La hausse des accidents de trottinettes électriques inquiète les professionnels de santé

La trottinette électrique fait de plus en plus d'adeptes dans nos villes. Certains y voient une évolution positive vers les mobilités douces, d'autres une pratique mal encadrée et dangereuse. Les chiffres affolants des accidents sont éloquents. Exemple au Havre, où les trottinettes électriques sont en libre-service.

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Depuis quelques temps au Havre, chaque jour apporte son lot d'accidentés de la trottinette électrique. A la clinique des Ormeaux, le médecin urgentiste Georges Volait alerte sur le nombre quotidien de victimes. "Depuis un an, on voit deux, trois blessés par jour, c'est vraiment une quantité importante. Si l'on imagine que les services d'urgences de l'hôpital Jacques Monod et de l'hôpital Privé de l'Estuaire en reçoivent aussi, vous multipliez par trois, ça fait rapidement 10, 15 par jour".


Des accidents souvent plus graves que ceux de vélo, compte tenu de la vitesse de ces trottinettes ou EPDM, Engins de Déplacement Personnel Motorisés, parmi lesquels on trouve aussi les gyropodes ou les monoroues. Une trottinette électrique roule souvent à 25km/h quand le vélo dépasse rarement les 15km/h. En conséquence, les traumatismes sont plus importants aussi : beaucoup de traumatismes crâniens graves, fractures du crâne, traumatisme intracérébraux, fractures des membres supérieurs, de la mâchoire, du visage... Le docteur Volait souhaite donc mettre en garde les utilisateurs de trottinettes électriques, en leur rappelant à quel point on est vulnérable en roulant à cette vitesse sans protection, sur une route partagée avec des voitures qui ne vous voient pas toujours. 

C'est un engin ludique et pratique pour se déplacer, mais c'est dommage que ça se termine à l'hôpital avec deux mois d'arrêt, un bras fichu ou un handicap

Georges Volait, médecin urgentiste clinique des Ormeaux, Le Havre

Cette recrudescence d'accidents correspond à la mise en place au Havre, d'un système de libre-service de trottinettes. C'est aussi ce qu'a remarqué le docteur Christophe Moure, chirurgien maxilo-facial à la clinique des Ormeaux, qui opère de plus en plus de blessés. "Lors de l'accident, la roue avant va se bloquer, et le conducteur va faire une chute vers l'avant. On se réceptionne sur les poignées ou sur le visage, on se réceptionne sur le menton, le nez, la pommette, ce qui provoque des fractures au niveau du visage et des maxillaires. Et il faut souvent opérer".

C'est ce qui est arrivé à Marius Jocelin, 22 ans, qui utilise quotidiennement la trottinette pour aller travailler. "Je trouve ça plus rapide que les bus ou les trams, et c'est difficile de se garer là où je travaille. Là je mets 10 minutes. Je suis abonné au service de location de trottinette, et c'est vraiment rentable pour moi. On est nombreux à les utiliser, pour nous c'est une fonctionnalité normale".

Marius, comme les jeunes de sa génération, ne voit pas toujours le danger de ce type de véhicule. Une trottinette est écologique, pratique, amusante, et donne indéniablement un sentiment de liberté. Accidentogènes les trottinettes ? Tout dépend selon Marius, de la façon dont on l'utilise. Et c'est bien là que le bât blesse. "Boire de l'alcool, griller des feux rouges, oui bien sûr ça peut porter préjudice !", poursuit celui qui a eu un accident de trottinette il y a quelques mois, et qui a retenu la leçon. "En rentrant de soirée, j'étais en trottinette électrique et j'ai chuté sur la route, ce qui m'a causé un terrible accident au niveau de la pommette et de la tête. C'était une trottinette en libre-service, on est toujours tenté de l'utiliser pour tout usage. J'ai eu un traumatisme crânien et ne me souviens pas bien, j'ai oublié le choc et ne sais toujours pas ce qui s'est passé. Je me suis réveillé aux urgences".

Aujourd'hui, Marius utilise la trottinette différemment. "Déjà j'essaie de l'utiliser de moins en moins. Si je suis alcoolisé je prends maintenant les transports en commun. Un de mes amis a eu le même accident en trottinette, alcoolisé, et un collègue s'est retrouvé deux jours en réanimation".

Que dit la législation ?

Les pouvoirs publics à travers le ministère de l'Ecologie et de la Transition Energétique ont règlementé l'usage de ces nouveaux modes de mobilités dites douces. Les trottinettes électriques et autres EDP -Engins de Déplacement Personnel Motorisés- sont soumis à la même règlementation, et au code de la route.


En agglomération ces engins ont l'obligation de circuler sur les pistes cyclables s'il y en a, ou sur des routes où la vitesse autorisée ne doit pas dépasser les 50km/h. Les EDPM peuvent se garer sur les trottoirs sans gêner les piétons ni mettre en danger leur sécurité. Mais en aucun cas ils ne peuvent y circuler. Le port du casque n'est pas encore obligatoire en agglomération, mais il doit être porté en dehors. Le transport d'un passager est interdit, tout comme le port d'écouteurs ou l'utilisation d'un téléphone. Les EDPM doivent être équipés de feux de position avant et arrière, de dispositifs rétroréfléchissants, d’un système de freinage et d’un avertisseur sonore. Enfin, une assurance sécurité civile est obligatoire, et comme pour les vélos, il est interdit de conduire sous l'influence de l'alcool.

D'après les derniers chiffres de la sécurité Routière, les blessés en trottinette, motorisées ou non augmentent significativement en agglomération. Le nombre de morts aussi, avec 10 accidents mortels en 2019 et 24 en 2021, des chiffres liés à l'augmentation du nombre de trottinettes électriques en circulation. 

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