En accord avec le Parquet national financier, l'ex-société Areva, devenue Orano, accepte de payer une amende de 4,8 millions d'euros contre l'abandon de poursuites pour corruption en Mongolie. Propriétaire d'un site industriel en Haute-Vienne, le groupe doit également prendre en charge "un programme de mise en conformité" de 1,5 millions d'euros pendant trois ans.
C'est une façon de "traiter le passé et de pouvoir assumer les conséquences de cette enquête", d'après les termes employés par Areva. Lundi 9 décembre, l'ancien géant du nucléaire a accepté de payer une amende de 4,8 millions contre l'abandon de poursuites pour corruption en Mongolie. Propriétaire d'un site industriel à Bessines-sur-Gartempe, en Haute-Vienne, le groupe Orano, qui a repris les activités de l'ex-société, devra prendre en charge "un programme de mise en conformité" de 1,5 million pendant trois ans, sous le contrôle de l'Agence française anticorruption.
Ni jugement ni condamnation
Cette décision intervient dans le cadre d'une convention judiciaire d'intérêt public conclue avec le Parquet national financier (PNF). Pour Areva, il s'agissait de "pouvoir assumer les conséquences de cette enquête" et de "prendre l'amende à son compte parce qu’elle avait été d'une certaine manière la grande responsable de cette activité". Stéphane Noël, président du tribunal judiciaire de Paris, a néanmoins rappelé que la validation d'une telle convention "[n'emportait] pas déclaration de culpabilité et [n'avait] ni la nature ni les effets d'un jugement de condamnation".
Lancée en 2015, l'enquête de l'Office anticorruption s'est concentrée sur le versement de plus d'un million d'euros à un homme d'affaires mongol entre 2014 et 2017 par Eurotradia International. Détenue à l'époque par Airbus, Thales et Dassault Aviation, cette société serait intervenue, selon le PNF, "en tant que vecteur corruptif au soutien d'Areva en Mongolie" : en 2010, elle avait signé avec la multinationale française un contrat cadre de service pour une mission d'assistance financière, juridique et commerciale.
Le but consistait à obtenir, auprès des autorités mongoles, la signature d'un pacte d'actionnariat et de licences minières. Eurotradia avait ensuite signé un contrat de consultant avec l'homme d'affaires mongol pour aider Areva dans ses négociations. Problème : ce dernier ne serait jamais intervenu dans les pourparlers. Les fonds versés auraient été investis "dans un projet immobilier détenu à 80% par un agent public mongol de haut niveau intervenu dans le processus d'implantation des activités d'Areva en Mongolie".
"D'âpres négociations" dans le calcul de l'amende
Le montant de l'amende a suscité des "échanges importants et d'âpres négociations", a précisé Céline Guillet, procureure adjointe au PNF. À cause de la restructuration d'Areva, disparue en 2018, et de la création, la même année, d'Orano, seuls les chiffres d'affaires des exercices 2018 à 2020 ont été comptabilisés. "La taille de l'entreprise", "l'utilisation d'un intermédiaire commercial concourant à la dissimulation des agissements" et "l'implication d'agents publics de haut niveau" constituent les facteurs qui ont présidé au calcul de l'amende.
Néanmoins, le Parquet financier a estimé que les avantages tirés des manquements constatés étaient "inexistants", étant donné l'absence de "rentabilité".
Dans un communiqué de presse, l'entreprise Orano a signifié que la convention conclue avec le PNF intervenait "au terme de plusieurs années de coopération de l’entreprise avec les autorités judiciaires". Elle a tenu à rappeler que cet accord soldait une procédure initiée "avant sa création", et qui "concernait des activités de l’ancien groupe Areva, sans reconnaître sa responsabilité".