Laurence Blanchard prenait de la Depakine, un médicament contre l'épilepsie, pendant sa grossesse. Ses trois enfants ont tous hérité de malformations congénitales. Un rapport de l'Igas dénonce les errements de l'autorité du médicament dans la prévention contre les risques de ce traitement.
Les trois enfants de la famille Blanchard sont des bébés Depakine. Problèmes gastriques, troubles respiratoires, fort handicap... Chacun d'entre eux souffre de pathologies dues à ce médicament contre l'épilepsie.Laurence Blanchard, la mère, prenait de la Depakine pendant sa grossesse. Pour les deux époux, Sanofi, le laboratoire qui produit ce médicament, n'a pas informé les familles des risques encourus par le foetus.
"Si la Depakine avait été interdite aux femmes enceintes en 1989 comme un autre médicament, cousin de la Depakine, nos enfants ne seraient pas dans cet état là", enrage Laurence Blanchard, membre de l'association qui lutte depuis cinq ans pour la reconnaissance du lien entre des cas de malformations congénitales et la prise de cet antiépileptique pendant la grossesse, l'Apesac.
Un nouveau scandale médiator ?
Mise sur le marché en France en 1967, la Depakine est accusée dès 1982 d'avoir des effets néfastes sur le fœtus sans que cela alerte les neurologues. Aujourd'hui, ses dangers sont résumés dans une notice accompagnant le médicament.L'Igas dénonce alors dans son rapport, publié le 23 février, le "manque de réactivité des autorités sanitaires et du principal titulaire de l'autorisation de mise sur le marché". Cette situation "interroge plus globalement l'organisation du système de pharmacovigilance en France".
Car, selon les estimations de l'Igas, "ce sont entre 425 et 450 cas de naissances d'enfants vivants ou mort-nés exposés in utero au valproate entre 2006 et 2014 qui sont porteurs de malformations congénitales" en France. Au moins le double, si l'on en croit les associations.
Pour Charles-Joseph Oudin, l'avocat de 200 familles de victimes, tout est réuni pour l'éclatement d'"un scandale très grave". L'affaire a en effet de quoi rappeler celle du Médiator : un produit ancien, des "informations dissimulées" et l'inertie des autorités de régulation mise en accusation.
Un reportage de Gilles Coulon, Didier Bonnet et Catherine Collin :
Un reportage de Gilles Coulon, Didier Bonnet et Catherine Collin
Plus de 93.000 femmes en âge de procréer prenaient de la Depakine en 2014 en France. Le ministère de la Santé réfléchit à la mise en place d'un fonds d'indemnisation, comme pour le Mediator.