En refusant de voter la motion de censure du gouvernement Bayrou déposée par La France Insoumise, le député socialiste de Corrèze et ancien président de la République semble avoir atteint un premier objectif : imposer une alternative à gauche face à Jean-Luc Mélenchon. François Hollande l’explique aujourd’hui dans un entretien à La Tribune Dimanche qui fait réagir la gauche corrézienne.
"Les socialistes constituent désormais le pôle central au sein de l'Assemblée nationale puisque rien ne peut se faire sans eux ni contre eux. Ils ont la clé jusqu'en 2027." Cette déclaration de François Hollande dans La Tribune Dimanche sonne comme une redistribution des cartes dans le paysage politique.
En assumant de négocier avec le gouvernement, le député de Corrèze et ancien président remet en cause la stratégie de La France Insoumise : "Les socialistes ont pris une décision majeure (..). Ils ont récusé la posture de LFI dont la seule perspective est de bloquer la vie institutionnelle et de provoquer une élection présidentielle."
🔵 ENTRETIEN EXCLUSIF — François Hollande :
— La Tribune Dimanche (@TribuneDimanche) January 19, 2025
« François Bayrou ouvre une nouvelle période »
Il aura fallu dix jours de négociations, huis clos et appels incessants pour que François @Bayrou et le @partisocialiste trouvent un terrain d'entente qui permet à la fois au Premier… pic.twitter.com/2rSV2Jg75q
2027 en ligne de mire
François Hollande compare Jean-Luc Mélenchon à Madame Irma, dont les "prophéties ne se réalisent jamais". Il assume de bousculer la promesse d’unité du Nouveau Front populaire : "L'alliance électorale de la gauche a été précieuse en juin dernier pour écarter l'extrême droite. Elle ne peut être instrumentalisée au service d'une seule personne et d'une seule famille politique."
Enfin, il pense à l’élection présidentielle de 2027 sans se porter pour l’heure candidat : "Ce que je sais déjà, c'est qu'il y aura en 2027 deux offres à gauche. Ça s'est toujours produit ainsi. Cette concurrence n'a jamais empêché François Mitterrand de gagner deux fois l'élection présidentielle et moi-même de l'emporter en 2012."
Évidemment, cette déclaration provoque déjà l'ire du chef de file des insoumis Jean-Luc Mélenchon : "La seule victoire du parti socialiste, c'est d'avoir trompé tout le monde".
Nous nous sentons trahis et meurtris par le Parti socialiste. A l’évidence, le PS n’est plus un partenaire.
— Jean-Luc Mélenchon (@JLMelenchon) January 19, 2025
La censure distingue l’opposition et le Gouvernement.
La vérité politique éclatera au vote du budget. S'ils le votent, ils rompront l’union. pic.twitter.com/GSzbcVQt6P
Réactions en Corrèze
À Meymac, le maire socialiste Philippe Brugère, suppléant de François Hollande, salue d’abord la décision de son parti qui a négocié avec le Premier ministre sans le censurer : "Quand on revient sur les 4 000 suppressions de postes de l’Éducation nationale, ou sur le déremboursement des médicaments, ce sont quand même des éléments qui sont concrets, grâce à l’ouverture du PS."
Pour lui, la gauche doit rester plurielle : "La richesse de la vie politique en France, c’est dans la diversité. Ce n’est pas parce qu’on va être soumis aux Insoumis qu’on va revenir aux affaires."
Ce n’est pas les exclure, c’est offrir un choix différent aux électeurs de gauche.
Philippe Brugère,maire socialiste de Meymac (Corrèze)
Et, là aussi, une nouvelle posture face à Jean-Luc Mélenchon s’affirme : "Est-ce que vous croyez que l’électorat dans son ensemble est prêt à suivre Jean-Luc Mélenchon, alors que c’est la figure la plus détestée de toute l’offre politique ? Il fait plus peur aujourd’hui que Marine Le Pen…"
Les communistes pas surpris
Le ton est plus mesuré chez Nicolas Marlin, le secrétaire départemental du PCF en Corrèze, dont le groupe a voté la censure. Il ne semble pas surpris par l’attitude des socialistes : "Pour être utile, il faut obtenir des avancées. Il se trouve qu’on n’a pas le même curseur que le Parti socialiste, on serait tous au Parti socialiste si c’était le cas. On s’accommode de peu au Parti socialiste, c’est leur choix, mais ça paraît un peu maigre."
Lors des dernières législatives, Nicolas Marlin a fait campagne aux côtés de François Hollande. Se sent-il trahi ? "Je n’ai pas fait campagne pour François Hollande, j’ai fait campagne pour un programme. Aujourd’hui, est-ce que je me sens trahi ? Je ne vais pas aller jusque-là."
François Hollande reste une personne avec qui on peut discuter.
Nicolas Marlin,secrétaire départemental du PCF en Corrèze
"Maintenant, j’aimerais bien demander à François Hollande de se détacher de ses ambitions présumées pour 2027 et de s’intéresser à ce qui se passe aujourd’hui pour les gens.", tacle le secrétaire du parti communiste corrézien.
Une nouvelle période sensible s’ouvre à l’Assemblée nationale avec la préparation puis le vote du budget. Un congrès du Parti socialiste doit aussi être bientôt programmé. Le député Hollande devrait encore faire parler de lui...