BorgWarner : "Ca va se durcir, on est remontés, on ne se laissera pas faire !" [REVOIR DIMANCHE EN POLITIQUE]

Trois mois après l'annonce de la fermeture du site de BorgWarner à Eyrein en Corrèze, les syndicats ont reçu les premières conclusions d'un rapport indépendant qui fait état d'une "pure stratégie financière". Les trois repreneurs potentiels doivent être annoncés mercredi 30 septembre 2020.

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L’annonce a été faite le 25 juin 2020 et ce fut un véritable choc qui a sidéré les salariés mais aussi les milieux politiques et économiques corréziens. L’équipementier automobile américain BorgWarner a annoncé la fermeture de son usine d’Eyrein pour mars 2022 supprimant 368 emplois.

Alors qu'un premier mouvement de grève a eu lieu début septembre, les négociations avec les représentants du personnel doivent durer jusqu'à mi-décembre.

Pour tenter de comprendre comment ce fleuron du bassin industriel de Tulle a pu en arriver là, quels sont les moyens d’action des salariés, Annaïck Demars reçoit trois invités :

  • Alexandre Brigoulet, salarié depuis 11 ans, délégué CGT
  • Me Jean-Louis Borie, avocat du CSE BorgWarner
  • Sylvain Roch, secrétaire départemental CGT Corrèze 
 


Le nom de trois repreneurs potentiels annoncé le 30 septembre 2020


Le site d'Eyrein fabrique notamment des boîtes de vitesse et travaille à 90% de son activité pour le constructeur Volkswagen. Durant l'été 2020, trois repreneurs potentiels ont visité l'usine. 
 

La direction a demandé qu'on fasse bonne figure, on est très gentils à BorgWarner Tulle, on a fait ce qu'il fallait et après on nous dit rien (...) On ne sait pas qui ils sont. Le 30 septembre, la direction va nous réunir, nous les organisations syndicales et arrêter cette confidentialité

Alexandre Brigoulet, délégué CGT BorgWarner



 Signalons que notre invitation à participer à l'émission envoyée à la direction du site est restée sans réponse au moment de l'enregistrement.
  

Une double procédure 


Selon Jean-Louis Borie, avocat du CSE (Comité Central d'Entreprise) de BorgWarner, la difficulté est qu'il y a une double procédure : il y a d'abord ce qu'on appelle la "loi Florange" qui fait obligation de rechercher mais pas de trouver un repreneur et il y a la procédure de consultation du comité sur le plan social. "Pour moi, on ne peut pas faire autrement que de dissocier les deux : qu'on ait d'abord une phase de recherche de repreneur, et dans un deuxième temps, le CSE peut émettre un avis sur le plan lui-même".

BorgWarner, équipementier automobile américain, emploie 29 000 salariés dans le monde et affichait en 2019 un chiffre d'affaires de 10 milliards d'euros. Son PDG monde est l'ancien directeur du site de Tulle, le Français Frédéric Lissalde. "On a demandé plusieurs fois à le voir, et ça a été totalement refusé de sa part", explique Alexandre Brigoulet.
 


Interrogé en juin 2020 sur les raisons de cette fermeture, Olivier Diss, responsable ressources humaines de Borgwarner Europe, expliquait : "On a des produits à haute valeur ajoutée qui sont maintenant internalisés et qui sont produits par les équipementiers. Il ne nous reste que des produits à plus basse valeur ajoutée. Aujourd'hui il y a une grande concurrence sur les prix et les coûts".

Faux, répondent les représentants du personnel en se basant sur les premières conclusions du rapport d’expertise économique réalisé par le cabinet indépendant SECAFI
 

Les arguments de la direction ne sont pas valables. Clairement, c'est stratégique, ce n'est pas économique, c'est stratégique !

Alexandre Brigoulet, délégué CGT BorgWarner



Pour Jean-Louis Borie, la situation de trésorerie est encore très bonne et il n'y a pas d'urgence à mettre en place un PSE (Plan de Sauvegarde de l'Emploi) : "On a laissé des produits à faible valeur ajoutée, sauf peut-être une vanne pour Volkswagen et tout le reste, c'est des choses sur lesquelles y'a plus de marge".

 

On a utilisé le site de Tulle pour nourrir le groupe jusqu'en 2017, pour faire remonter du cash : c'est la stratégie qui consiste, en apparence, à autonomiser un site. Vous êtes responsables, vous faites ce que vous voulez, vous avez un directeur. Mais on circonscrit le périmètre de son intervention sur des décisions du groupe. Ce sont des choix du groupe de laisser crever Tulle depuis 2017.

Jean-Louis Borie, avocat du CSE BorgWarner

Des politiques mobilisés, mais avec quel poids ?

 
 

On a des élus qui poussent des cris d'orfraie sur les départs annoncés sauf que c'est eux qui ont pondu certaines lois qui réduisent nos moyens d'agir. C'est eux qui ont donné de l'argent sans contrepartie.

Sylvain Roch, secrétaire départemental CGT Corrèze


La fermeture du site d'Eyrein aurait des conséquences économiques lourdes sur le bassin de Tulle, avec 2000 emplois induits.


En Corrèze, les entreprises en difficulté se multiplient ces dernières semaines comme Deshors ou Sud-Ouest Etalages. "On est à 17 000 chômeurs (catégories A, B et C) en Corrèze, et ceux qui perdent leur emploi n'en trouveront pas d'autre" explique Sylvain Roch, délégué départemental CGT. 

Les salariés de BorgWarner, eux, ont le sentiment d'avoir été des "vaches à lait". "On va nous saigner jusqu'au bout, explique Alexandre Brigoulet, on a actuellement plus de 200 intérimaires alors qu'on va être délocalisés en Hongrie!"

 

Là, on n'en est qu'au début, ça va se durcir, on est remontés et on ne se laissera pas faire !

Alexandre Brigoulet, délégué CGT BorgWarner



 
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