Avec des finances dans le rouge, l’ombre du dépôt de bilan plane. Déjà relégué sportivement en Ligue 2, le cauchemar des Girondins de Bordeaux continue. Le club a été rétrogradé administrativement en National 1 mardi. Il a déjà fait appel de cette décision.
L'annonce de la DNCG, le gendarme financier du foot français est tombée mardi en fin d'après-midi, comme un coup de massue pour les supporters bordelais. Les Girondins devront jouer en Nationale 1 la saison prochaine. Nous sommes allés à leur rencontre ce mercredi matin 15 juin devant la boutique des Girondins rue Sainte-Catherine.
Une catastrophe pour le club
Christophe Hutteau, agent de joueurs, n'est pas surpris par cette décision. "C'est le scénario catastrophe que l'on prédit depuis des semaines", a-t-il estimé. Il a tenu à rappeler sur le plateau de France 3 Aquitaine ce mercredi midi que la relégation administrative est une "catastrophe pour le club, ses salariés mais aussi pour tous ceux qui travaillent de façon directe ou indirecte pour le club".
Ce sont des familles qui vont demain se trouver dans une situation difficile
Christophe Hutteau, agent de joueurFrance 3 Aquitaine
Du côté de la Métropole bordelaise, on fustige "l’absence de gestion sérieuse par les fonds d’investissement anglo-saxons sans expérience dans le football professionnel européen".
Alain Anziani, le président de Bordeaux Métropole, qualifie de "grave" la décision de la DNCG.
Elle sanctionne un club historique de l’élite du football français mais également toute une région et l’ensemble de ses supporters »,
Alain Anziani, président de Bordeaux Métropole
Le club a d'ores et déjà fait appel de cette décision auprès de la DNCG.
Trop tard selon Christophe Hutteau, l'agent de joueurs. Pour lui, le club doit sauver ce qui peut l'être, en vendant ses joueurs.
Sekou Mara, l'avant-centre de 19 ans, pourrait notamment rapporter au club une dizaine de millions d'euros.
Une longue descente aux enfers
La situation du club aujourd'hui catastrophique ne date pas d'hier. Et pour Alain Anziani, comme pour Christophe Hutteau, Gérard Lopez l'actuel président n'en est pas totalement responsable.
Les pertes financières ont commencé à s'accumuler au moment du rachat par un fonds d'investissement anglo-saxon, après le désengagement de son financier précédent, le groupe M6.
Gérard Lopez, entrepreneur, investisseur et homme d'affaires hispano-luxembourgeois, qui a déjà connu des démêlés financiers dans un autre club de Ligue 1 (Lille), a ensuite continué à creuser le trou des finances du club.
A l'annonce du verdict de la DNCG, mardi, le président a pourtant exprimé sa "consternation".
Cette décision brutale - après une audition de près de deux heures qui s'est déroulée dans de bonnes conditions - prive le club de poursuivre la mise en œuvre de la stratégie d'assainissement de sa situation financière et d'écrire une nouvelle page de l'histoire du FC Girondins de Bordeaux
Girondins de BordeauxCommuniqué de presse
Un montage financier qui n'a pas séduit la DNCG
Le club estime avoir présenté des garanties "suffisantes" comme "le réengagement de l’actionnaire majoritaire à hauteur de 10 millions d'euros, un accord avec les détenteurs de la dette du club, ainsi que des offres de vente de quelques joueurs".
Cet accord, justement, avec les créanciers King Street et Fortress, n’a pas plu aux membres de la DNCG.
Le propriétaire des Girondins de Bordeaux avait en effet convenu de décharger la moitié de la dette du club (26 millions d'euros sur les 52 millions au total) vers Jogo Bonito LD, sa société personnelle.
Le montant de la dette restant à la charge des créanciers (les 26 autres millions plus les 15 millions dus à la Métropole en versement des loyers du stage Matmut Atlantique) serait allégé par l'intéressement touché sur le transfert du joueur Aurélien Tchouaméni (formé à Bordeaux) de Monaco au Real Madrid (environ 11 millions d'euros) et celui du transfert de son ex-coéquipier Jules Koundé.
Ces dispositions ont fait tiquer l'instance de régulation qui a souligné justement "l’absence d’abandon par les prêteurs, d’intéressements sur ventes des joueurs en faveur du club" et "l’absence de préfinancement de la vente des joueurs".
Copie à revoir donc pour Gérard Lopez.
Un nouvel accord … ou la faillite
Le président Gérard Lopez va tenter d'arracher, avant son appel à la DNCG, un meilleur accord avec les fonds d'investissement américains King Street et Fortress pour renflouer les finances du club.
Mais les créanciers accepteront ils de mettre encore la main au portemonnaie pour éviter de tout perdre ?
En cas de refus, Gérard Lopez devrait déposer le bilan devant le tribunal de commerce, suivre une procédure de redressement judiciaire, pouvant aller jusqu'à la liquidation.
Car si la relégation en N1 se confirme, la manne des droits télé fondrait comme neige au soleil, creusant encore le déficit de la société commerciale. Le club serait contraint de brader ses joueurs et de fermer ses portes.
Gérard Lopez verrait alors un deuxième de ses clubs déposer le bilan. Le Royal Excel Mouscron, racheté en 2020 par l'homme d'affaires et qui évoluait en deuxième division belge, s'est déclaré en faillite au mois de mai 2022.
L’appel formulé par les Girondins sera étudié début juillet, pour pouvoir conformer les calendriers sportifs aux décisions prises, et finir de clarifier l'avenir du club.