L'association UFC-Que Choisir de Rouen dénonce la présence de polluants éternels, les PFAS, dans l'eau du robinet de Sotteville-lès-Rouen et du centre de Rouen. Face à cette situation, elle appelle à des mesures urgentes pour protéger les consommateurs et limiter l'impact de ces polluants sur la santé publique.
Faut-il arrêter de boire l'eau du robinet dans la Métropole de Rouen ? Dans le cadre d’une étude de l’UFC-Que Choisir et l'association Générations Futures, des prélèvements effectués à Rouen et à Sotteville-les-Rouen révèlent l’omniprésence de polluants éternels dans l’eau du robinet.
Les perfluoroalkylés et polyfluoroalkylés (PFAS), que l'on surnomme vulgairement les "polluants éternels", car impossibles à détruire, sont présents dans la plupart de nos objets du quotidien tels que les poêles antiadhésives, les vêtements imperméables ou encore dans certains emballages alimentaires et de produits de beauté.
Les prélèvements réalisés dans la métropole de Rouen montrent des concentrations de :
- TFA (acide trifluoroacétique), un résidu de dégradation des pesticides PFAS et d’autres produits chimiques éternels, à la teneur de 250ng/l pour Rouen-centre et de 110ng/l pour Sotteville-les-Rouen.
- De 2 autres PFAS pour Rouen centre
• PFOS : 22 ng/l
• PFHxS : 2,2 ng/l - D’un cocktail de 10 autres PFAS pour Sotteville-les-Rouen
L'UFC -Que Choisir Rouen tire la sonnette d'alarme : "Au vu de ces résultats inquiétants, notre association exige que les pouvoirs publics appliquent des normes véritablement protectrices tout en renforçant les contrôles, et enjoint les parlementaires de Seine-Maritime d’adopter sans délai la proposition de loi visant à limiter les rejets de PFAS dans l’environnement et à interdire leur utilisation dans certains produits de consommation."
VIDÉO. Le reportage d'Amandine Pointel, François Pesquet et Stéphanie Pierson

Faut-il s'inquiéter ?
Les PFAS sont dites "dangereuses" car associées à divers risques pour la santé, notamment des cancers, des troubles hormonaux et des problèmes de fertilité.
Mais suite à ces prélèvements d'UFC-Que choisir, faut-il s'alarmer ? La norme européenne s'élève à 100 nanogrammes par litre pour 20 PFAS. Si on ajoute les TFA, elle s'élève à 500 nanogrammes par litre. "Les chiffres montrent clairement une contamination mais pas une pollution (en absence des chiffres complets)", rassure Matthieu Fournier, hydrogéologue, spécialiste des ressources en eau et maître de conférences à l'université de Rouen.
"Pour les autorités françaises, ‘RAS’ sur le prélèvement des communes de Rouen et de Sotteville-les-Rouen, explique UFC-Que Choisir. S’agissant du TFA, comme il n’est pas recherché dans les plans de contrôles officiels ordinaires, sa présence éventuelle passe actuellement sous les radars."
"Les taux sur les 20 PFAS sont plus ou moins conformes à ce que l'on retrouve ailleurs en France et sont en dessous de la norme de 100 ng/L", rassure Emilie Rosso, journaliste de la rédaction de France 3 Rhône-Alpes, nommée pour le prestigieux prix Albert-Londres pour son enquête réalisée sur les PFAS.
"Les résultats sur le TFA sont en revanche une première. Il n'y a aucune donnée publique sur le TFA en France car il est rarement recherché. Cela étant, la norme européenne pour tous les PFAS est de 500 ng/l, on serait donc en dessous", nuance notre collègue.
"Quant aux autres PFAS, si l’on prenait la norme bien plus protectrice pour les consommateurs, que le Danemark appliquera en 2026 (à savoir 2 ng/l pour la somme de 4 PFAS), alors les prélèvements de Rouen-centre et Sotteville-les-Rouen seraient également considérés comme non conformes sur ce critère", poursuit UFC Que-Choisir.
Les TFA, le PFAS le plus répandu
L'association demande d’intégrer la recherche du TFA au plan de contrôle officiel et d’adopter des normes plus protectrices sur la présence des PFAS dans l’eau du robinet, en se basant sur des données toxicologiques récentes et exige l’interdiction de production et de distribution de tout pesticide considéré comme PFAS.
Le TFA est un composé chimique, surnommé le plus petit des polluants éternels, mobile et extrêmement persistant dans l’environnement.
Selon une étude menée par des scientifiques scandinaves et suisses, le TFA est principalement issu de la dégradation de certains pesticides et de gaz fluorés utilisés dans les systèmes de climatisation et de pompes à chaleur, "ce PFAS à chaîne ultracourte s’impose comme un enjeu environnemental et sanitaire."
Le rôle des industriels en question
L'étude souligne également les rejets massifs de PFAS par des usines comme celle de BASF à Saint-Aubin-lès-Elbeuf, "où des concentrations élevées de TFA ont été relevées dans les effluents". Ces pratiques aggravent une situation déjà critique.
L'association appelle les parlementaires de la Seine-Maritime à agir rapidement pour protéger les consommateurs et l'environnement.
La semaine dernière, de nouvelles données ont été transmises à l'Union des victimes de Lubrizol. Il s'agit de résultats d'analyses des eaux souterraines, dont la pollution avait été révélée en 2023, sous la zone sinistrée et sous l'usine. Des données rassurantes mais qui révélaient la présence de PFAS.
Depuis début 2023, la France a lancé un plan d'action, visant à surveiller la qualité de l’eau et à anticiper les futures réglementations françaises sur les PFAS, attendues pour 2026. En attendant, les ARS ont mis en place des surveillances ponctuelles.