Les grosses voitures vont devoir passer à la caisse. C’est l’annonce faite par la mairie de Bordeaux, ce vendredi 17 janvier. À compter du 2 mai, certaines catégories de véhicules devront payer une majoration de leur stationnement. Les réactions des Bordelais sont mitigées.
Une discrimination pour certains, une bonne mesure pour d’autres. Dans la capitale girondine, l'annonce de la mairie de Bordeaux d’imposer une majoration sur le stationnement des véhicules les plus lourds ne fait pas l’unanimité.
Pour ou contre ?
“Je suis un peu contre ces discriminations systématiques qui catégorisent les gens, regrette une Girondine. Après tout, on fait ce qu’on veut de notre pouvoir d’achat.”
Pour d’autres, il faut prendre en compte l’enjeu environnemental. “Je pense qu’il faudrait plutôt empêcher ces véhicules d'entrer en ville. On peut s’en passer ici, mais je ne crois pas qu’il faille aller chercher encore une taxe”, tempère un Bordelais.
Ce serait plus intéressant de taxer en fonction des émissions de CO2 que du poids.
Un Bordelais,à propos de la taxation des SUV
Déjà ciblés par le malus
Cette mesure se fonde en effet uniquement sur le poids des véhicules. Tous les modèles au-dessus de 1 600 kg pour la gamme thermique et 1 900 kg pour la gamme hybride et électrique, verront donc leur abonnement ou leur facturation augmenter d'ici à cinq mois.
Le montant de la majoration n'est pas encore connu. Il s'appliquera uniquement lorsque les véhicules seront stationnés dans les rues de Bordeaux. “Cette majoration concerne les abonnements et le tarif horaire. En revanche, l'abonnement des professionnels en est exonéré”, explique la mairie dans un communiqué. Il s’agit, pour le maire écolo Pierre Hurmic, des véhicules déjà ciblés par le malus instauré par l’État.
Outre les professionnels, les véhicules courants ou familiaux seraient également exemptés de cette taxe. Il s’agit des 25 véhicules les plus “courant du parc automobile français" comme les Clio, les 208, les Dacia Sandero ou les C3. La mesure ne concernerait pas non plus les Renault Scénic, les C4 Picasso ou encore les Peugeot 2008 hybrides.
Polluants, encombrants et dangereux
La décision est motivée selon la mairie sur quatre critères. La cause environnementale en premier lieu, ces voitures dites SUV, “consomment davantage de ressources et génèrent plus de pollution”. Selon le baromètre de la progression des SUV en France de WWF en 2024, il produirait jusqu'à 20% de CO2 de plus que les autres voitures.
En parallèle, la mairie vise aussi une ville plus paisible. Si d’une part, elle dépeint des véhicules “encombrants” qui “réduisent la capacité de stationnement” et “impactent la circulation dans une ville”, ils seraient aussi plus accidentogènes. “Leur hauteur limite la visibilité des piétons et cyclistes", selon la mairie.
Un piéton a jusqu'à deux fois plus de risques d'être tué en cas de collision avec un SUV par rapport à une voiture standard.
Communiqué de la mairie de Bordeaux
Selon elle, les conducteurs de ces véhicules auraient également 25% de risques en plus d’avoir un accident en conduisant un SUV.
Enfin, la mairie accuse aussi ces véhicules lourds de “dégrader” la voirie. “Leur poids accélère la dégradation des routes et trottoirs, avec des coûts supplémentaires pour la collectivité”, explique-t-elle. "Faux !", répond Claude Expert, ancien président du Club automobile du sud-ouest. “La règlementation pour les routes en France fixe un maximum de poids de 13 tonnes. Je pense donc que les routes soutiennent le poids de ces véhicules sans être dégradées”, rappelle-t-il.
"Syndrome Hidalgo"
Au total, ce sont donc environ 10% des abonnés et 14% des visiteurs qui seraient concernés par cette majoration. “Un parc automobile important, rappelle Claude Expert. Ça va limiter un nombre important de familles.”
L'ancien président du club automobile accuse la mairie d’un geste “politique” qui stigmatise un nombre conséquent de Bordelais et d’habitants de la métropole qu’il évalue à plus de 10%. “J’ai bien peur que Pierre Hurmic soit atteint du syndrome Hidalgo. Il veut imposer les mêmes restrictions contre lesquelles nous nous élevons avec vigueur”, raille Claude Expert.
S’il veut transformer Bordeaux en musée pourquoi pas, mais il ne faut pas s’étonner que de nombreux commerces mettent la clé sous la porte.
Claude ExpertAncien président du Club automobile du sud-ouest
Lui, propose de rehausser ce plafond à 1 800 kg pour les véhicules thermiques. “Ce n'est pas parce qu’un véhicule est plus lourd qu’il est plus polluant. En revanche, les véhicules visés correspondent aux véhicules que les familles achètent lorsqu’elles ont des enfants pour avoir plus de confort”, souligne-t-il.
L'ancien président du club automobile espère, d’ici au 2 mai prochain, faire évoluer la mesure du maire de Bordeaux. Pour la suite, il confie se réserver le droit d’entamer une procédure judiciaire devant le tribunal administratif.