Tracking or not tracking ? Là est la question pour le gouvernement qui travaille sur la mise en place d'une application mobile de traçage numérique. En Poitou-Charentes, les avis des responsables politiques vont plutôt vers un refus.
Suivre à la trace les Français par le biais de leur téléphone portable pour lutter contre les risques de propagation du coronavirus, voilà ce que propose la technique du tracking.
Une initiative indispensable pour les uns, une violation des libertés individuelles pour les autres.
Afin d'y voir plus clair, nous avons demandé à des élus locaux ou des responsables politiques en Poitou-Charentes ce qu'ils en pensent.
"Un recul de nos libertés"
Et c'est avant tout un vent de fronde qui semble gagner les députés macronistes de Poitou-Charentes. Le député de la Vienne, Sacha Houlié, estime en effet que le tracking ne doit pas être appliqué.Selon lui, "le recours à un tel dispositif sera de toute façon inefficace et le Secrétaire d'Etat l'admet à demi mot ! Il y a 13 millions de Français non équipés ou en difficulté avec les technologies soit près d'un quart de la population et principalement ceux qui sont les plus vulnérables."
Le tracking contrevient à nos valeurs morales et philosophiques et créé un précédent qui sera sans retour. Par la peur, on consent un recul de nos libertés, donc la volonté exprimée (l'application ne pourra pas être obligatoire) ne l'est que sous la contrainte et demain, on voudra une appli pour le risque technologique ou le risque terroriste.
- Sacha Houlié, député (LREM) de la Vienne
Même défiance vis-à-vis du traçage numérique pour Guillaume Chiche, député LREM des Deux-Sèvres, interrogé ce midi dans le journal de France 3 Nouvelle Aquitaine (voir la vidéo), il va même plus loin en estimant que "c'est la voie à une certaine forme de ségrégation".
Plutôt dépister que pister !
Interrogé par téléphone, Didier Quentin, député (Les Républicains) de Charente-Maritime et ancien maire de Royan, avoue ne pas avoir d'avis arrêté. La question, précise-t-il, est d'une rare complexité et d'une rare confusion.
Guillaume Chiche était l'invité de Serge Guynier dans le JT 12/13 ce vendredi 10 avril :Je trouve que beaucoup de gens prennent la parole à ce sujet sans vraiment savoir. Il est urgent d'attendre le débat à l'Assemblée Nationale.
- Didier Quentin, député (Les Républicains) de Charente-Maritime
Curieusement, il faut aller vers les écologistes d'Europe Ecologie - Les Verts pour trouver le discours le moins virulent.
Hier déjà, Yannick Jadot, le député européen EELV, déclarait à Télématin que l'utilisation du numérique comme un outil pour combattre cette pandémie ne lui paraissait pas un scandale, "à condition qu'il n'y ait pas de géolocalisation, ni de stockage des données et un accès du code source à des organisations citoyennes pour être sûr que ça ne devienne pas un système de surveillance de masse", a-t-il rajouté.
Du côté de EELV Poitou-Charentes, le ton est un peu plus tranché. Dans un communiqué publié aujourd'hui, ils estiment que "le tracking numérique est un outil, qui n'apporte rien de plus, et notamment parce qu'une partie de la population n'est pas équipée suffisamment et c'est justement les plus démunis qui sont aussi les plus en danger". Et de conclure :
Rejet total pour les uns, demande de débat explicatif pour d'autres, intérêt tout relatif enfin pour certains... Le traçage numérique voulu par le gouvernement trouve donc peu de supporters dans la classe politique en Poitou-Charentes où beaucoup préfèrent visiblement être dépistés que pistés.Le tracking met le citoyen dans une position de suspect, et de plus donne une illusion de sécurité qui pourrait faire oublier les gestes barrières.
- EELV Poitou-Charentes