Plusieurs études récentes le montrent : la santé mentale des étudiants se dégrade. À l'Université de Limoges (Haute-Vienne), des formations de premiers secours en la matière sont régulièrement organisées. Comme pour le secourisme habituel, il s'agit d'apprendre à repérer les troubles, afin d'agir au plus tôt.
"S'il y a un sujet délicat qui est difficile pour vous et vous fait remonter des émotions, vous pouvez sortir de la salle." D'emblée, l'avertissement liminaire offre un aperçu du caractère singulier de la formation à venir. Dans les locaux de l'Université de Limoges, une dizaine d'étudiants s'apprête à découvrir les premiers secours dans un domaine inattendu : la santé mentale. Qu'ils suivent un cursus en sport, sciences ou édition, tous se sont portés volontaires. "J'ai des personnes de mon entourage qui en ont souffert et j'aurais aimé savoir comment réagir auprès d'eux, témoigne Laure. Maintenant, peut-être que j'y arriverai mieux." Thomas rebondit : "Je n'y connaissais rien. C'est pour apprendre et voir si cela peut m'être utile, plus tard."
Faire preuve d'empathie et essayer de ne pas porter de jugement.
ThéoÉtudiant formé aux premiers secours en santé mentale
Les sujets abordés s'avèrent sensibles et importants. Les deux formatrices révèlent quelques chiffres significatifs. Les troubles psychiques représentent le deuxième plus gros problème de santé des 15-29 ans et la deuxième cause de handicap. Pour 75% des personnes concernées, les premiers signes se développent avant 25 ans.

Une fois l'ampleur du phénomène mesurée, les étudiants présents apprennent comment agir, comment, concrètement, se mettre à l’écoute des autres. L'attitude physique, par exemple, constitue un détail souvent négligé : "Ne pas être les bras croisés, avoir une posture ouverte, agréable." La façon dont on reçoit les informations, aussi : "Faire preuve d'empathie et essayer de ne pas porter de jugement."
Identifier les signes d'alerte
Au fil des heures, leurs futures interventions se dessinent. Il faut approcher la personne en souffrance, la réconforter, l’orienter. Théo semble particulièrement investi : "On est en train de faire un schéma sur le parcours visant à encourager, à aller vers des professionnels, des personnes dont c'est le métier."
Dépression, troubles anxieux, pensées suicidaires… Avec des mises en scène et des données scientifiques, les formatrices montrent comment reconnaître les problèmes psychiques pour agir le plus tôt possible. Célia Soirat, infirmière au service de santé universitaire, égraine une liste de signes qui peuvent alerter : "Se sentir inutile ou coupable sans raison objective. Penser beaucoup à la mort ou souhaiter être mort. Difficultés à se concentrer ou à prendre des décisions."
Ce n'est pas poser un diagnostic. C'est juste regarder les signes d'alerte pour orienter la personne.
Nayllana AymardCoordinatrice de projets
À ses côtés, Nayllana Aymard, la coordinatrice de projets, tient à apporter une nuance primordiale : "Ce n'est pas poser un diagnostic. C'est juste regarder les signes d'alerte pour orienter la personne."
À l’issue de la formation, les étudiants deviennent secouristes en santé mentale. Au-delà des simples réflexes assimilés, qui constituent des outils concrets, tous envisagent désormais la santé mentale sous un autre angle. "Au même titre que la santé physique, au même titre que quand on a un rhume, on le soigne, une maladie mentale, on la soigne aussi", explique Maryus. Méryl l'assure : "Les personnes n'en parlent pas, mais je pense que je serai plus à même de voir les problématiques sans même qu'elles m'en parlent."
À l’Université de Limoges, deux cents étudiants ont déjà été formés. Le nombre de cessions devrait bientôt doubler. Si les troubles psychiques touchent particulièrement les jeunes, des formations de premiers secours en santé mentale peuvent aussi être organisées dans toutes les entreprises.