posé la question à Jérôme Vrel, président du Syndicat Mixte du Bassin de l'Epte.

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Le mois de janvier 2025 a été un désastre pour les habitants du bassin de l'Epte. Les pluies incessantes de ces dernières semaines ont provoqué d'importantes inondations. Trois en trois semaines.

Des crues centennales censées être exceptionnelles mais devenues malheureusement de plus en plus fréquentes ces dernières années. "C'est lié aux événements climatiques, les épisodes sont plus violents et sur des périodes très courtes" , déplore Jérôme Vrel, président du Syndicat Mixte du Bassin de l'Epte.

On a eu 40 mm d'eau en quelques semaines. Les dernières inondations comme celles-là, c'était il y a 25 ans et leur niveau était même inférieur.

Jérôme Vrel, président du Syndicat Mixte du Bassin de l'Epte

Longue de 112kms, la rivière traverse la région Normandie, l'Ile-de-France et les Hauts-de-France © Sylvain Tocco - France 3 Normandie

Trop de béton

Le bassin de l'Epte s'étend sur 1 500 km². La rivière forme la frontière entre cinq départements et traverse trois régions : la Normandie, l'Ile-de-France et les Hauts-de-France. 

Près de 100 000 personnes vivent sur ce territoire qui, comme beaucoup d'autres a vécu de grandes transformations ces dernières décennies.

Il y a 30 ou 40 ans, des permis de construire ont été accordés sur des espaces naturels importants situés en bord de cours d'eau. S'y sont construits majoritairement des zones d'activités commerciales, autrement dit des supermarchés et des parkings.

Des sols totalement goudronnés qui ne permettent pas aux eaux de pluies de s'infiltrer. "C'est une question d'aménagement du territoire, explique Jérôme Vrel. Les surfaces sont totalement imperméabilisées, il y a davantage de ruissellements et moins d'absorptions d'eau."

Plus assez de pâtures

L'agriculture joue un rôle sur ce territoire très rural. Beaucoup d'agriculteurs sont "sensibles au sujet des inondations". Sur ces dernières années, de nombreux éleveurs, en grande difficulté financière, ont choisi de modifier leurs activités pour se convertir dans les cultures agricoles.

Les grandes pâtures ont alors laissé la place aux champs de céréales. Or, "une surface cultivée absorbe huit fois moins d'eau qu'une surface en herbe", explique Jérôme Vrel, ancien éleveur bovin dans la vallée de l'Epte. 

Dès que les pluies sont importantes, les sols se gorgent d'eau et sont très vite saturés, "le ruissellement est catastrophique".

Un champ de betteraves inondé © I.Amelot

Des eaux polluées

Lors d'épisodes de fortes précipitations et d'inondations, les stations d'épuration sont submergées. Pour Jérôme Vrel, il faut laisser l'eau s'infiltrer mais aussi filtrer les eaux troubles chargées en limon.

"La zone la plus critique c'est l'amont, au-dessus de Gournay-en-Bray. La terre est très argileuse et sableuse. Il y a peu d'infiltration et beaucoup de ruissellements", explique le président du syndicat.

Il y a la couleur brune de l'eau mais aussi ce qu'elle transporte "beaucoup de polluants très dilués, qui vont à la mer", se désole-t-il.

Car l'Epte draine toutes les eaux du bassin. Des eaux particulièrement chargées en phosphates lors des périodes de crues.

Alors comment retenir l'eau ?

Lorsque les pluies sont incessantes comme ces derniers jours, tout l'enjeu est de retenir l'eau le plus haut possible dans le bassin.

"C'est à l'encontre de ce qu'on faisait avant. On a toujours essayé d'amener l'eau le plus vite possible dans la rivière. Maintenant c'est fini, il faut aménager le territoire surtout en tête de bassin", analyse Jérôme Vrel qui milite aussi pour la création de bassins d'extensions de crues. 

Le président du Syndicat Mixte du Bassin de l'Epte est aussi l'un de ses fondateurs. Créé en 2022, il rassemble 200 communes et 10 collectivités territoriales : "On a mis une dizaine d'années pour former ce syndicat mixte. Désormais, on peut travailler ensemble autour de la problématique des inondations, il y a un consensus général" se félicite-t-il.

Le syndicat mène ainsi une étude ambitieuse qui permet de pointer les zones humides du bassin de l'Epte. Elles sont la clé pour limiter les phénomènes d'inondations, "on est maintenant sur des techniques végétales".

Mise en place de zones humides

Finie la création de bassin de rétention, le syndicat travaille sur la préservation des zones humides. "On en entend beaucoup parler pour la biodiversité mais elles sont aussi des éponges et rechargent les nappes phréatiques." 

Ces zones humides permettent de stocker les eaux et de les restituer notamment en période de sécheresse. Jérôme Vrel insiste sur leur rôle indispensable : "on les a détruits, le mal est fait, mais il est encore temps de faire des choses, tout le monde en serait bénéficiaire".

En pays de Bray, on a supprimé des centaines de kilomètres de haies et on n'en a replanté que le quart.

Jérôme Vrel - Président du Syndicat Mixte du Bassin de l'Epte

Autre enjeu primordial : la préservation des haies. Souvent considérés comme trop gênants, ces habitats de biodiversité ont été énormément arrachés avec la mécanisation de l'agriculture. 

Pourtant elles nous rendent service "Elles retiennent les eaux, on en replante beaucoup mais il faut continuer à sensibiliser le citoyen sur leur importance", détaille Jérôme Vrel avant de rappeler les objectifs du pacte en faveur de la haie.

Présenté en septembre 2023 par le Ministère de l'Agriculture, il prévoit d'atteindre 50 000 kilomètres de linéaire de haies sur le territoire français entre 2020 et 2030.

Une haie fraîchement plantée © France 3 Normandie

"Il faut rassembler tout le monde, même les gens qui ne sont pas responsables", explique Jérome Vrel, conscient que cela prendra des mois voire des années avant que les effets positifs de ces aménagements ne soient visibles.

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