Sur le littoral atlantique, des Sables d'Olonne à l'estuaire de la Gironde, certaines plages font l'objet d'un suivi méticuleux de leurs déchets en plastiques. La plage de la Coubre, en Charente-Maritime, est ainsi passée au crible quatre fois par an. Objectif : comprendre les sources de pollution pour mieux réglementer les usages.
Comme presque partout dans le monde, la pollution plastique gagne du terrain en France, jusque dans les espaces protégés.
Après l'été et son flot de touristes, sur la plage abandonnée de la Coubre, en Charente-Maritime, coquillages et crustacés font la part belle aux bouteilles et autres emballages à usage unique, ainsi qu'aux déchets liés à la pêche. Située sur la commune des Mathes, dans le parc naturel marin de l’estuaire de la Gironde et de la mer des Pertuis qui s'étend sur 6 500 km2 d'océan et de plages, la flèche sableuse de la Coubre est l'un des dix sites suivis pour évaluer la pollution par les déchets.
Dans ce qu'on retrouve, il y a très peu de verre, très peu de bois, à 90 % c'est du plastique qu'on va retrouver parmi les déchets qu'on collecte.
Aurélie Lassus-DebatChargée de mission qualité de l’eau pour le parc naturel marin de l’estuaire de la Gironde et de la mer des Pertuis
Depuis 2018, une partie de la zone est auscultée quatre fois par an par les équipes de l'Office Français de la Biodiversité. Une petite portion de la plage, toujours la même, localisée par GPS, est passée au crible selon un protocole très strict, à marée basse et dans des conditions météorologiques précises.
Le terrain en question est quadrillé avant d’être inspecté au tamis et à la truelle pour repérer les microdéchets. "On recherche des déchets qui font moins de 2,5 centimètres", explique Yohann Cerisier, agent de l'unité opérations pour le parc naturel marin. "Il faut avoir de bons yeux, prendre le temps."
Du plastique dans la nature
Les objets plus volumineux sont également collectés, et l'ensemble est rapporté au siège de l'Office français de la Biodiversité (OFB), à Rochefort, pour être trié.
Les déchets de taille inférieure à 2,5 centimètres sont expédiés au CEDRE (Centre de documentation, de recherche et d'expérimentation sur les pollutions accidentelles des eaux). Ce laboratoire spécialisé analyse la collecte et transmet les résultats et les données à l'OFB.
Les plus gros déchets sont pour leur part inventoriés et soigneusement compilés dans des bases de données. "Dans ce qu'on retrouve, il y a très peu de verre, très peu de bois, à 90 % c'est du plastique qu'on va retrouver parmi les déchets qu'on collecte", souligne Aurélie Lassus-Debat, chargée de mission qualité de l’eau pour le parc naturel marin de l’estuaire de la Gironde et de la mer des Pertuis.
De fait, les objets liés à la pêche et à l'aquaculture, tels que des filets, représentent 30 % des déchets ramassés, et les fragments de plastiques divers constituent un quart du butin glané sur la plage. Viennent ensuite les déchets à usage unique et les emballages alimentaires, comme des pots de yaourt, des bouchons ou des bouteilles.
Comprendre la pollution pour l'endiguer
Sur cette zone déterminée de 100 mètres sur la plage de la Coubre, les résultats des collectes varient d'une année à l'autre. En 2023, 17 860 déchets ont été ramassés, contre 5 500 en 2022 et 40 000 en 2021.
L'intérêt est certes de débarrasser les espaces naturels de cette pollution d'origine humaine, alors que huit millions de tonnes finissent chaque année dans nos océans. L'analyse de cette collecte permet en outre de déterminer ses origines, les usages qui y sont liés, mais également la manière dont elle se déplace dans l'environnement, avec le vent ou les courants marins par exemple. L'objectif est en fin de compte de mettre en place des mesures et des actions pour limiter cette pollution et ses causes.
"Aujourd'hui, on produit 460 millions de tonnes de plastique alors que dans les années 70 on en produisait seulement 35 millions de tonnes", alerte Aurélie Lassus-Debat. "Il y a un réel enjeu à produire beaucoup moins de plastique."
Malgré de nombreuses alertes, la production de plastique est pourtant en hausse. Au rythme actuel, elle pourrait atteindre un milliard de tonnes d'ici à 2060.
Un problème global
La réduction de cette pollution reste un enjeu environnemental, mais également de santé publique, car on ingère et inhale entre 0,1 et 5 g par semaine. L'exposition se fait à travers nos modes de consommation, mais également à travers les déchets que nous produisons alors que seuls 10 % du plastique est recyclé.
Dans ce contexte, les regards s'étaient tournés vers Busan, en Corée du Sud, pour la cinquième session de négociations en vue d'un traité international contre la pollution plastique.
Pour lutter contre cette pollution, deux visions s'opposent : d'un côté, les pays producteurs de pétrole (le composant de base du plastique), comme la Russie, l'Arabie saoudite et l'Iran, souhaitent poursuivre la production en défendant simplement le recyclage. De l'autre, des nombreuses nations comme les membres de l'Union européenne, le Canada ou l'Australie, estiment qu'il faut absolument infléchir la production.
Ces négociations viennent d'échouer, mais elles devraient reprendre en 2025.
"Le meilleur déchet est celui qu'on ne produit pas"
Si une action globale est nécessaire pour endiguer cette pollution, des démarches individuelles existent.
En tant que consommateur, il est possible de limiter le recours à des emballages à usage unique : éviter l’eau en bouteille, acheter en vrac, utiliser des sacs en tissus ou des contenants en verre.
Aujourd'hui, on produit 460 millions de tonnes de plastique alors que dans les années 70 on en produisait seulement 35 millions de tonnes.
Aurélie Lassus-DebatChargée de mission qualité de l’eau pour le parc naturel marin de l’estuaire de la Gironde et de la mer des Pertuis
Alors que la période des fêtes approches, il peut aussi être intéressant de privilégier les jouets en bois sous le sapin.
Pour aller plus loin, l'association Zero Waste France prodigue de nombreux conseils.