On parle beaucoup du loup, qui fait son retour en Limousin et qui attaque régulièrement des troupeaux. Nos animaux d’élevage peuvent être la proie de nombreux prédateurs, mais il y en a un dont on parle peu, c’est le corbeau. Un éleveur de Haute-Vienne a perdu plusieurs brebis et agneaux ces derniers mois, et il met en cause les grands corbeaux noirs.
"Voilà, ça, c'était une brebis de deux ans", souffle Vincent Frugier Nocart, tout en extrayant d'un sac rouge le cadavre désarticulé de l'une de ses brebis attaquées la veille. "Elle a été élevée au biberon par mon fils ! On le voit, elle a un œil manquant. Et elle a été complètement consommée au niveau de l'abdomen !", se souvient l'éleveur, la gorge serrée.
Une dizaine d'agneaux perdus
C'était il y a qu'il y a quelques jours, et depuis le mois d'octobre, cet éleveur raconte avoir perdu une dizaine d'agneaux. Des attaques qui auraient toujours le même mode opératoire. Pour lui, pas de doute, même s'il n'a jamais assisté à une attaque : le coupable, c'est le grand corbeau.
"Généralement, ça se passe très tôt le matin ! Du coup, depuis quelque temps, on se lève et puis on essaye de venir avant le lever du jour pour contrôler que tout se passe bien et surtout les effrayer au cas où ", se rappelle l'éleveur éprouvé.
Les voici, ces grands corbeaux que l'éleveur a filmés, planant au-dessus de son troupeau. Son grand regret, c'est que même ses chiens, dressés pour protéger les brebis, n'ont rien pu faire. "Ils sont tellement nombreux, et tellement insistant que les chiens, au bout d'un moment, ils en ont ras-le-bol et ils ne font plus rien !", se désole-t-il.
Dans le pré, les naissances régulières préoccupent Vincent, qui redouble de vigilance. Il met à l'abri systématiquement les agneaux les plus vulnérables. "Dès qu'on a une brebis qui est prête à agneler, ou qui a agnelé au pré, systématiquement, on est obligé de rentrer les agneaux, parce que sinon, on a une chance sur deux de se les faire prédater."
Les corbeaux coupables ?
La prédation du grand corbeau n'est pas éligible à des indemnisations. Les éleveurs sont donc souvent démunis dans ce genre de situation, d'autant plus que ce corvidé est une espèce protégée. "On a vraiment l'impression d'être des laissés-pour-compte, et d'être seul dans notre détresse !", confie l'éleveur perdu au milieu de ses bêtes qui restent.
Les services de l'État, au premier rang desquels la DREAL et la préfecture, que nous avons sollicités pour ce reportage, ne souhaitent pas intervenir dans ce débat, en cette période d'élections dans les chambres d'agriculture.
Le responsable de la LPO en Limousin, Jérôme Roger, estime, pour sa part, que les brebis ont bien été partiellement dévorées par des corvidés, mais que l'attaque initiale est probablement due à un autre prédateur, par exemple un chien errant.