La reprise de l’ancien Virgin de Bordeaux est officielle, avec un permis de construire validé par la Mairie de Bordeaux. Michel Ohayon transformera le bâtiment en hôtel-restaurant de luxe et commerces, pour une livraison prévue en 2026.
Pendant 12 ans, ce bâtiment visible depuis toute la place n'a cessé de se dégrader. Aujourd'hui, on lui annonce une nouvelle vie : il deviendrait un hôtel 5 étoiles.
12 ans d’abandon et une résurrection
Il y a 12 ans fermait un commerce emblématique de la place Gambetta : le Virgin Megastore.
Le 13 juin 2013, le commerce fermait en laissant à l’abandon un très vaste bâtiment de quatre étages et 5000 m² de surface visible de toute la place. Le vieil immeuble bardé de palissades et très longtemps squatté, fait tache dans une place entièrement rénovée et un ensemble de bâtiments uniformes.
Mais dès 2026, l'édifice devrait avoir retrouvé sa superbe, projette l'architecte du projet, Michel Pétuaud- Létang.
"Ce sera le plus bel immeuble de la place "
Guidé par les directives des bâtiments de France, l'architecte n'a pas eu voix au chapitre concernant les façades : elles doivent être conservées intactes dans un secteur classé.
Un exercice auquel Michel Pétuaud-Létang est bien exercé, puisqu'il a déjà rénové en 2003 le Grand hôtel de Bordeaux pour Michel Ohayon, un bâtiment XVIII également classé et reconverti en hôtel de luxe. Il avait alors qualifié cet exercice de "travail de bénédictin".
Mais là où le projet va cette fois plus loin, c'est qu'il projette de refaire les toitures telles qu'elles étaient au XIXᵉ, avant de subir les outrages du temps et des différents entrepreneurs.
On va remettre l’immeuble dans son état originel.
Michel Pétuaud-LétangArchitecte
"Ce sera peut-être le plus bel immeuble de la place puisqu’il sera refait à neuf", insiste l'architecte, très enthousiaste de ce projet qu'il prépare depuis une dizaine d'années avec son ami Michel Ohayon.
Un atrium entièrement vitré et magnifié
En son cœur, l'atrium mythique, pour tous ceux qui l'ont connu, sera non seulement conservé, mais magnifié. Considéré comme "un élément essentiel" par l'architecte, il "sera un lieu très vivant, captivant, excitant pour arriver jusqu’en haut".
Un ensemble intégralement vitré sur lequel donneront les chambres de l'hôtel, comme l'explique le concepteur du projet "Les chambres seront vitrées sans qu’on puisse voir dedans".
Deux ascenseurs en son sein, initialement conçus par Charles Bronson lui-même, PDG iconoclaste de Virgin, seront conservés en l'état. Ils permettront d'accéder au restaurant et à la terrasse avec une vue panoramique sur toute la ville.
De longues négociations avec la mairie
Le point de discorde avec la municipalité de Bordeaux résidait dans le fait qu’il n’avait pas prévu de commerce au rez-de-chaussée. Les tractations auraient été menées de longs mois, dans le plus grand secret, avant que soit donné le feu vert de la mairie.
"J'ai refusé un premier projet", explique le Maire de Bordeaux et "j'ai demandé qu’il y ait des commerces de détails en rez-de-chaussée."
Il est essentiel que cet immeuble central, emblématique, retrouve sa fonction de locomotive commerciale pour la place Gambetta, la rue Bouffard et tout le quartier.
Pierre HurmicMaire de Bordeaux
Le permis de construire inclut ainsi "deux locaux commerciaux de belle dimension, un hall marchant tourné vers la place, un grand hôtel et un restaurant."
"Je suis heureux d’avoir signé le PC à la fin de l’année pour ce projet de la Place Gambetta". Si le maire de Bordeaux est si content, au-delà de la rénovation de ce qu'il appelle lui-même "une verrue" sur la place, c'est aussi parce qu'il y voit "le retour d’une activité commerçante".
Afin de définir les commerces qui occuperont les lieux, un comité d'enseigne sera monté, comprenant la CCI, la mairie et l'entrepreneur." Pour que nous soyons associés au choix des futures enseignes" précise le Maire. "Notre souci est qu’il n’y ait pas d’enseignes concurrentes aux enseignes existantes dans le centre-ville de Bordeaux".

Racheté en 2015 par Michel Ohayon
Dès le rachat en 2015 par l'homme d'affaires bordelais, le projet est d'en faire un hôtel 5 étoiles. Un projet confié à son ami l'architecte et qui restera dans les tiroirs toutes ces années. Michel Ohayon s'en explique, "on l'a acheté et gelé à une période plus favorable, on me l'a reproché", mais à l'époque, dit-il, ce n'était pas le moment."Sur le centre-ville de Bordeaux, vous ne pouviez pas faire un projet sans le projet urbain". Il aura alors attendu la rénovation complète de la place, afin que son projet arrive comme un joyau dans son écrin.
Mais entre-temps, le 15 février 2023, la Financière Immobilière de Bordeaux, qui a participé au financement de cet achat, est mise en redressement judiciaire par le tribunal de commerce. L'incertitude est alors à son comble concernant l'avenir de celui qu'on appelle toujours "l'ancien Virgin".
L'avenir du projet et de l'homme d'affaires mystère
Michel Ohayon, dont la légende dit qu'il aurait fait fortune après la revente d'un commerce de vêtement à Bordeaux, a essuyé de nombreuses critiques lors de l'effondrement d'une partie de son empire.
Aujourd'hui, les questions demeurent quant à ses finances et ses capacités à mener à bien un tel projet. Comme son voisin direct, commerçant ayant vécu tous les remous de ces dernières années."Très bonne nouvelle !", s'enthousiasme Philippe Sayo, "maintenant est-ce que ça va vraiment se faire ?".
Des doutes que l'homme d'affaires balaie d'un revers de manche.
Ça fait 35 ans qu'on dit comment il fait.
Michel Ohayon,Entrepreneur
"Qu'ils continuent à se poser la question" insiste-t-il.
Sur l'enveloppe du projet, dont nous ne connaissons que l'estimation des rénovations faite par l'architecte : 20 millions d'euros, l'homme préfère rester taiseux, "je suis devenu très prudent sur les chiffres maintenant", esquive-t-il.
Mais après avoir signifié qu'il a "passé deux années très dures", faisant allusion aux faillites des enseignes Camaïeu et Go sport, ainsi qu'au redressement judiciaire de son groupe initial, l'homme d'affaires conclu : " si aujourd'hui notre groupe résiste, ce sera la preuve qu'il n'était pas surendetté".