Au soir du drame survenu dans la collégiale Saint-Martin de Brive où un homme nu et armé d'un couteau a été abattu par la police, la procureure de la République Florence Leroux-Ghristi a annoncé l'ouverture d'une enquête pour homicide volontaire par personne dépositaire de l’autorité publique. Ce choix peut paraître sévère, c'est pourtant la procédure habituelle pour déterminer avec certitude les conditions de la légitime défense.
Pourquoi une enquête pour homicide volontaire a-t-elle été ouverte à l’encontre des policiers qui ont tiré sur un homme nu et armé à Brive ce mercredi 22 janvier ? C’est en fait la règle, et, si l’homme avait été seulement blessé, une enquête aurait pu être ouverte pour "violences volontaires aggravées".
Témoignages et vidéos
Il faut maintenant enquêter pour déterminer si les policiers ont tiré en état de légitime défense, et cela peut prendre du temps. Florence Leroux-Ghristi, procureure de la République de Brive, l’a évoqué mercredi 22 janvier, dans sa conférence de presse : "Les policiers qui ont tiré seront entendus pour déterminer de façon précise dans quelles circonstances ce monsieur a été amené à les mettre en danger."
L’inspection générale de la police nationale (IGPN) a été saisie. Elle devra entendre les autres témoins et visionner des vidéos : en principe, dans chaque équipage de police, l’un des fonctionnaires porte une caméra, fixée sur le torse.
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"Ça choque, mais c'est la procédure"
Pour Laurent Nadeau, représentant du syndicat de police Alliance Haute-Vienne, cette situation est forcément difficile à vivre pour les policiers impliqués : "Ça choque, mais c’est la procédure qui le veut. Il n’y a aucun policier qui se lève le matin et qui est préparé à faire usage de son arme et à tuer quelqu’un". Il justifie tout de même cette procédure : "Techniquement, un homme est mort tué par des policiers. Mais ça va se transformer en légitime défense, si tout est carré."
Dans quel cas un policier peut-il tirer avec son arme ? Il faut lire l’article L. 435-1 du Code de la sécurité intérieure : il explique qu’un policier ou un gendarme dans l’exercice de ses fonctions peut faire usage de son arme "en cas d'absolue nécessité et de manière strictement proportionnée".
Légitime défense ?
Il y a ensuite plusieurs cas de figure. Pour une légitime défense, il faut une mise en danger imminente et immédiate, pour soi-même ou pour autrui. Selon les premières informations dévoilées par la procureure de la République, l’homme "s’est avancé vers les policiers en les menaçant et en brandissant son couteau dans leur direction, manifestant son intention de les agresser." C’est cet élément qu’il faut maintenant vérifier.
Les policiers peuvent aussi tirer dans le cadre d’un "périple meurtrier" : on a le droit de stopper un individu qui court avec une arme et qui a déjà tué. Cette situation peut se produire lors d'un attentat, mais à ce stade de l'enquête, rien ne montre que c'était le cas à Brive.
Prochaine communication le 27 janvier
L’usage des armes des policiers est très encadré. L'IGPN détaille dans son dernier rapport public : "Les fonctionnaires de police ont l’obligation de rendre compte (...) des tirs réalisés avec leur arme individuelle, qu’ils soient en service ou hors service, dès lors que ces tirs s’inscrivent dans le cadre de l’accomplissement de leurs missions de police". Laurent Nadeau explique qu’il y a systématiquement des formulaires à remplir, même quand on tire en l’air. Seulement 20% des tirs se font vers des personnes jugées dangereuses, les autres se font à l'encontre de véhicules en mouvement, d'animaux qui divaguent, ou pour intimider. En 2023, en France, sept personnes ont été tuées par des tirs de la police.
Dans le cas du drame de Brive, de nombreuses questions restent en suspens. Une autopsie doit avoir lieu ce vendredi 24 janvier. La procureure de la République a prévu de communiquer à nouveau sur l'affaire le lundi 27.